Sénégal : le mouvement rebelle du MFDC condamne le meurtre des 13 jeunes en Casamance
Le mouvement rebelle, divisé en plusieurs factions, lie le massacre de samedi à un conflit entre des scieries locales.
Soupçonnés par certains observateurs d’être à l’origine du regain de violence dans une région qui a connu plusieurs années d’accalmie, le Mouvement des forces démocratiques de Casamance (MFDC), qui lutte depuis 1982 pour l’indépendance de la Casamance, a condamné ce lundi 8 janvier le massacre de 13 jeunes dans une forêt de cette région du sud du Sénégal, survenu samedi 6 janvier.
L’attaque s’est produite dans la forêt de Borofaye, dans la commune de Boutoupa-Camaracounda, lorsque des jeunes, qui affirment être partis chercher du bois de chauffage, ont été surpris par une bande d’hommes armés.
« Fossoyeurs de la paix »
Dans un communiqué signé de la cellule de communication du maquis, une des branches du mouvement rebelle, le MFDC a assuré poursuivre « sa dynamique d’ouverture au dialogue en faveur d’une issue heureuse au conflit casamançais » et ne pas se laisser « distraire ni désorienter par les fossoyeurs de la paix qui ne visent rien d’autre que de casser la dynamique de paix afin de pouvoir mieux vivre du conflit », prônant une « issue heureuse » à un conflit vieux de 35 ans.
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« Il est trop tôt pour dire si les assaillants font partie du MFDC, l’enquête le dira », avait expliqué le colonel Ndiaye après l’attaque, alors que la rébellion est divisée en plusieurs factions.
L’organisation casamançaise, de son côté, demande « aux autorités sénégalaises d’orienter leurs enquêtes vers » des responsables administratifs et militaires locaux « à la tête d’un vaste réseau de coupe clandestine et de vente illicite du bois de teck », selon le texte.
Le teck est un arbre tropical qui produit un bois précieux très recherché, notamment pour la fabrication de ponts de bateaux et de meubles de jardin. Il pousse en Casamance, une des régions les plus boisées du Sénégal, voisine de la Guinée-Bissau et de la Gambie, et fait l’objet de nombreuses convoitises et de trafics.
La forte concurrence a fini par instaurer une atmosphère d’animosité entre les employés
La rébellion lie plus précisément le massacre de samedi, qui s’est déroulé près de Ziguinchor, la principale ville de la région, à un conflit entre des scieries locales, dont la « forte concurrence a fini par instaurer une atmosphère d’animosité entre les employés ».
Traque des auteurs
Un responsable local de la rébellion, Oumar Ampaye Bodian, a également condamné le massacre de samedi. « [C’est] un acte odieux [qui] ne peut rester impuni au moment où le président de la république a tendu la main » au MFDC, a-t-il affirmé sur la radio privée Sud FM. « Nous restons déterminés » dans la recherche de paix parce que « la question de la Casamance doit être réglée autour d’une table », a-t-il poursuivi.
« L’aile politique intérieure et extérieure du MFDC se démarquent de cet acte odieux. Nous allons descendre dans le maquis pour situer les responsabilités », a-t-il ajouté, en n’indiquant pas si des membres de la rébellion étaient ou non impliqués dans la tuerie.
L’armée […] procède à un ratissage en profondeur. On entend des coups de feu
Déployée depuis samedi, l’armée sénégalaise continue la traque des auteurs du massacre. Quelque 150 parachutistes avaient été dépêchés samedi pour évacuer les victimes et poursuivre les auteurs de l’attaque, selon un porte-parole de l’armée, le colonel Abdou Ndiaye. « L’armée […] procède à un ratissage en profondeur. On entend des coups de feu », raconte un habitant du village de Bourafaye Baïnouk, proche des lieux de la tuerie et de Ziguinchor.
Cette attaque survient au lendemain de la libération de deux combattants du MFDC, libérés par l’armée à la suite d’une médiation lancée par la communauté de Sant’Egidio de Rome, entre l’État du Sénégal et les combattants du MFDC.
Deuil national de deux jours
Le président sénégalais Macky Sall a décrété un deuil national de deux jours, qui a commencé lundi, pour « honorer la mémoire des victimes de l’attaque armée ». « Pendant cette période, le drapeau national est en berne et des minutes de silence sont observées durant toutes les cérémonies officielles. Les rassemblements et autres cérémonies de réjouissance sont interdits sur l’étendue du territoire national », indique un communiqué du gouvernement.
Ce massacre met à l’épreuve le processus de paix en Casamance, relancé en octobre lors d’une réunion à Rome entre le gouvernement et une faction du MFDC mandatée par l’un de ses chefs, Salif Sadio.
Cette médiation se fait sous l’égide de la communauté catholique de Sant’Egidio, médiatrice dans ce conflit qui a fait des milliers de victimes civiles et militaires, ravagé l’économie de la région et poussé de nombreux habitants à fuir. « C’est une situation que nous regrettons tous mais je pense que ça n’aura pas une incidence négative sur le processus de paix qui est enclenché », a déclaré Ibrahima Sakho, gouverneur de Ziguinchor. Les tractations de paix se sont multipliées depuis l’arrivée au pouvoir de Macky Sall en 2012.
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