Mondial 2022 au Qatar : un air de déjà-vu…

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  • Georges Dougueli

    Journaliste spécialisé sur l’Afrique subsaharienne, il s’occupe particulièrement de l’Afrique centrale, de l’Union africaine et de la diversité en France. Il se passionne notamment pour les grands reportages et les coulisses de la politique.

Publié le 16 juin 2014 Lecture : 3 minutes.

Football, argent et triche… Telle est la trame de ce qui se joue dans les coulisses du sport mondial depuis deux décennies. Distillé au compte-gouttes par les journaux britanniques The Sunday Times et The Daily Telegraph, le feuilleton "Qatar 2022" a comme un air de déjà-vu. L’émirat aurait acheté le Mondial ? On s’en doutait un peu. On parle de plusieurs enveloppes de 200 000 dollars (environ 150 000 euros), 5 millions de dollars au total, distribués notamment à des représentants africains

Rien de bien nouveau pour les observateurs désabusés. La notoriété publique de la corruption et de la fraude ne choque plus grand monde, et le culte des dieux des stades draine toujours autant les foules.

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Cet amour du foot tranche avec la détestation tout aussi passionnelle vouée aux bureaucrates du sport. Qui ont du souci à se faire. Combien de patrons de fédérations nationales sont passés par la case prison ? Le Béninois Anjorin Moucharafou y a brièvement séjourné pour des soupçons de détournement des sommes versées par une compagnie de téléphonie mobile. L’affaire a indigné les Béninois… mais n’a eu aucune incidence sur sa carrière, lui qui continue de siéger au comité exécutif de la Confédération africaine de football (CAF).

Retrouvez notre page spéciale sur le scandale de corruption autour du Mondial 2022 au Qatar >>

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Son ex-homologue camerounais, Mohammed Iya, est quant à lui toujours détenu à la prison centrale de Kondengui, à Yaoundé, soupçonné de détournement de fonds de la Société de développement du coton (Sodecoton), l’entreprise à capitaux publics qu’il dirigeait. Reçu dans la capitale camerounaise début mai par le président Paul Biya, Sepp Blatter, patron du football mondial, avait prévu de rendre visite à son "ami" Iya avant de se raviser, craignant une entorse protocolaire désobligeante envers ses hôtes.

Même culture, mêmes moeurs à l’échelle des confédérations continentales. Les patrons ont en partage le refus de l’alternance et une horreur quasi phobique de la transparence. Pour eux, la corruption décriée n’est qu’une légende urbaine. Et le déni a engendré l’impunité. Ainsi le Camerounais Issa Hayatou, président de la CAF, n’a-t-il écopé que d’un blâme du Comité international olympique (CIO) en décembre 2011, après avoir reconnu, plus d’une décennie après les faits – dévoilés fin 2010 par les médias britanniques -, avoir perçu 100 000 francs français (environ 15 000 euros) de la part de la société de marketing ISL pour le 40e anniversaire de la CAF, en 1995. Hayatou n’a jamais pu prouver que l’argent, qui lui a été versé personnellement et en liquide, avait réellement profité à la confédération.

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En tout état de cause, on avait eu confirmation qu’il y a quelque chose de pourri dans la gouvernance du football depuis le retrait peu glorieux, en 2013, du président d’honneur de la Fifa, le Brésilien João Havelange. L’ex-patron emblématique de la Fédération (1974-1998) avait été épinglé dans un rapport sur des pots-de-vin établi par la commission d’éthique.

Vote truqué, donc, en faveur du Qatar, comme pour le Mondial 2006, dont l’attribution à l’Allemagne fut entachée par l’activisme suspect d’un sponsor. En attendant, "Qatar 2022" compte ses morts : selon la Confédération syndicale internationale, quelque 1 200 ouvriers engagés par l’émirat du Golfe sont décédés sur les chantiers titanesques… Un tel coût humain, corrupteurs et corrompus ne l’avaient pas prévu.

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