Togo : comme Nubukpo, ils ont répondu « présents, président ! »

Ces quadras issus de grandes écoles ont tous fait une belle carrière à l’étranger. Le chef de l’État les a convaincus de mettre leurs compétences au service du pays.

Kako Nubukpo, 46 ans est ministre auprès de la présidence. © Ahmed Ouoba pour J.A.

Kako Nubukpo, 46 ans est ministre auprès de la présidence. © Ahmed Ouoba pour J.A.

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Publié le 23 juillet 2014 Lecture : 3 minutes.

Togo : où va le pays ?
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Il est allé les chercher, tel un chasseur de têtes, dans les universités, les organisations internationales et les entreprises privées. À ces enseignants, experts financiers ou écrivains vivant et travaillant à l’étranger, le président togolais a fait une proposition : "Venez nous aider et mettre vos compétences au service de votre pays." Certains ont hésité, peu enclins à renoncer à une situation confortable pour plonger dans le chaudron politique togolais. Mais sachant à quel point le Togo a besoin d’idées nouvelles et de réformes profondes et claires pour se développer, ils ont finalement accepté.

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C’est le cas de Kako Nubukpo. À 46 ans, cet agrégé d’économie formé à l’université Lyon-II, en France, a quitté le Global Economic Governance Programme de l’université d’Oxford, en Grande-Bretagne, pour intégrer le gouvernement togolais à la suite du remaniement du 11 octobre 2013. Il y étrenne le tout nouveau portefeuille de ministre auprès de la présidence, chargé de la Prospective et de l’Évaluation des politiques publiques. Sa valeur ajoutée ? Une grande capacité d’analyse et le courage d’émettre des idées neuves sans arrogance ni timidité.

Son franc-parler ne lui vaut d’ailleurs pas que des amis en Conseil des ministres.

Son franc-parler ne lui vaut d’ailleurs pas que des amis en Conseil des ministres et dans les couloirs des institutions financières ouest-africaines, notamment lorsqu’il appelle à faire évoluer les accords monétaires liant les pays de la zone franc à la France.

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Ils ont répondu présents :

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"Caution intellectuelle" du régime

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Lorsqu’il a choisi de confier la primature à Arthème Ahoomey-Zunu, en juillet 2012, le chef de l’État a fait appel à Patrick Tévi-Bénissan pour lui succéder au secrétariat général de la présidence. Ce spécialiste de la finance avait été "recruté" par le président fin 2011 pour coordonner son think tank économique, le Togo Presidential Investment Advisory Council (TPIAC).

Après des études d’ingénieur à l’École des mines de Paris et un MBA à la Northwestern University (près de Chicago), Patrick Bénissan a fait carrière à la City, à Londres (Bankers Trust, Deutsche Bank, Royal Bank of Scotland), jusqu’à son retour à Lomé, en 2010.

Si leurs parcours les ont généralement préparés aux joutes intellectuelles, ces quadras supportent moins bien les attaques de la presse togolaise proche de l’opposition, souvent virulente à leur égard. Elle les qualifie de "caution intellectuelle" du régime et considère leur ralliement comme une trahison à un prétendu "camp du bien".

Gilbert Bawara, l’un des plus "anciens" représentants de cette jeune garde de Faure Gnassingbé (qui n’a lui-même que 48 ans), connaît la musique par coeur. Ce juriste formé en Suisse, qui a fait ses premières armes en politique grâce à son ami "Faure", est à la tête du stratégique ministère de l’Administration territoriale. Même lorsqu’il a quitté le gouvernement, entre 2010 et 2012, il est resté conseiller du président et a été l’un de ceux qui ont travaillé à la fondation de l’Union pour la République (Unir), le nouveau parti présidentiel, créé en avril 2012 contre la volonté des caciques de l’ancien parti unique, le Rassemblement du peuple togolais (RPT). Déjà ministre de la Coopération et du Nepad dans le gouvernement d’Edem Kodjo, le premier de la présidence Faure Gnassingbé, Bawara a oeuvré à retisser les liens avec les bailleurs de fonds et la communauté internationale, alors que le Togo sortait de plus d’une décennie d’embargo.

"Une fleur à la boutonnière"

Kangni Alem s’est lui aussi laissé séduire. Ce romancier et dramaturge de 48 ans – La gazelle s’agenouille pour pleurer (Acoria, 2001), Un rêve d’Albatros (Gallimard, 2006), Esclaves (J.C. Lattès, 2009)… – officie depuis des années en tant que conseiller spécial du chef de l’État pour la culture et la francophonie. "Une tâche difficile et ingrate, reconnaît-il. Pour ne pas être une fleur à la boutonnière, il faut pouvoir faire des propositions pertinentes, car la culture, hélas, n’est pas vraiment une priorité dans les pays africains."

À ceux qui lui reprochent son engagement, il répond que la "culture n’a rien à voir avec l’agenda politique, elle se construit petit à petit et s’inscrit dans la continuité". Un avis que partage l’universitaire et romancière Germaine Kouméalo Anaté, 46 ans, également formée à Bordeaux-III, en France. La présidente de l’Association des écrivains du Togo, qui était directrice de cabinet du ministre de l’Enseignement supérieur, a intégré le gouvernement en septembre 2013 pour prendre le portefeuille de la Communication, de la Culture, des Arts et de la Formation civique.

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