États-Unis : doctrine Trump, le grand flou
À la veille du premier anniversaire de l’arrivée du président Trump à la Maison-Blanche, la stratégie africaine de son administration reste toujours aussi illisible.
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Brahima Coulibaly
Directeur de l’Initiative pour la croissance africaine, The Brookings Institution, Etats-Unis
Publié le 21 décembre 2017 Lecture : 3 minutes.
Washington semble essentiellement voir le continent au travers du prisme sécuritaire. Le thème a été au cœur des premières discussions entre le chef de l’État, Donald Trump, et ses homologues nigérian, kényan et sud-africain. Par la suite, l’administration a déployé des troupes en Afrique de l’Est pour lutter contre les Shebab et a vendu pour 593 millions de dollars (504 millions d’euros) de matériel militaire au Nigeria.
Le président Trump, son vice-président, Mike Pence, et son secrétaire d’État, Rex Tillerson, ont multiplié les déplacements autour du globe, mais seul le chef du Pentagone, Jim Mattis, s’est rendu sur le continent, pour visiter la base américaine de Djibouti. Il aura fallu attendre septembre 2017 pour que le président Trump donne son premier discours sur l’Afrique. Devant les Nations unies, il a souligné le potentiel du continent à devenir un « partenaire économique viable » pour les États-Unis.
Une déclaration qui contrastait avec les signaux décourageants envoyés en juillet, lors du sommet du G20 sur l’Afrique. Si la stratégie américaine reste des plus floues, c’est parce que pour l’instant il n’y en a pas. Que souhaite faire Trump des initiatives de ses prédécesseurs ? Quel agenda veut-il proposer à l’Afrique ?
Budget américain
Le programme le plus significatif lancé par les États-Unis est l’African Growth and Opportunity Act (Agoa), signé en 2000 par Bill Clinton. Cette loi reste la tentative la plus avancée de sortir de la relation classique donneurs-récipiendaires, pour l’orienter vers un vrai partenariat économique. George W. Bush a lui poussé pour davantage d’assistance humanitaire, à travers son Plan d’aide d’urgence à la lutte contre le sida (Pepfar), quand Obama a lancé l’Initiative pour les jeunes leaders africains (Yali) et le programme d’électrification Power Africa.
Les programmes destinés à l’Afrique devraient diminuer de 13 %
Le budget proposé par Trump au Congrès donne une idée de la stratégie que compte suivre son administration en matière de politique étrangère. Il préconise une réduction de 28 % des montants accordés au département d’État et à l’Agence américaine pour le développement international (Usaid), ainsi que la disparition des fonds alloués pour l’assistance d’urgence aux réfugiés et aux migrants. Le Pepfar poursuit son action, avec un budget en baisse de 17 %.
Les programmes destinés à l’Afrique devraient diminuer de 13 %. Dans le même temps, le budget américain accordé à la défense va augmenter de 10 %. Des propositions qui reflètent les priorités de Trump, qui préfère la force à la diplomatie, les relations bilatérales et « transactionnelles » au multilatéralisme.
Idée claire
L’administration ne devrait pas minimiser l’importance de son partenariat avec l’Afrique. À l’échelle mondiale, la moitié des économies aux taux de croissance les plus soutenus se trouvent sur le continent. La classe moyenne y est en expansion rapide, et les dépenses des ménages et des milieux d’affaires devraient augmenter de 4 % chaque année d’ici à 2025.
De plus, le manque actuel d’infrastructures est une opportunité à saisir pour les entreprises américaines. Il ne faudrait pas que notre incapacité à reconnaître ces atouts et ce dynamisme ne fasse perdre aux États-Unis davantage de terrain en Afrique, face à l’Europe ou à la Chine.
L’Afrique en arrière-plan
Ce n’est pas la première fois qu’un président arrive au pouvoir sans idée claire sur l’Afrique. Néanmoins, ses prédécesseurs ont laissé un héritage sur lequel Donald Trump peut construire. Il a encore le temps de bâtir son propre legs. La réunion, à la mi-novembre 2017, entre les ministres des Affaires étrangères africains et le département d’État à Washington, pour discuter gouvernance, sécurité et échanges commerciaux, est un bon premier pas.
Mais les problèmes de politique intérieure de cette administration et l’établissement laborieux des relations avec ses principaux partenaires internationaux font craindre que l’Afrique ne soit condamnée à rester à l’arrière-plan des préoccupations américaines.
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