Maroc : cinq ans de prison pour un activiste du Hirak
El Mortada Iamrachen a été condamné jeudi pour apologie du terrorisme au moment où des ONG appellent à la libération des détenus pour apaiser les tensions.
Nouvelle lourde condamnation dans les procès des détenus du Rif. Jeudi 30 novembre, un jeune activiste du mouvement du Hirak a écopé de cinq ans de prison ferme pour « apologie du terrorisme » et « incitation au terrorisme », selon l’agence officielle MAP.
Il s’agit de El Mortada Iamrachen, un salafiste repenti qui est présenté comme un des leaders du mouvement rifain né après le décès tragique d’un poissonnier en octobre 2016 dans la ville d’El Hoceima. Il a été arrêté le 10 juin devant son domicile. Les autorités marocaines lui reprochent des posts sur Facebook faisant l’apologie du terrorisme. Entre autres, il aurait déclaré connaître l’Égyptien Ayman al-Zawahiri, chef de l’organisation Al-Qaïda, et même de l’avoir rencontré à Tora Bora, les célèbres grottes afghanes où se cachaient Ben Laden et ses affidés à une époque.
Un post « parodique » ?
Lors de son arrestation, son avocat, Traik Sbai, avait expliqué à Jeune Afrique qu’il s’agissait d’un post « parodique » en réponse à un journaliste qui avait accusé son client de terrorisme. Une explication qui n’avait pas convaincu la justice. Détenu dans la prison de Salé puis libéré pour raison familiale – son père venait de décéder et sa femme allait accoucher -, El Mortada Iamrachen comparaissait devant la Chambre criminelle chargée des affaires de terrorisme auprès de la Cour d’appel de la même ville. Jeudi, cette dernière a donc conclu à la gravité des faits qu’elle lui reprochait et l’a condamné à cinq ans de prison ferme.
Avant la prononciation de son verdict, le jeune rifain avait publié un post Facebook indiquant sa présence devant la Cour d’appel de Salé. « J’ai vu pire. Tout est question de résistance ! « , a-t-il écrit.
Depuis l’éclatement de la contestation dans la province d’El Hoceima, plusieurs centaines de rifains ont été arrêtés par les autorités marocaines. Les têtes dures du mouvement, dont Nasser Zefzafi, ont été transférées à Casablanca et poursuivies pour des chefs d’accusations assez lourds dont « l’atteinte à la sécurité intérieure de l’État ».
Au moins 410 personnes sont actuellement en détention, dont certains ont été arrêtés devant leur domicile
El Mortada Iamrachen était le seul leader de ce mouvement à être poursuivi pour « apologie du terrorisme ». Actif aussi bien sur Facebook que sur Twitter, il avait pourtant toujours appelé à des actions de protestation pacifiques pour faire aboutir les revendications du Hirak.
Appel à la libération des détenus
Face aux lourdes condamnations essuyées par les activistes de ce mouvement, plusieurs ONG et acteurs politiques marocains, dont le Parti authenticité et modernité (PAM, opposition), ont appelé à leur libération. Le roi du Maroc avait gracié une quarantaine d’entre eux en juillet, à l’occasion de la fête du Trône, mais les militants associatifs continuent de demander la libération des autres.
Le 28 novembre, Amnesty International a également exhorté les autorités marocaines à libérer ceux qui ont pris part à la contestation, dont Nasser Zefzafi, les qualifiant de « prisonniers de conscience ». « Depuis mai, les forces de sécurité ont arrêté des centaines de manifestants, dont des mineurs, ainsi que des journalistes lors de marches largement pacifiques. Au moins 410 personnes sont actuellement en détention, dont certains ont été arrêtés devant leur domicile », souligne l’ONG. Plusieurs militants ont été jugés à des peines lourdes dont deux de 20 ans de prison pour avoir incendié un bâtiment de police.
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