RDC – Me Bagayamukwe : « Les avocats de Paris pourront bientôt nous aider pour les cas de violences sexuelles »

Une « convention sur la coopération judiciaire » a été signée début juin entre le barreau de Paris et celui de Bukavu. Un accord qui permettra aux avocats parisiens d’assister les victimes de violences sexuelles dans l’est de la RDC. Trois questions à Me Jean-Claude Bagayamukwe, bâtonnier dans la capitale du Sud-Kivu.

Me Jean-Claude Bagayamukwe, bâtonnier de Bukavu, dans l’est de la RDC. © DR

Me Jean-Claude Bagayamukwe, bâtonnier de Bukavu, dans l’est de la RDC. © DR

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Publié le 17 juin 2014 Lecture : 3 minutes.

Qu’a-t-on retenu du procès de Minova, sinon l’acquittement de la quasi-totalité des militaires accusés de viol ? Le verdict prononcé début mai a provoqué stupeur et indignation auprès des ONG locales et internationales qui suivaient de près l’affaire. Laquelle concernait "135 cas de violences sexuelles et autres violations graves des droits de l’homme, dont des meurtres et des pillages massifs […] perpétrés par des militaires entre le 20 et le 30 novembre 2012" à Minova et à ses alentours, dans la province du Sud-Kivu", selon un rapport des Nations unies.

À l’image de ce procès, qualifié de "bâclé" par un bon nombre d’observateurs internationaux, plusieurs affaires liées aux violences sexuelles n’aboutissent pas toujours aux condamnations des coupables dans l’est de la RDC. Impossibilité de rassembler des preuves et assistance a minima des victimes sont les principales causes d’une impunité trop fréquente. Pour tenter d’améliorer les choses, le barreau de Bukavu a conclu, le 6 juin, une "convention sur la coopération judiciaire" avec celui de Paris. Le bâtonnier du Sud-Kivu, Jean-Claude Bagayamukwe, 55 ans, explique à Jeune Afrique les tenants et les aboutissements de cet accord.

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Jeune Afrique : Concrètement, en quoi consiste la convention signée entre le barreau de Bukavu et celui de Paris ?

Me Jean-Claude Bagayamukwe : Les deux barreaux se sont engagés à travailler ensemble aux côtés des victimes des violences sexuelles dans l’est de la RDC. Bientôt, les avocats de Paris descendront à Bukavu pour plaider, pour nous épauler. Surtout lorsqu’il s’agira de cas des viols massifs. Car, très souvent, dans ce genre d’affaires, les victimes n’ont pas les moyens financiers nécessaires pour s’offrir les services d’un avocat. Elles ont recours à notre bureau de consultation gratuite. Ce dernier ne fonctionne que grâce aux cotisations des avocats eux-mêmes. Il n’y a aucune subvention de l’État comme cela se fait sous d’autres cieux.

Les victimes des violences sexuelles dans l’est de la RDC seront mieux assistées.

Me Jean-Claude Bagayamukwe , bâtonnier du Sud-Kivu

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Désormais, les avocats de Paris pourront bientôt nous aider pour que les victimes des violences sexuelles soient mieux assistées. Des ateliers et des formations sont également prévus dans le cadre de l’accord signé. Des avocats stagiaires de Bukavu pourront même se rendre à Paris pour parfaire leur formation.

Qu’est-ce qui va changer dans le traitement des dossiers liés aux violences sexuelles dans les cours et tribunaux dans l’est de la RDC ?

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Avec l’expertise des avocats français, nous allons remédier aux difficultés auxquelles nous sommes souvent confrontés lors du rassemblement des moyens de preuve. Nous comptons également renforcer notre collaboration avec l’hôpital Panyi du docteur Denis Mukwege [centre hospitalier réputé pour les soins accordés aux femmes violées de Kivu, NDRL] qui dispose d’une clinique juridique. Cela permettra une bonne administration de la justice et une meilleure assistance des victimes des violences sexuelles. Ces dernières ont droit à un procès équitable.

>> Lire aussi : "Au Kivu, le viol demeure une véritable stratégie de guerre", selon docteur Denis Mukwege

Nous envisageons également de mener des plaidoyers en faveur de l’instauration d’un tribunal pénal international en RDC, une fois qu’on aura plaidé, avec les avocats de Paris, dans deux ou trois affaires emblématiques liées aux violences sexuelles.

Comment s’est passé le rapprochement entre les deux barreaux ?

C’est par l’entremise de Ghislain de Candolle, consul honoraire de France à Bukavu. Ce diplomate français m’a permis de contacter Me Jacques Storelli qui travaille avec le bâtonnier de Paris. Le contact entre les deux barreaux a été ainsi établi.

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Propos recueillis par Trésor Kibangula

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