L’œil de Glez : Bouteflika et le 5e mandat, le combat de trop ?
Le président algérien Abdelaziz Bouteflika parle moins que peu. Alors on parle pour lui…
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 6 février 2018 Lecture : 2 minutes.
Sur tous les continents, la rareté de la parole présidentielle est une technique avérée de gestion du pouvoir suprême. Parler peu permet de susciter la crainte, le mystère ou le respect pour une figure d’autant plus « jupitérienne » qu’elle dirige, en silence, du haut de sa tour d’ivoire. À cette stratégie de l’économie de salive, le président algérien fait figure de champion du monde toute catégorie. Quel niveau réel de mutisme imposent à l’octogénaire Abdelaziz Bouteflika les séquelles de son accident vasculaire cérébral de 2013 ? Le secret médical obscurcissant la réponse à cette question, nombre d’observateurs se lassent de s’interroger, tandis que d’autres anticipent les conclusions.
Canular ou fake news malveillante ? Il y a quelques jours, deux messages d’alerte étaient lancés via le compte Twitter du ministre de l’Habitat d’un pays voisins. La présumée rumeur indiquait que le président algérien se serait tu, cette fois, pour toujours… Mais plutôt que de scruter des mots présidentiels qui peinent à poindre, certains acteurs politiques prennent, eux, le parti de squatter le silence présidentiel pour s’exprimer à la place du magistrat suprême. Et voilà donc que des voix autorisées rapportent ce que le grand public n’aurait pas entendu.
Silence assourdissant
Après l’assassinat d’un ressortissant algérien à Marseille, le 2 février, une déclaration officielle indiquait que Bouteflika exigeait la lumière sur ce décès, par instruction de son ministre des Affaires étrangères. A-t-on entendu le timbre du chef de l’État ? Non. A-t-on la certitude qu’il a formulé ce qui a été rapporté ? Qu’importe. Tous les présidents ont recours à des ghostwriters sans être pour autant des marionnettes entre les mains de ventriloques. Mais là où le silence devient assourdissant, c’est lorsque surgit l’hypothèse d’un cinquième mandat pour le chef de l’État en place…
Est-il crédible que l’aphasique président appelle le peuple à lui renouveler sa confiance en 2019 ?
Personne n’a oublié la campagne électorale de 2014, à part peut-être le candidat lui-même. Abdelaziz Boutelika n’était apparu à aucun meeting, pas même sous forme d’hologramme. Est-il crédible que l’aphasique président appelle le peuple à lui renouveler sa confiance en 2019, à 82 ans et du fond de son fauteuil roulant ? Peut-être suffirait-il, là encore, qu’on le fasse pour lui. Ce 4 février 2018, à une douzaine de mois du scrutin suprême, Baha Eddin Tliba lançait une coordination pour « le soutien au cinquième mandat du Président Bouteflika ».
Ce député du Front de libération national (FLN) – l’un des partis de la majorité présidentielle – affirme avoir le soutien de nombreux pontes de la scène politique algérienne, notamment de deux anciens Premiers ministres. Si l’hypothèse d’un « Boutef V » peut paraître surréaliste, il est vrai que la question de la succession n’a pas été formellement abordée. Bavard ? Pas bavard ? Capable ? Incapable ? Candidat ? Pas candidat ? Tout le monde a sa petite idée, mais pour des certitudes, il faudra repasser…
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