L’œil de Glez : Macron, les étudiants burkinabè et la tirade féministe
Dans les ovations multiples qui parsemaient le discours du président Macron, à l’amphithéâtre ouagalais de l’Université Joseph Ki-Zerbo, combien de mains féminines applaudissaient-elles ? Beaucoup, assurément…
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 28 novembre 2017 Lecture : 2 minutes.
Université de Ouagadougou, 28 novembre. Rencontre entre le président français et des étudiants du Burkina Faso. Grâce à un savant calibrage de la première séquence et un filtre subtil de l’auditoire, le funambule élyséen a cheminé le fil qui vibrait, depuis quelques jours, sous le souffle de la grogne. Dans une deuxième partie interactive moins encadrée, Emmanuel Macron n’a pas échappé à des accusations de « peur » – sur le franc CFA – ou de « jalousie » envers Mouammar Kadhafi. Dédouanée l’implication de la France dans la politique burkinabè – par un hommage immédiat à Thomas Sankara –, déminées les rancœurs postcoloniales – par une anaphore sur la génération du président français -, balayé le spectre de la Françafrique – par la nécrologie de la « politique africaine de la France ». La question suscitant le plus d’agitation aura été, sans surprise, celle de la démographie.
Il y a quelques mois, Emmanuel Macron décochait une analyse lapidaire de la natalité africaine. La stigmatisation d’un taux de fécondité « à la nigérienne » resta en travers de la gorge de nombreux Africains. Comme la politique est aussi une affaire de trompe-l’œil et comme le ton qu’on emploie est aussi une affaire de lieu, le président français a évoqué la liberté de la jeune mère africaine, voire de la très jeune mariée. Il a ainsi tenté de retourner, comme une crêpe, la problématique de la natalité. Un couple qui engendre 8 ou 9 enfants, c’est 8 ou 9 sources potentielles de revenu, mais c’est aussi une femme qui accouche 8 ou 9 fois. Cette prouesse n’est pas condamnable en soit, si l’on en croit un Emmanuel Macron invoquant des familles françaises dont le nombre d’enfants frise également la dizaine. Balayant d’un revers de la phrase l’idée d’un chef gaulois donneur de leçon, le président français a tenté de déplacer, sous l’éclairage du choix, la question des multiples enfantements et de la précocité du mariage. Et de glisser, dans ce débat sur l’intimité familiale, la question des parcours professionnels de la femme ; donc de l’accès à des visas français « prioritaires » pour les jeunes étudiantes venues d’Afrique.
Le président Kaboré sorti, peut-être, pour « réparer la climatisation »
Sur ce point, digne d’un artiste de stand-up, Emmanuel Macron – plaisantant sur le président Kaboré sorti, peut-être, pour « réparer la climatisation » ou « clashant » un étudiant approximatif sur la politique nataliste de la Chine – a su surfer sur la « mâle réaction » qu’il avait certainement anticipée. Et voilà l’invité du jour, sourire en coin, précisant qu’il n’y aurait pas de visa « que » pour les filles.
Comme celui de Nicolas Sarkozy à Dakar, le contenu politique du discours ouagalais d’Emmanuel Macron sera jugé avec le recul. Mais le one-man-show d’un président galvanisé par un auditoire électrisé a connu, lui, son petit succès d’audience, agrémenté qu’il était de petites « burkinabitées » verbales comme « mouta-mouta » (magouilleur) ou « demander la route ». Même cabotin, le spectacle politique fut notamment remarqué dans la phase inédite des questions-réponses. Une séquence foutraque au calibrage joyeusement explosé et débutée, d’ailleurs, par l’interrogation d’une… jeune fille. « C’est tout pour lui »…
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