Tunisie : comment faciliter la transmission des entreprises familiales?
Si l’économie tunisienne reste largement basée sur les entreprises familiales, l’arrivée de la troisième génération – celle des petits-enfants – nécessite une gouvernance plus rationnelle pour assurer la pérennité de ces structures. Lors de son dernier Forum de la gouvernance, l’Institut arabe des chefs d’entreprises (IACE) a donné quelques clés pour facilité cette transition.
Les entreprises familiales, c’est-à-dire celles dont les actionnaires principaux appartiennent à une même famille, représentent 70 % du PIB tunisien. Plus de la moitié d’entre elles affiche un chiffre d’affaires supérieur à 50 millions de dinars (17,1 millions d’euros).
Ces chiffres émanent de la première étude en Tunisie sur les entreprises familiales réalisée par la société de conseils BDO pour l’Institut arabe des chefs d’entreprises (IACE), un think-tank dédié aux entreprises, qui organisait jeudi à Tunis son 5e Forum de la gouvernance sur le thème « Préparer le passage de la 2e à la 3e génération des entreprises familiales tunisiennes ».
Succession écrite
Si ces résultats témoigne de la maturité de ce type de sociétés dont les plus importantes remontent à la fin des années 1960, cette bonne santé financière est fragile. L’arrivée de la troisième génération, celle des petits-enfants, nécessite une gouvernance plus rationnelle pour assurer la pérennité.
La deuxième génération ne concernait que les frères et, parfois, les sœurs. À l’étape suivante, il s’agit de faire avec des cousins, aux relations familiales éventuellement distendues, et surtout avec les managers de l’entreprise qui s’est développée entre-temps.
« La succession doit être écrite et non plus seulement décidée oralement, comme le favorise notre culture, pour clarifier la situation auprès de tous les membres de la famille et ne pas démotiver les dirigeants extérieurs qui pourraient se sentir lésés », prévient Ahmed Bouzguenda, le président de l’IACE.
Au sein du groupe Bayahi, quatrième plus grande entité économique familiale de Tunisie en 2016 avec un chiffre d’affaires de 1 milliard de dinars, présent dans l’assurance, la distribution – avec Magasin général, dont il vient d’ailleurs de racheter, le 2 novembre, les 49 % de parts de Poulina -, l’industrie (Tunisie Profilé Aluminium) ou encore l’agriculture, avec la propriété d’exploitations maraîchères, la transition générationnelle est déjà prête : les trois frères dirigeants (Tahar, Yahia et Taieb) ont fait appel à un coach pour intégrer au mieux les sept cousins amenés prochainement à être les futurs patrons.
« Nous avons même mis en place un comité des jeunes dans lequel seuls les membres de la troisième génération sont présents. Même ceux qui sont encore étudiants reçoivent les procès-verbaux du conseil d’administration », précise Taieb Bayahi, PDG de la Lloyd assurances en Tunisie. Une politique pro-active qui est loin d’être encore la norme. Selon l’étude de BDO, 72 % des entreprises familiales n’ont mis en place aucune action de transmission des pouvoirs.
Une passation facilitée dans les structures en holding
La structure en holding est la solution préconisée pour encadrer au mieux la passation de pouvoir. Les nombreux membres de la famille peuvent ainsi se répartir plus facilement les tâches de management selon les différents secteurs d’activité du groupe et se retrouver au sein du conseil d’administration.
À condition, toutefois, de le mériter. Le groupe Elloumi (2,2 milliards de dinars de chiffre d’affaires ) a ainsi édicté des recommandations pour la nomination d’un membre de la famille à une charge de direction. Parmi elles, figurent l’obligation d’un vrai poste vacant – pour ne pas tomber dans le népotisme – et une expérience internationale reconnue. Ce dernier point rejoint d’ailleurs un désir de la troisième génération de connaître une expérience hors de l’entreprise familiale avant de l’intégrer, ce qu’ont mis en avant 56 % des personnes interrogées.
Fadhel Abdelkefi, président Tunisie Valeurs, intermédiaire en Bourse, recommande aux familles entrepreneuriales de penser à une ouverture en Bourse et à la mise en place de stock-options pour assurer la croissance de leurs entreprises. Selon lui, les sociétés familiales entrant en Bourse passent rapidement de 20 % d’actions flottantes à 5 % après rachat par une partie des membres de la nouvelle génération, « ce qui est regrettable », estime celui qui était ministre de l’Investissement jusqu’au 18 août.
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