Bénin : vers une fin de la grève dans les hôpitaux

Après une grève de deux mois qui a paralysé les hôpitaux, les syndicats de la santé ont finalement trouvé un compromis avec le gouvernement. L’accord, négocié ce week-end en présence du président Patrice Talon, doit être formellement signé ce lundi dans l’après-midi.

Le président béninois Patrice Talon, lors de la rencontre avec les syndicats, le 11 novembre 2017 à la présidence. © DR : Présidence Bénin

Le président béninois Patrice Talon, lors de la rencontre avec les syndicats, le 11 novembre 2017 à la présidence. © DR : Présidence Bénin

Fiacre Vidjingninou

Publié le 13 novembre 2017 Lecture : 3 minutes.

Le président Patrice Talon a tapé du poing sur la table. Lors de la rencontre organisée avec les syndicats de la santé, samedi 11 novembre, il s’est dit agacé par le jusqu’au-boutisme des grévistes, les accusant d’avoir « laissé mourir les gens » sans respecter l’obligation d’un service minimum. Entouré de cinq de ses ministres, Patrice Talon tenait à trouver une issue favorable à cette grève qui touche les services de santé 48 heures à 72 heures par semaine depuis le 13 septembre 2017.

2,5 milliards de CFA débloqués sur les 3,7 attendus

Après trois heures de tractations, un protocole d’accord de trois pages a été conclu. Il comporte, entre autres, l’établissement d’un chronogramme en vue de débloquer près de 2,5 milliards de FCFA (soit 3,7 millions d’euros) pour le paiement des primes dues aux agents – sur un total de 3,6 milliards de francs CFA d’arriérés.

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« Le débiteur ne peut honorer ses engagements que sur la base des moyens disponibles », a lancé Patrice Talon, rappelant la « bonne foi » de son gouvernement qui, ces 18 derniers mois, a déboursé plus de 18 milliards de francs CFA pour honorer les arriérés de primes.

Aucun hôpital ne sera privatisé. Il est question d’adopter de nouveaux modes de gestion pour plus d’efficacité

Outre ces revendications financières, les syndicats revendiquaient d’être impliqués dans le processus des réformes engagées par le gouvernement dans le secteur de la santé. Des réformes qui annoncent, selon eux, des privatisations « déguisées », et donc une « menace sur les emplois ».

« Aucun hôpital ne sera privatisé. Il est question d’adopter de nouveaux modes de gestion pour plus d’efficacité, pour améliorer la qualité de l’offre de soins aux populations. La réforme n’a prévu de mettre au chômage aucun agent, qu’il soit conventionné, agent permanent ou contractuel de l’État », avait déjà tenté de rassurer le ministre de la Santé, Alassane Séïdou, le 7 novembre.

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L’annonce de la fin de la grève annoncée ce lundi

Réformer est une prérogative de l’exécutif

Des déclarations qui n’auront pas suffi  à convaincre les syndicats. Sur ce point des revendications – jugé « majeur » par Adolphe Houssou, le secrétaire général de l’intersyndicale des ressources humaines en santé -, le président de la République s’est dit « favorable aux contributions pertinentes », sans toutefois trancher véritablement.

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« Si vous estimez qu’il faut qu’on vous voie dans les commissions, on va le faire », a-t-il assuré, tout en fixant des limites : « Réformer est une prérogative de l’exécutif. »

À l’issue de cette rencontre, samedi, les syndicats n’avaient pas annoncé la fin de la grève. Ils étaient censés profiter du week-end pour rendre compte aux syndiqués, à la base, « seuls juges de la reprise du travail ».

Adolphe Houssou s’est toutefois félicité de « l’esprit d’ouverture » et du « sens de communication » du président Patrice Talon. Et bien qu’il regrette les conséquences de la grève, il a attribué la responsabilité du blocage au gouvernement, dont « le mutisme a trop duré », selon lui.

Le droit de grève des personnels de santé en débat

Ces dernières semaines, plusieurs voix se sont élevées pour fustiger l’intransigeance des grévistes. Le député Louis Vlavonou, proche de la majorité présidentielle, a notamment promis une proposition de loi destinée à priver du droit de grève les agents de la santé.

Face à ces critiques, les syndicats du secteur se sont employés à montrer que leur action prenait en compte l’aspect humanitaire : une grève, certes, mais avec service minimum consistant et un personnel présent dans la plupart des hôpitaux. Beaucoup de nouveaux patients ont cependant été refoulés vers les centres privés, où les soins sont plus onéreux.

Dans un pays qui ne compte que huit agents qualifiés pour 10 000 habitants (alors que l’OMS en recommande 25), la grève a été durement ressentie.

Il n’y a pas de chiffre officiel sur le coût humain des débrayages, mais des cas comme celui d’une mère ayant accouché à même le sol, le 18 octobre, derrière un centre de santé qui avait refusé de la recevoir, ont fortement ému le pays.

Au plus fort de la crise, le 25 octobre, le clergé béninois s’était fendu d’une déclaration condamnant les « conséquences dramatiques » de la grève pour les populations.

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