Sénégal : Macky et le syndrome Hollande

Publié le 9 juillet 2014 Lecture : 2 minutes.

Le président sénégalais vient de subir son premier revers politique. Ce ne sont que des élections locales, certes, et la défaite est surtout symbolique, mais c’est un avertissement adressé par ses concitoyens, y compris ses plus fervents supporters de 2012. Pour nombre de ces derniers, les mantras de l’époque, "changement" et "rupture", sont en effet restés à l’état de voeu pieux. L’exercice du vote en période de défiance s’accommodant rarement du sens de la nuance, ils ont estimé que les fruits n’avaient guère passé la promesse des fleurs. Les Sénégalais n’acceptent plus d’être trompés et le wax waxeet ("dire et se dédire", en wolof) leur est devenu insupportable. Il suffit de se souvenir de l’engouement né de sa campagne de 2012 et de la ferveur populaire au lendemain de sa victoire sur Abdoulaye Wade pour mesurer les attentes inouïes de ses compatriotes. C’était déjà le cas après l’accession au pouvoir, en 2000, du pape du sopi ("changement") : c’est dire combien les habitants de la Teranga sont à bout de patience.

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Sans doute la personnalité de Macky Sall, sinon l’image qu’il renvoie, est-elle pour quelque chose dans ce désenchantement : sobre, calme, constant et réservé, il peut donner l’impression de ne guère savoir où il va.Pour ceux qui le connaissent, dont je fais partie, rien n’est plus faux. Mais il souffre du "syndrome Hollande" : choisis dans les urnes parce qu’ils représentaient l’antithèse rassurante des Zébulons arrogants (Sarkozy et Wade) dont la majorité des électeurs voulaient à tout prix se débarrasser, Macky comme Hollande savaient qu’ils ne pourraient se contenter d’incarner les négatifs de leurs prédécesseurs, par ailleurs aujourd’hui éloignés de l’arène politique. Sarkozy fréquente plus souvent les juges et les avocats que les militants de l’UMP, Wade sucre les fraises et convoque plus que de raison les souvenirs de son glorieux passé pour s’imaginer encore un avenir. Comme pour Hollande, en France, les qualités d’hier pourraient, aux yeux d’une opinion excédée, devenir les faiblesses du moment.

Il faut donc faire sa mue, exister par soi-même, reconstruire un État et un pays, résoudre la myriade de problèmes qui se sont accumulés des décennies durant parce que ceux qui les ont précédés ont préféré les cacher sous le tapis. Le tout en temps de crise économique, donc sans véritables moyens. Mission quasi impossible en si peu de temps, à moins de s’appeler Hercule.

Là s’arrête cependant la comparaison. Si les carottes sont cuites pour Hollande – on voit mal comment il pourrait s’extirper des abysses qu’il fréquente depuis plusieurs mois -, Macky n’en est pas du tout, loin s’en faut, au même stade d’impopularité. Ses choix économiques n’ont rien d’aberrant et il ne passe pas le plus clair de son temps à multiplier les erreurs stratégiques. Last but not least, le cap qu’il a fixé est clair et correspond aux attentes des Sénégalais. Reste le plus difficile : obtenir des résultats tangibles. Pour cela, il faudra, entre autres, clore ce mauvais feuilleton qu’est la politique politicienne sénégalaise, sorte de Dallas sauce arachide horripilant et chronophage, pour consacrer ses forces à l’essentiel. Et s’entourer des meilleurs. Objectif : Macky II ? Pour lui, il est encore temps.

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