Maroc – Football : que faut-il retenir du CHAN 2018 ?
Dimanche soir, à Casablanca, le Maroc a remporté le 5e Championnat d’Afrique des nations en battant largement le Nigeria en finale (4-0). Retour sur un tournoi qui a réservé son lot de surprises, de déceptions et de révélations.
• Le Maroc brise la malédiction
Jamal Sellami a marqué des points, en faisant pratiquer à son équipe un football technique et tourné vers l’attaque
Depuis 2009 et la première édition du CHAN, le titre avait systématiquement échappé aux pays organisateurs : la Côte d’Ivoire (2009), le Soudan (2011), l’Afrique du Sud (2014) et le Rwanda (2016) s’étaient tous pris les pieds dans le tapis, et parfois même dans les grandes largeurs, comme les Éléphants ou les Bafana-bafana, incapables de franchir le premier tour.
Le Maroc, lui, est allé jusqu’au bout de son projet, alors qu’il ne devait pas accueillir le tournoi, initialement prévu au Kenya, et en y mettant les formes. Les Lions de l’Atlas n’ont rien laissé, ou presque à leurs adversaires.
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Seul le Soudan, a réussi à lui arracher un point, au premier tour (0-0). La Mauritanie (0-4), la Guinée (1-3) – un échec qui a valu son poste au sélectionneur du Sily National Lappé Bangoura – la Namibie (0-2) en quart de finale et la Libye (1-3) en demi-finale ont tous été emportés par l’élan offensif des Nord-Africains. Lesquels ont saccagé le pourtant si solide Nigeria (4-0) en finale, terminant le CHAN comme ils l’avaient commencé face aux Mauritaniens.
Jamal Sellami, le sélectionneur des Lions locaux, a marqué des points, en faisant pratiquer à son équipe un football technique et tourné vers l’attaque. Qui s’en plaindra ?
Et sur le plan de l’organisation, il n’y a pas eu de fausse note. Même si les stades n’étaient pas pleins, même si le public local s’est essentiellement intéressé à sa sélection, le Maroc a prouvé qu’il savait recevoir. A un peu plus de quatre mois de la désignation du pays hôte de la Coupe du monde 2026 face au trio États-Unis-Canada-Mexique, un peu de – bonne – publicité n’est superflu…
• Ayoub El Kaabi explose les compteurs
On peut compter sur le public et la presse pour souffler à Hervé Renard le patronyme de ce buteur multirécidiviste
Sa réputation n’avait pas franchi les frontières du Maroc et les pages consacrées au Botola, le championnat national. Aujourd’hui, le nom d’Ayoub El Kaabi est devenu beaucoup plus familier pour ceux qui suivent de près les affaires du football africain. L’attaquant de la Renaissance Sportive de Berkane (24 ans) a fait les choses en grand pour faire parler de lui : avec 9 buts en six matches, il a fait voler en éclats le record détenu par le Zambien Given Singuluma (5 buts), certes établi à une époque où le CHAN se jouait à huit.
Deux doublés (Mauritanie et Libye), un triplé (Guinée), un but en quart de finale contre la Namibie et un petit dernier en finale : le Casablancais de naissance – il évoluait encore au Racing (D2) la saison dernière – , qui a régalé son public, pourrait ne pas s’éterniser à Berkane, un club de la classe moyenne du football marocain.
El Kaabi devra bien sûr confirmer, un exercice jamais simple. Et on peut aussi compter sur le public et la presse pour souffler à Hervé Renard, le sélectionneur de l’équipe A, le patronyme de ce buteur multirécidiviste, à cinq mois de la Coupe du Monde en Russie, au cas où le technicien français ait égaré les statistiques épatantes de la nouvelle attraction du football chérifien…
• La Libye étonne
Pour un pays dont la situation sécuritaire et politique est chaotique l’exploit méritait d’être signalé
On aurait pu réserver ce paragraphe au Soudan, étonnant troisième de ce CHAN marocain aux dépens de la… Libye (1-1, 4-2 aux t.a.b). Mais les Chevaliers de la Méditerranée méritent à nos yeux les félicitations du jury, bien qu’ils n’ont pas fait aussi bien qu’en 2014 en Afrique du Sud. Cette année là, les Libyens avaient remporté l’épreuve à la surprise générale après un parcours atypique – une victoire et cinq matches nuls – marqué par une adresse folle aux tirs au but, qui s’étira jusqu’à la finale remportée face au Ghana.
