Algérie : début des consultations sur la révision de la constitution, boycottées par l’opposition
Moins de deux mois après la réélection d’Abdelaziz Bouteflika pour un 4e mandat, la présidence algérienne a relancé dimanche le chantier de la révision de la Constitution, avec des consultations boycottées par l’opposition et plusieurs personnalités.
L’ancien Premier ministre Ahmed Ouyahia, chef de cabinet de M. Bouteflika, a lancé ces consultations en recevant dans la matinée Mohamed Seghir Babès, président du Conseil national économique et social (Cnes), selon l’agence APS. Le texte soumis à la nouvelle concertations propose un retour de la limitation à deux des mandats présidentiels, levée en 2008 pour permettre à M. Bouteflika de briguer un 3e puis un 4e mandat, malgré les séquelles d’un AVC subi en avril 2013 qui a réduit ses capacités de mobilité et d’élocution.
Une cinquantaine de partis politiques, une trentaine de personnalités et une trentaine d’associations doivent participer à ces consultations, que plusieurs formations politiques de l’opposition et personnalités ont en revanche décidé de boycotter. Ainsi, Ali Benflis adversaire malheureux de M. Bouteflika à l’élection présidentielle du 17 avril, qui a contesté la régularité du vote et refusé de reconnaître la victoire de son rival, a décliné l’invitation de M.Ouyahia.
"Le principe, l’opportunité et l’utilité de cette révision posent problème. (…) Est-elle appelée à mettre fin au régime personnel et autoritaire imposé au pays ?", a demandé M. Benflis dans un entretien publié samedi par le quotidien francophone El Watan. L’ancien ministre des Affaires étrangères et candidat à l’élection présidentielle de 1999 Ahmed Taleb Ibrahim a également refusé l’invitation de M. Ouyahia. La révision de la Constitution n’est pas une "offre politique sérieuse" et n’est pas "à la hauteur de la gravité de la situation du pays", a-t-il expliqué à El Watan.
‘La charrue avant les bœufs’
Parmi les partis le Mouvement de la Société pour la Paix (MSP, islamiste) et le Rassemblement pour la Culture et la Démocratie (RCD, laïc) n’ont pas non plus souhaité participer à la consultation. Le président du MSP Abderrezak Mokri a estimé que le projet avait ignoré "les propositions sur lesquelles la majorité de la classe politique s’est largement prononcée, notamment la désignation du Premier ministre".
"Le Premier ministre doit être issu des rangs du parti majoritaire à l’Assemblée nationale. Cette proposition ne figure pas dans le projet", a-t-il relevé, alors que la Constitution précise seulement que le Premier ministre est nommé par le chef de l’Etat. Le MSP est la principale formation de l’Alliance de l’Algérie verte (AAV) islamiste, qui regroupe Ennahda et le Mouvement El Islah (Réforme) et ne compte que 49 députés sur 462.
Mohcin Bellabas, président du RCD, qui avait boycotté les législatives de 2012 et n’est donc pas représenté à l’assemblée, estime pour sa part que la révision "devrait être la dernière étape du processus de transition" que son parti réclame. Le RCD et le MSP font partie d’une coalition de partis politiques, avec deux autres partis islamistes et Jil El Djadid (parti de la jeunesse), qui militent pour "une transition démocratique" en Algérie et prévoient le 10 juin à Alger une conférence sur la transition démocratique dans le pays.
Le plus vieux parti d’opposition, le Front des forces socialistes (FFS) du chef historique Hocine Ait-Ahmed, a lui aussi estimé que "réviser la Constitution avant la construction d’un consensus national, c’est mettre la charrue avant les bœufs". Le FFS a déjà décliné l’offre du Premier ministre Abdelmalek Sellal de faire partie du nouveau gouvernement nommé après la réélection de M. Bouteflika. Le président avait déjà lancé au printemps 2013 un projet de révision constitutionnel, confié à un collège d’experts qui ont mené de larges consultations avant de rendre leur copie en septembre.
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