Le massacre des mineurs de Marikana : l’épine dans le pied de Cyril Ramaphosa

« Je n’ai jamais voulu tuer ces mineurs », déclarait en mai dernier Cyril Ramaphosa à des étudiants. Depuis son retour en politique il y a cinq ans, le nouveau président du Congrès national africain (ANC) traîne comme un boulet le souvenir du massacre de 34 mineurs en grève, le 16 août 2012 à Marikana. Mais que lui reproche-t-on exactement ?

Des policiers sud-africains se tiennent près des corps de mineurs tombés à Marikana, le 16 août 2012. © AP/SIPA

Des policiers sud-africains se tiennent près des corps de mineurs tombés à Marikana, le 16 août 2012. © AP/SIPA

Publié le 19 décembre 2017 Lecture : 2 minutes.

Alignés à la manière d’un peloton d’exécution, les policiers font feu sur les travailleurs en grève d’une mine de platine dans la région de Marikana. Les rafales de fusils-mitrailleur soulèvent des volutes de sable, qui dissimulent à peine les corps fauchés par les balles. En quelques instants, 34 personnes sont abattues et 78 autres blessées dans la journée du jeudi 16 août 2012.

En rappelant les pires heures du régime de l’apartheid, les images insoutenables du massacre de Marikana ont provoqué un immense émoi dans l’opinion publique sud-africaine, et au-delà. Les explications du chef de la police, qui avait mis en avant la légitime défense « contre le groupe qui les chargeait », peinent à convaincre. Pourquoi avoir tiré à balles réelles et sans sommation sur des grévistes ?

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>> Attention, la vidéo ci-dessous contient des images choquantes

https://youtu.be/YbenAJv2xco

>>> A LIRE – Ce jour-là : le 16 août 2012, 34 mineurs grévistes de Marikana tombent sous les balles de la police

Une enquête gouvernementale de 600 pages

Une enquête gouvernementale est ouverte dès le 17 août pour faire la lumière sur les événements. Il faudra attendre trois ans pour que les conclusions du rapport soient rendues publiques. Dans une somme de 600 pages, les auteurs pointent l’écrasante responsabilité de la police sud-africaine et de la société Lonmin, propriétaire de la mine. Parmi les personnalités de cette société figure un certain Cyril Ramaphosa, actionnaire et membre du conseil d’administration de Lonmin depuis juillet 2010.

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D’après le rapport, Cyril Ramaphosa est prévenu quelques jours avant le massacre de la détérioration de la situation dans la mine de Marikana, avec le meurtre de deux agents de sécurité.

Dans la foulée, il use de son influence auprès du ministre de l’Intérieur, Emmanuel Nkosinathi Mthetwa, pour faire intervenir la police. Il prend également langue avec la ministre des Mines, Susan Shabangu, en lui déclarant que « son silence et son inaction à propos de ce qui se passe à Lonmin sont mauvais pour elle et le gouvernement ».

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« Le fait d’odieux criminels »

Autre détail troublant : dans un mail rédigé le 15 août à l’intention du responsable commercial de la mine, il écrit que « les terribles événements, qui se sont produits, ne peuvent être assimilés à un conflit social ». « Ils sont clairement le fait d’odieux criminels et doivent être considérés comme tel, poursuit-il. Vous avez absolument raison en insistant sur le fait que le ministre et, en effet, tous les officiels du gouvernement doivent comprendre que nous faisons face à un acte criminel. »

Cyril Ramaphosa, l’ancien leader syndicaliste en lutte contre l’apartheid, aurait-il tenté de convaincre les plus hautes autorités d’intervenir en force pour briser une grève de mineurs ?

Malgré cette apparente connivence entre la société Lonmin et l’État sud-africain, le rapport de la commission d’enquête exonère de toute responsabilité Cyril Ramaphosa, en considérant « qu’il est impossible de dire qu’il est la “cause du massacre” ». Ce qui n’avait pas empêché Julius Malema, leader des Combattants pour la liberté économique, de le traiter en 2015 de « meurtrier » et de l’attaquer en justice. Une opinion partagée par de nombreux survivants du massacre du 16 août 2012.

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