RDC : Olenghankoy refuse l’élection de Tshibala à la tête des frondeurs de l’UDPS
Le Premier ministre congolais Bruno Tshibala a été plébiscité dimanche président de l’aile de l’UDPS qui s’est rapprochée du pouvoir de Joseph Kabila. Une désignation que ne cautionne pas Joseph Olenghankoy, président du Conseil national de suivi de l’accord de la Saint-Sylvestre.
« C’est un dédoublement [de l’UDPS] ! » Joint au téléphone par Jeune Afrique, Joseph Olenghankoy, président du Conseil national de suivi de l’accord (CNSA), refuse de considérer Bruno Tshibala comme le nouveau chef de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS) dont le « Líder Máximo » est décédé en février à Bruxelles. Dimanche 10 décembre, pourtant, à l’issue du congrès organisé par les frondeurs de ce principal parti de l’opposition congolaise, l’actuel Premier ministre a été « élu par acclamation » président de la formation politique. Lui qui est considéré comme « auto-exclu » du parti pour s’être opposé début mars au tandem Félix Tshisekedi – Pierre Numbi porté à la tête du Rassemblement de l’opposition congolaise.
On ne se déclare pas leader d’un parti par des cris, il faut un acte juridique
« Il faudrait normalement qu’un congrès rassemblant l’UDPS dans son ensemble soit organisé pour que la mémoire de ce grand homme que fut Étienne Tshisekedi ne soit pas offensée », préconise Joseph Olenghankoy qui – en « [sa] qualité de président du CNSA » s’empresse-t-il de souligner -, ne reconnaît aujourd’hui « pas d’autre chef à la tête de l’UDPS qu’Étienne Tshisekedi ».
« Sur le plan administratif, on ne se déclare pas leader d’un parti par des cris, il faut un acte juridique. Tant que je n’ai pas vu de document dans ce sens sur mon bureau, je ne peux pas considérer M. Tshibala comme le nouveau président de l’UDPS », explique-t-il.
Qui soutient Bruno Tshibala ?
Une prise de position qui confirme les rapports désormais tendus entre les deux alliés d’hier. Au mois de mars, Bruno Tshibala et Joseph Olenghankoy avaient en effet mené ensemble la fronde contre la restructuration du Rassemblement après la mort d’Étienne Tshisekedi.
Le premier a été fait chef du gouvernement le mois suivant et le second est devenu président du CNSA. Des nominations considérées par les évêques catholiques, médiateurs des pourparlers, comme une « entorse » au compromis politique conclu fin décembre 2016 entre le régime de Joseph Kabila et l’opposition.
Bruno Tshibala bénéficie également du soutien des organes de l’UDPS
Malgré les réserves de Joseph Olenghankoy, le camp de Bruno Tshibala ne compte pas faire machine arrière. « Le congrès que nous avons organisé était une assise de refondation du parti », argumente Patrick Mutombo, fils et conseiller politique du Premier ministre qui dénonce par ailleurs la politique consistant à « mettre de côté » certains cadres de l’UDPS déclarés « auto-exclus » de la formation politique.
À en croire celui qui est également conseiller technique spécial chargé de mission à la primature, « la plupart de représentants de l’UDPS à l’extérieur du pays » mais aussi « 95 % des fédéraux venus de l’intérieur de la RDC » ont participé au congrès pour marquer leur adhésion à la démarche.
« Bruno Tshibala bénéficie également du soutien des organes de l’UDPS, comité de discipline, les exécutifs compris, et a été désigné président parce qu’il a rempli les critères définis par les congressistes : avoir au moins 15 ans d’ancienneté au parti, détenir au minimum un diplôme de graduat (bac + 3), avoir une moralité irréprochable, être fédérateur », poursuit Patrick Mutombo.
Et d’ajouter : « Il [Bruno Tshibala] s’est dit prêt, à l’instar de Nelson Mandela, de marcher à pied ou à vélo pour aller à la rencontre de tous les enfants de l’UDPS. »
Non à l’explosion de l’UDPS
Dans les conditions actuelles, la tâche de Tshibala s’annonce difficile. D’autant que le statut du nouveau leader du parti qu’il s’est octroyé hérisse même certains de ses potentiels alliés.
« Nous le soutenons comme Premier ministre, mais nous ne le suivons pas dans une dynamique de l’explosion du parti », fait savoir à Jeune Afrique Corneille Mulumba, porte-parole des Pionniers de l’UDPS, structure qui rassemble « les personnes qui ont milité au sein de l’UDPS avant sa reconnaissance officielle en avril 1990 ».
Nommé début octobre conseiller technique en charge des stratégies politiques et prospectives à la primature, Corneille Mulumba qui dit n’avoir « toujours pas de bureau », plaide en faveur de la « constitution d’un grand ensemble politique ».
L’idée serait de considérer l’UDPS-aile Tshibala comme un courant politique au même titre que les autres groupes au sein de l’UDPS dans la perspective de mettre en place un regroupement politique en vue des élections à venir.
Bruno Tshibala a entamé une spirale qui ressemble à la diagonale du fou
« Bruno Tshibala a choisi Joseph Kabila comme son nouveau patron. Il doit s’assumer », tranche Augustin Kabuya, porte-parole de l’UDPS. « Il ne peut pas remercier Étienne Tshisekedi de cette manière, ce n’est pas correct », renchérit-il.
« Bruno Tshibala a entamé une spirale qui ressemble à la diagonale du fou [sur un échiquier] », complète Raph Kabengele. Depuis Londres où il séjourne, ce conseiller politique et diplomatique de Félix Tshisekedi estime que « Bruno Tshibala s’accroche à l’étiquette UDPS pour justifier sa présence au gouvernement », l’accord de la Saint-Sylvestre ayant attribué le poste de Premier ministre au Rassemblement de l’opposition. « Mais ce phénomène Tshibala va se dégonfler de lui-même », promet-il.
En attendant, l’UDPS annonce la tenue de son congrès au mois de janvier 2018. Un comité préparatoire a été mis en place et présenté le jeudi 7 décembre à Limete, fief du parti.
Prochaine étape : désignation de Tshisekedi fils comme le chef de la formation politique ? « Pour l’instant, Félix n’est candidat à rien », répond Raph Kabengele. Même si l’éventualité de la succession du père par le fils parait aujourd’hui comme la plus plausible.
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