Cameroun – Mondial 2014 : Roger Milla dans l’attente d’une nouvelle épopée des Lions indomptables

Ne le cherchez pas au Brésil aux côtés des Lions indomptables, qui affrontent la Croatie mercredi, Roger Milla a refusé de s’y rendre. Pourtant, alors que toute l’Afrique attend de voir une des cinq sélections du continent briller au Mondial, son nom reste mythique. Retour sur l’une des légendes du ballon rond.

Roger Milla, célébrant un but avec la sélection du Cameroun. © AFP

Roger Milla, célébrant un but avec la sélection du Cameroun. © AFP

MATHIEU-OLIVIER_2024

Publié le 18 juin 2014 Lecture : 0 minute.

À 62 ans, Albert Roger Mooh Miller, dit Roger Milla, n’a jamais cessé de faire parler de lui. Ambassadeur itinérant du football camerounais et de l’Onu-Sida, la légende du football camerounais, qui a participé à trois Coupes du monde avec sa sélection, a décidé de décliner l’invitation des autorités camerounaises, qui l’invitaient à aller soutenir les Lions indomptables au Brésil, où ils jouent mercredi 18 juin contre la Croatie.

>> Retrouvez les résultats et le calendrier des matchs du Mondial 2014 <<

la suite après cette publicité

Pourquoi ? Parce que le budget proposé par le gouvernement est selon lui insuffisant. "On m’a demandé d’aller m’aligner à la guérite pour toucher quatre millions de francs CFA de frais de mission et j’ai refusé parce que pour moi, ce n’est pas normal qu’on envoie un ambassadeur itinérant avec quatre millions de francs CFA au Brésil’, a-t-il confié à l’agence de presse Pana. "Je ne vais pas tout le temps courir derrière des ministres pour dire : ‘Monsieur le ministre, j’ai envie de manger’", a ajouté l’ancien avant-centre.

Roger Milla n’est pas vraiment du genre à mâcher ses mots. En mai 2013, opposé à la nomination d’un coach européen à la tête de la sélection camerounaise, il avait notamment fustigé les "ennemis du pays", Antoine Kombouaré, Volker Finke et Raymond Domenech, déclarant même qu’il serait prêt à "tabasser" l’un d’entre eux s’il venait à "débarquer au Cameroun". C’est finalement Volker Finke, que Milla juge incompétent, qui obtiendra le poste. Une défaite pour l’ancien attaquant, dont l’image est cependant loin d’être écornée sur le continent.

>> Lire aussi : "Pour Finke, "en un an, les Lions ont bien avancé""

Roger Milla, le vrai-faux retraité

la suite après cette publicité

Fils d’un cheminot, appelé à se déplacer régulièrement, c’est à 13 ans que le jeune Roger fait ses premiers pas sur la pelouse de l’Éclair de Douala. Rapide, technique, il intègre le championnat d’Afrique cinq ans plus tard, avec les Léopards, autre équipe de la capitale économique du Cameroun. Il glane avec eux deux titres de champions et se hisse jusqu’en demi-finale de la Coupe d’Afrique des clubs champions en 1973, avant d’être transféré au Tonnerre de Yaoundé en 1974. Un succès : en 87 matchs disputés, Roger Milla y inscrit 69 buts. Il obtient même le Ballon d’or africain, en 1976. Une consécration qui va lui ouvrir les portes de l’étranger : le club de Valenciennes, dans le Nord de la France, lui offre un pont d’or, ainsi qu’une villa, afin qu’il rejoigne son effectif. Ce qu’il fait, en 1977.

C’est le début d’une longue aventure française. Si l’expérience à Valenciennes est un échec, Roger Milla finissant réserviste, c’est à Bastia que le Camerounais va frapper. Il y gagne la Coupe de France en 1981, inscrivant le deuxième but du club corse en finale face à l’AS Saint-Étienne, club qu’il rejoindra ensuite avant de terminer sa carrière de joueur professionnel en 1989, à Montpellier.

la suite après cette publicité

Ayant annoncé sa retraite internationale l’année précédente, après 81 sélections, deux Coupes d’Afrique des nations gagnées en 1984 et 1988 et une participation à la Coupe du Monde en 1982, Roger Milla s’exile sur l’Île de La Réunion, où il joue pour le club amateur de Saint-Pierre. Une retraite dorée en quelque sorte. Mais ce que Roger Milla ignore, c’est qu’il n’a pas encore vécu les plus belles heures de sa vie de footballeur.

L’épopée 1990

Alors que 150 000 personnes environ ont assisté à son double jubilé, le 28 décembre 1987 à Douala puis le 2 janvier 1988 au stade Omnisport de Yaoundé, l’attaquant va en effet sortir de sa retraite à l’appel du président, Paul Biya, qui lui demande de rechausser les crampons à l’occasion de la Coupe du Monde 1990, organisée en Italie. Bonne pioche.

L’ex-retraité apparaît, à 38 ans, au sommet de son art. Ses démarrages fulgurants, son dribble et sa vision du jeu font des merveilles. Ayant inscrit quatre buts, dont deux face à la Colombie, chaque fois accompagnés d’un "Makossa" autour du poteau de corner, il porte littéralement son équipe jusqu’aux quarts de finale, où les Lions indomptables s’inclinent finalement face à l’Angleterre. La meilleure performance jamais réalisée par une équipe africaine, égalée depuis par le Sénégal, en 2002, et le Ghana, en 2010.

Plus vieux buteur de l’histoire de la Coupe du Monde

Véritable héros au Cameroun et, au-delà, dans tout le continent, Roger Milla entre, avec le mondial italien, dans la légende. L’attaquant est même célébré dans la musique, notamment par Yannick Noah, dans sa chanson Saga Africa, ou par le chanteur de RDC Pépé Kallé, en 1990.

Le vieux Lion s’essaie même à son tour à la chanson.  En 1991, il sort un single intitulé Sandy, en hommage à la naissance de sa fille, qui rencontre un certain succès, profitant de la vague de sympathie provoquée par la Coupe du Monde, un an auparavant. Le Roger Milla chanteur n’est pourtant pas resté dans les mémoires.

Il faut dire que le footballeur a collectionné les records. Deux fois meilleur buteur de la Coupe d’Afrique des nations en 1984 et 1988, élu meilleur joueur camerounais et deuxième meilleur Africain du 20e siècle par la Fédération internationale d’histoire et de statistique du football (IFFHS), il est également le plus vieux buteur de l’histoire de la Coupe du monde. Faute de se contenter de sa performance de 1990, il participe en effet à son troisième mondial en 1994, à 42 ans et un mois, inscrivant un but face à la Russie, qui bat cependant sèchement (6-1) les Lions indomptables, éliminés dès le premier tour.

Vingt ans plus tard, Roger Milla attend toujours de voir les Camerounais briller une nouvelle fois en Coupe du Monde. Il espère notamment que les Lions croiseront le chemin de l’Angleterre au Brésil, afin de venger le quart de finale perdu en 1990. Seulement, pour cela, le Cameroun de 2014 devra d’abord sortir de la poule du Brésil, de la Croatie et du Mexique, contre qui ils ont perdu leur premier match. Et ce ne sera pas une mince affaire.

_________________

Par Mathieu OLIVIER

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires