Booba l’Africain ?

Avec son nouvel album, « Trône », le Duc de Miami règne sur les charts. Le rappeur d’origine sénégalaise y poursuit son retour aux racines et ses collaborations avec des artistes afros. Mais dans le département d’origine de son père, Bakel, on peine à le voir comme un enfant du pays.

Booba, dans le clip de « DKR ». © Capture d’écran YouTube

Booba, dans le clip de « DKR ». © Capture d’écran YouTube

leo_pajon

Publié le 8 décembre 2017 Lecture : 3 minutes.

Il n’y a donc toujours personne pour détrôner le Duc. Avec son neuvième disque solo, le roi du rap francophone va pouvoir s’offrir une nouvelle couronne de platine, lui qui accumule déjà les records de vente. Numéro un au top album iTunes, Booba s’offre dans la foulée le luxe d’un concert au U Arena, plus grande salle de France, le 13 octobre 2018. 13 000 tickets auraient été vendus le jour de l’annonce.

Son album, Trône, ne surprendra pas énormément les fans de Sa Majesté. Ego trip à gogo, punchlines sous stéroïdes, misogynie tranquille, excès de vocodeur… Il faut attendre Petite fille pour découvrir le côté soft du MC gratounette (« L.U.N.A, ma petite fille (…) ton rire ouvre la mer en deux / repeint le quartier d’un Blood en bleu, tu es ma lune »).

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Virage afro

Mais la nouveauté c’est surtout un virage afro-pop plus assumé avec une petite poignée de titres : Ça va aller (en featuring avec Niska et le petit prince malien de la kora Sidiki Diabaté), À la folie

Et évidemment DKR, single sorti l’année dernière, dans lequel il fait des clins d’œil aux Lions de la Teranga, au mouvement Boul Fallé, à Gris Bordeaux ou Bombardier (l’équipe nationale de foot, un mouvement de contestation, les lutteurs stars du Sénégal) prouvant qu’il maîtrise les codes du pays de son père. Comme il l’avait d’ailleurs fait précédemment dans d’autres titres (Ma Couleur, Mon pays, Comme une étoile…)

Dans son tout dernier clip, pour Friday, le MC apparaît dans un désert qu’on imagine sénégalais, habillé en touareg et armé d’un Ak 47.

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Booba (pseudonyme pris en hommage à un de ses cousins sénégalais prénommé Boubacar) entretient avec le continent des relations passionnelles. En concert à Dakar le 22 octobre 2016, le rappeur avait un peu bousculé un fan monté sur scène pour une accolade. Il s’était aussi fâché avec la scène hip-hop locale en estimant dans un entretien que le rap sénégalais était aussi peu connu que le rap polonais…

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Mais l’Afrique reste un marché important pour le businessman qui y enchaîne les concerts (notamment pour la cérémonie d’ouverture de la CAN) et les featurings (Sidiki Diabaté donc, mais aussi Fally Ipupa).

Cinq lettres, B.A.K.E.L

Mais au fait, comment le Sénégalais autoproclamé est-il considéré dans son deuxième pays, lui qui y fait si souvent référence ? Et d’abord d’où viennent précisément ses racines ?

« Le père de Booba vient de la ville de Yaféra qui fait partie du département de Bakel, explique Boubacar Gassama, responsable du site d’information local Bakelinfo. Par habitude, la plupart des gens se disent de Bakel, parce que Bakel ville est le chef-lieu du département. » De là, le titre Bakel city gang, sorti en 2011 sur l’album Autopsie volume 4, et qui a donné lieu à l’un des plus violents clips du rap français.

La ville n’est pourtant pas particulièrement connue pour son climat de guerre des gangs…

Booba parle donc de Bakel, mais Bakel parle peu de Booba, même si l’on y connaît sa musique. « Il est venu une fois vers 2005, confie Goundiam hamidou, directeur d’une station locale, Radio Jiida. Peu de personnes l’ont vu, il n’est resté que quelques jours dans la ville de son père. Depuis il vient souvent au Sénégal mais seulement à Dakar. »

Dommage. Dans la cité du Sénégal oriental, « B2O » a ses fans, et on a même des projets pour lui. Un jeune Bakelois, Djef Soumaré, estime ainsi que « Booba devrait venir rencontrer les artiste de Bakel et organiser quelque chose de concret dans le département, un concert par exemple ».

A l’inverse d’un MHD, qui passe beaucoup de temps dans le village de ses parents, Dabankou, dans la préfecture de Boké en Guinée, Booba n’est pas vu ici comme l’enfant du pays.

« Allez les Bleus, allez les Lions, moi je suis un peu des deux », lâche le rappeur dans son titre Friday. C’est surtout à Miami que la star multinationale est aujourd’hui domiciliée. Mais il est vrai qu’on n’y trouve pas de grande équipe de foot.

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