Togo : que dit l’oracle, cette année ?

Selon que la pierre sacrée sera blanche, bleue ou rouge, le peuple guin sera heureux ou malheureux. Voyage en pays vaudou.

Publié le 14 juillet 2014 Lecture : 3 minutes.

Aného, c’est la célèbre cité de la pierre sacrée. Chaque année, au début du dernier trimestre de l’année calendaire (qui équivaut au nouvel an lunaire), les Guins se réunissent à environ 50 km à l’est de Lomé, au sanctuaire de Glidji-Kpodji, siège des 41 divinités, pour la "prise de la pierre sacrée".

Au cours de cette cérémonie, en fonction de la couleur de la pierre "prise" dans la forêt par les grands prêtres, l’oracle révèle le destin du peuple guin pour l’année à venir, ses bonheurs, mais aussi les malheurs qui le menacent et que le respect des interdits permettra de tenir éloigné de la cité.

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Il ne s’agit pas là de folklore. Les adeptes du vaudou lankpan y croient dur comme fer, et nombre de Togolais ne sont pas insensibles à ses mystères. En pays guin, la tradition animiste cohabite avec les Églises chrétiennes dans un syncrétisme linguistique, ethnique et religieux très réussi.

Les pierres blanches ou bleu azur sont les plus espérées

Le 29 août 2013, en présence des représentants de chaque divinité, d’une foule d’adeptes venus de toute la région et d’acteurs de la vie politique, sociale et culturelle, la 351e cérémonie de prise de la pierre sacrée a révélé une pierre de couleur blanche, porteuse d’un message "de prospérité, de réconciliation", appelant à faire "davantage d’offrandes aux divinités de l’eau", a annoncé l’oracle.

Les pierres blanches et bleu azur sont les plus espérées. La pierre rouge est la plus redoutée. Ici, chacun se souvient que, dans les années 1970, la prise d’une pierre de cette couleur a été suivie d’une grande sécheresse, de mauvaises récoltes, d’accidents de la circulation et de naufrages à répétition sur le lac Togo.

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Dans le sillage de cette célébration annuelle, qui mobilise tout le peuple guin, est né le Festival des divinités noires, dont la 9e édition doit se dérouler en décembre prochain. Créée par l’Association pour la sauvegarde du patrimoine culturel africain (Acofin), qui réunit des passionnés des traditions, originaires du continent, d’Europe et de la diaspora des Amériques, cette manifestation a pour objectif de promouvoir et de sauvegarder le patrimoine culturel et cultuel.

Pour Têtê Wilson-Bahun, président de l’Acofin, le Festival des divinités noires est, au-delà de son aspect de rassemblement de troupes et de couvents, "une grande scène de découvertes, de rencontres et de création". "Des retrouvailles" qui, selon lui, permettent de "prouver l’identification et la protection d’une culture en train de disparaître".

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La manifestation s’est rapidement imposée comme le rendez-vous des sociétés initiatiques d’Afrique et d’ailleurs. Via leurs descendants dans les Amériques, elle se veut aussi un hommage à celles et à ceux qui ont été soumis à l’esclavage. Viennent s’y produire, réfléchir et "communier" ensemble les Zoulous d’Afrique du Sud, les communautés noires des Antilles, des Caraïbes et des Amériques, comme par exemple le célèbre Balé Folclórico de Bahia (le plus grand ballet traditionnel du Brésil) ou l’orchestre Monbaça e Banda de Rio.

En 2012, un autre rendez-vous multiculturel annuel a été créé : le Festival d’Aného, organisé et soutenu par la Fondation Aquéréburu & Partners, fondation du cabinet de l’avocat Alexis Aquéréburu. Une manifestation qui semble avoir rapidement trouvé sa place et son public. Sa seconde édition, du 10 au 15 septembre 2013, a mobilisé 5 000 personnes chaque soir sur la grande plage d’Aného pour des concerts d’artistes togolais et ghanéens.

Outre la musique, ce qui fait l’originalité du Festival d’Aného réside dans son éclectisme en termes d’offre culturelle, sportive et sociale : groupes folkloriques, initiation au basket-ball, courses de pirogues entre pêcheurs togolais, béninois et ghanéens, jogging collectif, ateliers de création artistique, consultations gratuites en ophtalmologie (suivies, si nécessaire, d’une intervention) à l’hôpital d’Adjido, établissement à la mairie d’actes de naissance à ceux qui n’en ont jamais eu (l’an dernier, 1 000 jugements supplétifs ont été établis durant le festival)…

Et, en apothéose, pour clore l’événement le dimanche, une foire gastronomique avec dégustation de plats locaux. "C’est pour donner de la joie de vivre à la ville et faire découvrir à tous son savoir-faire culinaire, dont certains plats sont si peu connus", souligne Alexis Aquéréburu.

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