RDC : à quoi pourrait ressembler la Monusco nouvelle formule ?

Le mercredi 11 octobre, le Conseil de sécurité doit rendre publique la nouvelle configuration de la Monusco. Contraction budgétaire, réduction des effectifs, changement de mode opératoire … À quoi ressemblerait la mission onusienne en RDC ?

Un Casbleu de la Monusco à Kanya Bayonga, dans l’est de la RDC, le 15 février 2017. © Trésor Kibangula/J.A.

Un Casbleu de la Monusco à Kanya Bayonga, dans l’est de la RDC, le 15 février 2017. © Trésor Kibangula/J.A.

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Publié le 6 octobre 2017 Lecture : 5 minutes.

C’est la plus importante opération de maintien de la paix dans le monde. Déployée en 1999 en RDC sous le label de la Mission de l’Onu au Congo (Monuc), la Monusco, entendez Mission de l’Onu pour la stabilisation du Congo, s’apprête à subir une nouvelle « transformation en profondeur ». Mais António Guterres prévient : pas de changement brusque qui pourrait entraver le travail des Casques bleus sur le terrain, écrit en substance le secrétaire général des Nations unies dans son rapport trimestriel de 27 pages déposé au Conseil de sécurité et dont les grandes lignes ont fuité à New-York.

Au siège de la Monusco à La Gombe, dans le centre-ville de Kinshasa, on s’abstient de commenter ces mises en garde d’António Guterres. Une source au sein de la mission onusienne nous apprend même que « New-York a appelé » les responsables de la Monusco afin de les dissuader de répondre aux questions des médias « sur ce document qui n’a pas encore été rendu public ». Et pour cause ? « Rien n’est encore décidé », nous répète-t-on. Des tractations pourraient s’étendre jusqu’à la dernière minute.

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Vers une « réduction considérable » des troupes de la Monusco ?

Il faut toutefois s’attendre à de nouveaux ajustements de la Monusco à l’issue de la réunion du Conseil de sécurité le mercredi 11 octobre. Au centre des débats : la question de l’effectif au sein de la Monusco. Le pouvoir de Kinshasa continue à insister sur une « réduction considérable » des Casques bleus sur son sol.

Une petite diminution a été consentie fin mars. Le Conseil de sécurité avait en effet décidé de réduire – mais très légèrement – les effectifs maximums des troupes onusiennes sur le territoire congolais.

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En réalité, comme nous le démontrons à l’aide du graphique ci-dessus, la Monusco dont les hommes étaient bien en-deçà de plafonds autorisés, n’a eu à rapatrier qu’un bataillon de la brigade du Nord-Kivu et 76 officiers d’état-major et observateurs militaires en guise de geste de bonne volonté.

Pas suffisant aux yeux de Joseph Kabila. Devant la tribune des Nations unies, le 23 septembre, le chef de l’État congolais a de nouveau rappelé la nécessité du « redimensionnement de la force de la Monusco » que son gouvernement n’a cessé de réclamer « depuis plusieurs années ».

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Joseph Kabila voudrait donc que le « dialogue stratégique » entamé avec les Nations unies « [détermine] le rythme de réduction de la force de la Monusco jusqu’à son retrait total » de la RDC.

En clair, Kinshasa souhaite des diminutions drastiques et rapides des troupes onusiennes dans sept provinces sur les 21 que comptent le pays. Des régions qui, selon les autorités congolaises, ne nécessiteraient plus aujourd’hui une quelconque concentration des Casques bleus.

Carte de la RDC. © Jeune Afrique

Carte de la RDC. © Jeune Afrique

Les membres du Conseil de sécurité entendront-ils, cette fois-ci, le son de Kinshasa ? Une certitude : « Des ajustements sont attendus », souffle une source diplomatique dont le pays participe aux derniers arbitrages. Mais côté Monusco, on met en évidence l’importance de la présence de ses hommes sur le terrain.

Fin septembre, une attaque d’un groupe de miliciens maï-maï a été repoussée à Uvira, dans le Sud-Kivu, grâce à l’appui des Casques bleus aux soldats congolais, rappelle-t-on. Le commandant Adil Esserhir, porte-parole militaire par intérim de la mission onusienne, précise : « Au cours de cet accrochage, trois bateaux armés de mitrailleuses [appartenant aux miliciens] ont été détruits par les hélicoptères d’attaque de la Monusco, au large de la localité de Kasekezi, sur le lac Tanganyika, en territoire de Fizi. »

Une Monusco plus mobile et mieux équipée ?

Dans la nouvelle formule de la Monusco, un accent sera également mis sur sa stratégie opérationnelle. C’est pourquoi elle a lancé récemment son deuxième bataillon d’intervention rapide. Ce qui, selon elle, rend « plus souple et réactive » sa force déployée dans le Nord-Kivu, dans l’est de la RDC.

Un « groupe d’évaluation de la menace militaire » est aussi prévu dans le nouveau dispositif de la mission onusienne. Il permettrait de « fournir des informations et une appréciation de la situation nettement plus précises ». D’autant que les prochains mois risquent d’être tendus en RDC et le pays pourrait « entrer dans une période de volatilité sensible», rapporte António Guterres dans son document stratégique remis au Conseil de sécurité.

Nous demandons la publication d’un calendrier électoral qui programmera les élections cette année », déclare une source onusienne.

Initialement prévue avant fin 2016, l’élection du successeur de Kabila avait finalement été reportée « au plus tard en décembre 2017 », selon les termes de l’accord politique conclu le 31 décembre. Et on s’achemine désormais vers un nouveau report, au grand dam du Rassemblement, principale plateforme de l’opposition congolaise qui appelle alors à une « transition sans Kabila ».

Le Conseil de sécurité avait demandé à la Monusco de « fournir un appui technique et politique à la mise en œuvre de l’accord du 31 décembre 2016 ». La mission onusienne, même dans sa nouvelle configuration attendue, croit pouvoir continuer à jouer ce rôle.

« C’est pourquoi nous demandons à la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) de publier rapidement un calendrier électoral qui, nous le souhaitons, programmera les élections cette année comme prévu dans le compromis politique et exigé par la résolution 2348 du Conseil de sécurité », souligne un responsable de la Monusco à Kinshasa.

Une Monusco à budget réduit ou rééquilibré ?

Autre enjeu : le budget de la Monusco. L’opération de maintien de la paix au Congo la plus coûteuse au monde – 1,3 milliard de dollars en 2016 – devra désormais se contenter désormais de 1,1 milliard pour ses activités de la période allant de juillet 2017 à juin 2018. Mais seulement 27 % de cette somme sont destinés aux dépenses opérationnelles, contre près de la moitié du pactole versée aux hommes en uniforme de la force onusienne.

Principal contributeur financier, les États-Unis voudraient réduire davantage ce budget de la Monusco. Ce qui n’est pas du goût d’António Guterres. « Les nouvelles coupes budgétaires dans cette mission (…) pourraient compromettre sa capacité à remplir ses obligations principales », alerte le secrétaire général de l’Onu.

« Le but ultime de la Monusco est d’empêcher l’effondrement de la RDC qui menacerait la stabilité régionale et internationale », conclut António Guterres. Comme il y a bientôt 20 ans, lorsque les premiers Casques bleus de cette mission ont été déployés sur le sol congolais, la menace d’une aggravation de la situation sécuritaire est de nouveau d’actualité. Retour à la case départ ?

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