Fred Bauma : « La pensée de Sankara restera à jamais vivante »
« Les morts ne sont pas morts », disait Birago Diop. « Ils sont dans le feu qui s’éteint, dans les herbes qui pleurent, dans le rocher qui gémit. » C’est ce qu’on dira de celui qui mourut il y a trente ans, qui n’eut point droit à des obsèques dignes de son rang et qui n’a ni mausolée ni ville portant son nom.
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Fred Bauma
Directeur au GEC (Groupe d’Expert pour le Congo) à New York, Etats-Unis, Activiste de droits humains et militant au sein du mouvement citoyen Lutte pour le changement (LUCHA)
Publié le 13 octobre 2017 Lecture : 2 minutes.
Qui a tué Sankara ? Retour sur une affaire d’État, 30 ans après…
Le 15 octobre 1987, le président burkinabè Thomas Sankara était assassiné avec douze de ses compagnons. Trente ans après, alors que le doute sur le commanditaire plane encore, le souvenir du leader de la révolution du Burkina Faso est toujours présent dans l’esprit de ses proches, comme dans celui de nombreux Burkinabè.
Pour Sankara, comme pour Lumumba avant lui, on n’aura pas tort de dire qu’il est des hommes qui ont vaincu la mort. Ils sont dans cette jeunesse qui bouillonne, qui se lève contre les injustices et l’oppression, et qui refuse obstinément de ressembler aux élites politiques ayant ruiné le continent. Ils sont dans ces jeunes activistes, musiciens, peintres ou blogueurs qui, de Goma à Ouaga, de Dakar à Lomé, de Sidi Bouzid à Harare, ont foi en une autre Afrique. Celle de Sankara, l’homme intègre.
Sankara croyait en une Afrique libre, digne et décomplexée. Celle qui ne dépend pas de l’aide extérieure mais pour laquelle le travail est source de dignité et de bonheur. Une Afrique où l’homme et la femme ont des chances égales de s’épanouir et de prospérer.
Accepter de vivre africain est la seule façon de vivre libre, de vivre digne
Conscient des limites, il n’en faisait point une fatalité : « Accepter de vivre africain est la seule façon de vivre libre, de vivre digne », disait-il. Il croyait en la possibilité pour l’Africain de se libérer du joug de l’esclavage. De tous les esclavages. Il croyait profondément au changement, jusqu’à en payer le prix.
Comme certains dirigeants africains actuels, Sankara aussi se disait anti-impérialiste. Mais alors que les premiers ne l’invoquent que quand on leur rappelle qu’ils ne devraient pas changer les Constitutions à leur guise, ou quand on leur demande des comptes en matière de droits de l’homme, qu’on fustige la corruption de leur famille et de leur régime, Sankara trouvait l’impérialisme « dans le grain de riz, de maïs et de mil importé ». Il voulait que les Africains s’en affranchissent.
La pensée de Sankara, à jamais vivante
Peu avant sa mort, il disait se sentir « isolé, incompris et mal aimé ». Tout comme la jeunesse d’aujourd’hui, il était considéré comme un agitateur, un homme gênant, voire un « virus » dangereux qu’il fallait à tout prix empêcher de se propager. Son franc-parler, sa pensée et son action révolutionnaires, son caractère anticonformiste agaçaient et menaçaient autant ses pairs africains que les leaders occidentaux.
Son sort a vite été trouvé : la mort. Mais trente ans plus tard, son combat n’a jamais été plus actuel et plus vif qu’aujourd’hui. Son esprit vit dans les cœurs ardents de nombreux jeunes. Incomprise des élites de son époque comme de celles d’aujourd’hui, la pensée de Sankara restera à jamais vivante, et continuera d’inspirer et de façonner le changement inexorable de l’Afrique.
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Qui a tué Sankara ? Retour sur une affaire d’État, 30 ans après…
Le 15 octobre 1987, le président burkinabè Thomas Sankara était assassiné avec douze de ses compagnons. Trente ans après, alors que le doute sur le commanditaire plane encore, le souvenir du leader de la révolution du Burkina Faso est toujours présent dans l’esprit de ses proches, comme dans celui de nombreux Burkinabè.
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