Pour ce CHAN, les joueurs entraînés par Omar Al-Maryami ont survécu au premier tour, grâce à une victoire obtenue lors du troisième match face au Rwanda (1-0) à l’apogée du temps additionnel.
Le Congo a expérimenté l’appétence libyenne pour les tirs aux buts en quart de finale (1-1, 3-5 aux t.a.b) et le Maroc s’en est remis aux prolongations pour se défaire des accrocheurs Chevaliers. Al-Maryami, avec un groupe largement constitué de joueurs évoluant à Al-Ittihad et Al-Ahli, les deux grands clubs tripolitains (seize au total) a largement rempli son contrat.
Pour un pays dont la situation sécuritaire et politique est chaotique, et dont le championnat national se dispute en alternance depuis la révolution de 2011, l’exploit méritait d’être signalé.
• Barel Mouko, toujours jeune
C’est une des belles histoires de ce CHAN. Le gardien congolais Barel Mouko, qui aura 39 ans le 5 avril prochain, va quitter son pays et le CS La Mancha pour s’offrir un peu de rab au DC Motema Pembe, un des plus grands clubs de la RD Congo voisine, et où il vient de signer pour deux ans.
Au Maroc, Mouko a permis au Diables Rouges de terminer en tête du groupe D un peu à la surprise générale sans encaisser le moindre but face au Cameroun (1-0), au Burkina Faso (2-0) et à l’Angola (0-0). Bien sûr, en manquant son tir au but en quart de finale contre la Libye (1-1, 3-65 aux t.a.b), Mouko a précipité l’élimination des siens.
Mais la performance individuelle du natif de Pointe-Noire et son parcours atypique méritaient bien qu’on s’y attarde un peu. Car après ses débuts au pays (Pigeon Vert, CS la Mancha, Stade Mandji), Mouko (50 sélections) est arrivé en France et s’est fait remarquer au CENT Issy, un club de foot d’entreprise, par Dijon, où il a joué de 2003 à 2008, dont quatre saisons en Ligue 2.
Passé ensuite par Gueugnon et Lille, il est revenu au Congo, à l’AC Léopards puis à La Mancha. A presque 40 ans, il va connaître un nouvel exil…
• Cameroun, Côte d’Ivoire, une gamelle et des questions
Entre nous, on s’attendait à mieux de la part des Lions Indomptables et des Éléphants locaux. Arrivés au Maroc avec le statut d’outsiders, Camerounais et Ivoiriens ont quitté le Royaume la queue basse, avec un bilan cumulé désastreux : les deux équipes n’ont récolté chacune qu’un misérable point au premier tour.
Les Ivoiriens n’ont même pas été capables d’inscrire le moindre but, ce que sont parvenus à faire les Camerounais à l’occasion de leur dernier match de poule face au Burkina Faso (1-1). Sur le plan du jeu, elles n’ont rien montré, ou presque.
Les deux sélectionneurs, Ibrahima Kamara et Rigobert Song, ont bien sûr leur part de responsabilité, mais il serait indécent de leur faire porter le chapeau. Les joueurs ont affiché leurs limites, mais au-delà des résultats, les responsables des footballs ivoirien et camerounais ne pourront pas faire l’économie d’une profonde réflexion sur le niveau des deux championnats respectifs. D’ailleurs, cela fait bien longtemps que les clubs des deux pays ne font plus guère d’étincelles sur la scène continentale, à part le Sewé Sport de San Pedro, finaliste de la Coupe de la CAF en 2014…
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