Air Austral lance ses premières synergies avec Air Madagascar pour « devenir leader dans l’Océan Indien »

Les dirigeants des deux compagnies ont présenté lundi 5 février leur plan de bataille pour Air Madagascar : renforcement des liaisons domestiques, régionales et de l’axe France-Madagascar. Misant sur l’attractivité touristique de la région, le partenariat s’articule autour d’un « bi-hub » Saint-Denis-de-la-Réunion/Antananarivo.

Rolland Besoa Razafimaharo, directeur général d’Air Madagascar , et  Marie-Joseph Malé, directeur général d’Air Austral. © Rémy Darras

Rolland Besoa Razafimaharo, directeur général d’Air Madagascar , et Marie-Joseph Malé, directeur général d’Air Austral. © Rémy Darras

Rémy Darras © Francois Grivelet pour JA

Publié le 6 février 2018 Lecture : 4 minutes.

Avec presque la moitié de sa flotte actuellement clouée au sol, un manque criant de moyens et d’investissements, et des personnels désemparés par le manque de perspectives, Rolland Besoa Razafimaharo, le nouveau directeur général d’Air Madagascar confie avoir passé « cent jours très difficiles ». De retour à la tête de la compagnie depuis octobre 2017, l’homme qui en fut une première fois le directeur général entre 1996 et 2000 dit n’avoir pas reconnu la compagnie où il a commencé sa carrière en 1976, et qui était alors considérée comme le « phare de l’Océan Indien ».

Sous un ciel parisien neigeux, ce dernier a présenté, lundi 5 février, en compagnie de Marie-Joseph Malé, directeur général d’Air Austral – son actionnaire à 49 % depuis le 30 novembre 2017 – les axes de leur partenariat stratégique. Nom de code pour le business plan qui résonne comme un cri de guerre : « Alefa 2027″, – Alefa signifiant « allez-y » en malgache.

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30 % de capacité en plus sur les créneaux domestiques et régionaux

Rolland Besoa Razafimaharo estime à 40 millions d’euros le besoin de financement nécessaire au redécollage d’Air Madagascar, dont 15 seront apportés par Air Austral et 25 ont été sollicités auprès des banques. Objectif pour les deux dirigeants : revenir à l’équilibre d’ici trois à quatre ans (90 millions de dollars CA en 2016, pertes de 20 millions de dollars pour le résultat d’exploitation), et remettre à niveau les hommes et les outils. « Des pièces détachées pouvaient ne pas être dédouanées ou achetées à temps, car les crédits d’Air Madagascar étaient insuffisants » rappelle Marie-Joseph Malé.

Outre l’envol dès avril prochain de Tsiradia, sa filiale dédiée aux liaisons domestiques, « Air Mad’ » renforcera son réseau régional en passant par exemple à deux fréquences quotidiennes entre Antananarivo et Saint-Denis-de-la-Réunion. « On offrira 30 % de capacités en plus sur les créneaux domestiques et régionaux » assure Marc Bailliart, directeur commercial France-Europe d’Air Austral-Air Madagascar – pour cela, la réparation de certaines pistes d’aéroports intérieurs sera nécessaire.

Pariant sur l’attractivité du secteur touristique, Air Madagascar compte bien monter en puissance sur le long-courrier, en passant, pour la prochaine saison touristique (de juillet à octobre), de 2 à 4 fréquences hebdomadaires entre la Grande île et Paris, plus une vers Marseille. Avec cette multiplication des fréquences, la compagnie fait le pari ambitieux de doubler en 2018 le chiffre d’affaires d’Air Madagascar réalisé vers la France.

Offre commerciale couplée

Autour de ce que Marie-Joseph Malé appelle le « bi-hub » Saint-Denis-de-la-Réunion/Antananarivo, les deux partenaires proposeront ainsi une offre commerciale couplée qui permettra « de faire un Paris-Antananarivo avec Air Madagascar puis un retour depuis La Réunion avec Air Austral (ou l’inverse), voire de passer par Mayotte » assure Marc Bailliart. Sur cet axe vers la France, leur marché-clé, les deux compagnies pourraient aussi profiter du repli d’Air Seychelles sur l’archipel, qui a annoncé son intention d’abandonner ses lignes vers Paris et Madagascar d’ici le mois d’avril.

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Air Madagascar bénéficiera aussi dès le 15 février prochain de l’accord TGV Air d’Air Austral qui lui permettra d’être rapproché de toutes les villes de province françaises en train depuis Roissy. Les synergies concerneront aussi les forces de vente, la mise en commun des programmes de fidélité et la maintenance…

Les prix proposés par les compagnies low-cost font mal à tout le monde

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« Air Madagascar a toutes les installations nécessaires, il faut maintenant investir dans les compétences », estime le directeur général d’Air Austral, qui cite notamment la formation, arrêtée depuis deux ans, obligeant la compagnie à faire réparer ses Boeing 737 à Addis Abeba. Les synergies toucheront aussi à l’harmonisation de la flotte à partir de 2020 et la location de nouveaux appareils.

Si ce plan de bataille a pour but premier la survie d’Air Madagascar, Marie-Joseph Malé, estime qu’il porte aussi l’enjeu de la pérennité d’Air Austral. Sortie en quatre ans de la zone rouge qui l’avait vue frôler la faillite en 2013, la compagnie réunionnaise est parvenue à redresser ses comptes en se diversifiant avec succès. Alors qu’il y a encore deux ans, le Paris-Réunion représentait 72 % de ses recettes, cette ligne compte désormais pour 56 %.

Marché très concurrentiel

Elle a lancé avec succès une filiale mahoraise, Ewa Air, qui profite d’un taux de remplissage exceptionnel vers Paris, et a optimisé sa flotte avec l’achat de deux Boeing 787 et deux 777. Enfin, elle a réussi sa montée en gamme avec une classe affaires qui lui assure désormais 28 % de ses recettes, avec un taux de remplissage passé de 40 à 60% et la prémunit de l’arrivée potentielle de compagnies du Golfe qui obligeraient les passagers de la métropole à faire un stop entre la métropole et La Réunion.

De quoi la différencier surtout sur un marché entre la métropole et La Réunion devenu très concurrentiel, disputé par cinq concurrents et tiré vers le bas à cause de l’offensive low cost mené par FrenchBlue « qui propose des vols à 574 euros en basse saison quand il y a peu de trafic. Ces prix font mal à tout le monde » regrette Marie-Joseph Malé. « Pour eux, il s’agit seulement de gagner des parts de marché… ».

Si ce dernier voit un potentiel de développement exceptionnel pour sa partenaire malgache, – « il y aura 50 millions d’habitants sur la Grande Île en 2050 contre 22 millions aujourd’hui » rappelle-t-il -, la concurrence est pourtant aussi intense côté malgache avec Ethiopian Airlines, Kenya Airways et, depuis la France, Corsair. Néanmoins, il peut déjà se féliciter. Ensemble, Air Austral et Air Madagascar sont plus forts. « Air Austral a pris de la valeur entre la signature du partenariat avec Air Madagascar et aujourd’hui, et a désormais une dimension autre que régionale ».

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