Grève des magistrats au Gabon : un compromis pour assurer un « service minimum »
Accusé de corruption par le ministre de la Justice, les magistrats gabonais ont lancé jeudi 14 décembre une grève illimitée. Si un accord a été trouvé jeudi pour assurer les services basiques dans les tribunaux, les magistrats ont également réaffirmé leur volonté de poursuivre leur mouvement.
Une semaine après le début de la grève illimitée des magistrats qui réclament le départ de Francis Nkéa Ndizigue, le ministre de la Justice accusé par le syndicat des magistrats du Gabon (Synamag) d’immixtions dans les affaires du pouvoir judiciaire, un compromis a été trouvé au sein du syndicat pour mettre en place un « service minimum » dans les tribunaux du pays.
Il sera assuré tous les mercredis, comme le précise une note adressée par le syndicat aux présidents des tribunaux de première instance. Aucune juridiction ne tiendra d’audience publique, souligne le document.
Le but de ce service minimum sera notamment de gérer les dossiers urgents de prolongation de détentions préventives et les demandes de mise en liberté. Les services administratifs ne géreront que la réception des dossiers.
« Les geôles commencent à s’engorger »
« Ce mouvement de grève a jusqu’à présent été largement suivi à Libreville et dans les tribunaux des autres provinces où nous avons des observateurs qui nous informent de la mobilisation. Mais nous avons aussi une responsabilité en tant que magistrats. Nous avons été contacté par le procureur pour trouver un compromis et ne pas paralyser le travail notamment des forces de l’ordre qui gèrent des gardes à vue », explique Germain Nguema Ella, président du Synamag qui a néanmoins réaffirmé l’intention du syndicat de prolonger le mouvement de grève illimité.
Nous campons sur nos positions, nous ne souhaitons plus travailler avec le ministre de la Justice
« Les geôles commencent à s’engorger, il était important que nous arrivions à un compromis pour gérer les dossiers les plus urgents », confirme une source judiciaire à Libreville.
« Nous campons sur nos positions, nous ne souhaitons plus travailler avec le ministre de la Justice. Lorsqu’un ministre se permet de critiquer la justice du pays c’est une image extrêmement qui est renvoyée à nos concitoyens. Nous nous battons simplement pour notre indépendance », ajoute le président du syndicat.
La note adressée par le Synamag aux présidents des tribunaux précise qu’« un piquet de grève sera observé tous les jours devant le Palais de Justice pendant la période d’arrêt de travail ».
Lettre du syndicat national des magistrats du Gabon (20/12/2017) by underline" title="View jeuneafrique's profile on Scribd" href="https://www.scribd.com/user/233606109/jeuneafrique#from_embed">jeuneafrique on Scribd
Accusations de corruption
Pour rappel, le 7 décembre dernier, en réaction à la convocation par le ministre d’un juge d’instruction qui venait de décider de la remise en liberté provisoire d’un inculpé dans une affaire sous sa responsabilité, le Syndicat national des magistrats du Gabon (Synamag) avait fustigé « les immixtions intempestives du pouvoir exécutif dans le pouvoir judiciaire ».
En réponse à ces accusations le ministre de la Justice Francis Nkéa Ndizigue avait demandé des sanctions disciplinaires accompagnées de la suspension du magistrat concerné. Il avait également dénoncé « la corruption des magistrats, un fléau social auquel les Gabonais sont quotidiennement confrontés », assurant qu’il n’était « pas rare de voir les Gabonais payer de fortes sommes à un juge pour obtenir des décisions de justice en leur faveur ».
Le ministre de la Justice qui ne s’est pas encore exprimé sur le sujet depuis le début de la grève le 14 décembre, n’a pour l’heure pas répondu aux sollicitations de Jeune Afrique.
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