Et il est comment le dernier Moussa Konaté
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Nicolas Michel
Romancier et journaliste, il est responsable des pages consacrées à la culture et auteur d’une dizaine de romans et albums illustrés.
Publié le 6 juin 2014 Lecture : 2 minutes.
Moussa Konaté est mort le 30 novembre 2013, à Limoges, loin de ce Mali qui coulait dans ses veines, loin de cette Afrique pour laquelle il voulait le meilleur. right; padding-left: 20px;" />Meurtre à Tombouctou aurait pu être le tout dernier de ses livres : ce n’est pas le cas puisqu’il avait eu le temps de confier aux éditions Métailié un autre manuscrit, L’Affaire des coupeurs de tête, à paraître aussi en 2014. En attendant la parution de cet ultime opus, c’est avec plaisir et émotion que l’on retrouve, sur les berges du fleuve Niger, le commissaire Habib et l’inspecteur Sosso, duo de choc de la police malienne.
Cette fois, l’expérience de l’un et l’impulsivité de l’autre seront mises à contribution pour résoudre une affaire qui menace d’enflammer Tombouctou : la mort mystérieuse d’un jeune Touareg… Lutte entre clans rivaux, jalousie amoureuse, complot terroriste, toutes les hypothèses sont possibles et, avec une science consommée de la diplomatie, le commissaire Habib s’essaye à démêler l’écheveau en ménageant aussi bien les sensibilités locales que nationales, voire internationales puisque son administration lui adjoint d’office un policier français.
Les polars de Moussa Konaté ne ressemblent qu’aux polars de Moussa Konaté : aucun voyeurisme sanglant, une lenteur calquée sur le débit du Djoliba, des dialogues délicieusement surannés, une langue qui évite avec soin les exotismes faciles, mariée à une volonté d’éclairer les lignes de fracture traversant toutes les couches de la société malienne. Sans caricaturer, attentif avant tout à la crédibilité de ses personnages – fussent-ils secondaires – Konaté dépeint le Nord-Mali mieux qu’aucun article de presse ne le fera jamais. Qu’il s’agisse du patelin commissaire Touré, "un Songhaï au physique de boxeur" très prompt à ménager la chèvre et le chou, ou de l’inénarrable serveur surnommé Flytox en raison de sa propension à gifler l’air pour y dézinguer d’invisibles moustiques, Meurtre à Tombouctou représente pour Konaté l’occasion de raconter la "ville aux 333 saints" en exécutant un à un tous les clichés auxquels on l’associe. Avec lui, la cité mythique n’est pas drapée dans un linceul de poussière et figée pour l’éternité, elle palpite d’influences vivantes et diverses, noeud de civilisations offrant, pour qui veut bien écouter, une partie des clés nécessaires pour comprendre le Mali contemporain. Et ses problèmes actuels.
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