Sénégal : pas gay friendly, vraiment ?

Le gouvernement sénégalais a-t-il censuré une exposition d’oeuvres évoquant l’homosexualité dans le cadre de la biennale de Dakar ? Oui, prétend « Le Monde ». Faux, rétorquent les galeristes mis en cause.

« Imagerie précaire. Visibilité gay en Afrique », photos de Jim Chuchu. © DR

« Imagerie précaire. Visibilité gay en Afrique », photos de Jim Chuchu. © DR

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Publié le 13 juin 2014 Lecture : 2 minutes.

"Actes de censure", "chasse aux sorcières", "escalade de l’homophobie"… À lire Le Monde du 5 juin, on peut croire qu’une virulente campagne homophobe touche la capitale sénégalaise. Dans le cadre de Dak’art, la 11e biennale de l’art africain contemporain, l’État sénégalais aurait "ordonné la fermeture temporaire de deux centres d’art qui exposaient des oeuvres évoquant l’homosexualité", tandis qu’"une frange rigoriste se déchaîne dans la presse sénégalaise", selon le quotidien français.

En réalité, les autorités n’ont pas interdit la moindre exposition de la biennale, comme le confirme Aissa Dione, qui supervise l’une des deux galeries mises en cause : "C’est absurde ! Nous n’avons jamais fermé, et d’ailleurs, personne ne nous a demandé de le faire." Quant à la "frange rigoriste" qui se déchaînerait dans les médias, elle se résume à une ONG islamiste, Jamra, particulièrement chatouilleuse sur la question de l’homo­sexualité, et dont les responsables ont effectivement appelé les autorités à prendre leurs responsabilités.

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La confusion trouve son origine dans la décision d’une des galeristes en cause, Koyo Kouoh, de Raw Material Company, de suspendre momentanément l’exposition "Imagerie précaire. Visibilité gay en Afrique". "Ce n’est pas le gouvernement sénégalais qui a ordonné la fermeture, c’est moi qui en ai pris la décision après que le chef de quartier est venu nous prévenir que des Baye Fall [une branche du mouridisme] préparaient une attaque." Dans un communiqué diffusé le même jour, Jamra a interprété la fermeture de Raw Material comme une décision officielle lui donnant gain de cause. Reprise sans vérification, la rumeur a pris valeur d’information.

Rien de scandaleux

Du côté sénégalais, il est vrai qu’on ne s’est pas empressé de démentir. Dans une société prompte à s’indigner des pressions internationales, réelles ou fantasmées, visant à dépénaliser l’homosexualité au Sénégal, le fait que l’État ait pu censurer ces expositions n’est pas de nature à créer le scandale. Ce qu’un collaborateur de la Première ministre Aminata Touré confirme : "Je ne trouve pas offensant qu’on dise que les autorités sénégalaises ont fermé une expo sur l’homosexualité. Ce serait une bonne idée."

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