Sénégal : Khalifa Sall a déposé une demande de libération sous caution

Les avocats de Khalifa Sall ont déposé une offre de cautionnement afin de permettre au député et maire de Dakar de recouvrer la liberté jusqu’à un éventuel procès. Toutes leurs demandes de remise en liberté ont jusque-là été écartées par la justice sénégalaise.

Khalifa Sall se rendant à la convocation du doyen des juges d’instruction au palais de justice de Dakar, le 7 mars 2017. © Youri Lenquette/JA

Khalifa Sall se rendant à la convocation du doyen des juges d’instruction au palais de justice de Dakar, le 7 mars 2017. © Youri Lenquette/JA

MEHDI-BA_2024

Publié le 5 décembre 2017 Lecture : 4 minutes.

Neuf mois presque jour pour jour après son placement sous mandat de dépôt, Khalifa Ababacar Sall, maire de Dakar et député, a changé d’optique. Ce mardi 5 décembre, ses avocats ont déposé devant le doyen des juges d’instruction du tribunal de Dakar une demande de liberté provisoire contre cautionnement. Un démarche qui fait suite à de précédentes requêtes restées lettre morte. Depuis mars, en effet, ses avocats ont successivement invoqué des « contestations sérieuses » contre les poursuites menées à son encontre, avant de faire valoir l’immunité parlementaire dont il est censé bénéficier depuis son élection à l’Assemblée nationale, le 30 juillet. En vain.

>>> A LIRE – Sénégal :  retour sur la nuit où Khalifa Sall a perdu son immunité parlementaire

la suite après cette publicité

« Nous étions engagés dans une sorte de course contre la montre, car la justice voulait clôturer l’instruction au plus vite, assure une source proche du maire de Dakar. Mais on a dû au préalable convaincre Khalifa Sall de l’importance d’une libération provisoire sous caution, afin de comparaître libre à son procès. » Jusque-là, l’édile s’était montré rétif à cette perspective, synonyme à ses yeux de reconnaissance de culpabilité.

Mis en cause dans l’utilisation sans justificatifs de la régie d’avance de la mairie, une « caisse noire » d’existence ancienne notamment destinée à des dépenses urgentes au profit des populations dakaroises, Khalifa Sall a toujours prétexté qu’il n’avait fait que gérer, comme ses prédécesseurs, des « fonds politique ». Épinglé par l’Inspection générale d’État (IGE), qui a rendu son rapport en décembre 2016, Khalifa Sall doit rendre compte à propos de l’utilisation, sur la période 2011-2015, d’une somme totale de 1,8 milliard de francs CFA (2,7 millions d’euros).

Biens immobiliers hypothéqués

Inculpé  d’« association de malfaiteurs », « complicité de faux et usage de faux en écritures privées de commerce », « faux et usage de faux dans des documents administratifs », « détournement », « escroquerie aux deniers publics et blanchiment de capitaux », Khalifa Sall ne peut théoriquement solliciter une liberté provisoire que s’il rembourse ou dépose en caution le montant des sommes qu’il est soupçonné d’avoir détournées.

Il s’agit d’une offre de cautionnement et non d’une offre de remboursement

« Les biens offerts en cautionnement [par le maire] sont constitués d’une part par quatre biens immobiliers qui figuraient dans sa déclaration de patrimoine, et d’autre part, et en majeure partie, par des biens immobiliers que des proches et personnes de bonne volonté ont accepté d’engager pour permettre de réunir la valeur suffisante pour la recevabilité de la demande de cautionnement », peut-on lire dans un communiqué rédigé par ses avocats.

la suite après cette publicité

Un cautionnement qui atteint la valeur de 1,8 milliard de francs CFA (2,7 millions d’euros), équivalent aux sommes visées par la procédure en cours. « Ces biens, dont la valeur a été expertisée, ont été hypothéqués au bénéfice de l’État afin de servir de cautionnement », explique l’un des défenseurs du maire de Dakar.

Mais dans leur communiqué, lui-même et ses confrères précisent explicitement qu’« il s’agit d’une offre de cautionnement et non d’une offre de remboursement. Cela signifie que Monsieur Khalifa Ababacar Sall continue de contester le bien fondé des poursuites ».

la suite après cette publicité

Le juge doit statuer

Avocat de l’État sénégalais, partie civile à la procédure, Me Baboucar Cissé refuse, pour l’heure, de se prononcer sur cette demande de libération sous caution. « Elle a été annoncée ce matin par voie de presse mais nous n’avons encore rien reçu, explique-t-il à JA. Si cette demande était avérée, il me faudrait d’abord me concerter avec l’agent judiciaire de l’État, Antoine Félix Diome, afin de décider de la marche à suivre. »

Il n’y a aucun acharnement contre Khalifa Sall

Même son de cloche du côté du nouveau ministre de la Justice, Ismaïla Madior Fall, qui aurait appris la nouvelle ce matin par la presse. « On communiquera probablement après la fin de la déclaration de politique générale du Premier ministre à l’Assemblée », indique-t-on dans l’entourage du ministre.

Le juge d’instruction en charge du dossier doit désormais décider si cette offre de cautionnement sous forme d’hypothèques est recevable et s’il décide d’y faire droit. « On espère bien sûr, mais on ne se fait pas trop d’illusions », admet un proche du maire. « L’évolution de la procédure a fini par édifier définitivement tous les Sénégalais et tous les observateurs de bonne foi que les poursuites menées à son encontre résultent d’une instrumentalisation de la Justice à des fins strictement politiques, consistant à l’écarter de l’élection présidentielle de mars 2019 », dénoncent ses avocats dans leur communiqué.

Une version contestée par l’avocat de l’État, selon qui « il n’y a aucun acharnement contre Khalifa Sall, car le maire de Dakar ne représente rien au Sénégal ».

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires