Médias : une femme disparaît au « New York Times »

Saura-t-on un jour pourquoi Jill Abramson a été brutalement débarquée de la direction de la rédaction du « New York Times » et remplacée par l’Africain-Américain Dean Baquet ?

Dean Baquet et Jill Abramson, en juin 2011 à New York. © Fred R. Conrad/AP/SIPA

Dean Baquet et Jill Abramson, en juin 2011 à New York. © Fred R. Conrad/AP/SIPA

Publié le 28 mai 2014 Lecture : 2 minutes.

Le brutal licenciement, le 14 mai, de Jill Abramson, 60 ans, directrice de la rédaction du New York Times depuis 2011 – et première femme à occuper ce poste -, et l’annonce par Arthur Sulzberger, directeur de la publication, de son remplacement par Dean Baquet, 57 ans – et premier Africain-Américain à occuper ce poste -, n’en finit pas de faire des vagues au sein de la rédaction du quotidien. Et ailleurs.

Abramson, qui était au journal depuis dix-sept ans (elle s’est fait tatouer dans le dos le T en caractère gothique du Times) n’a même pas dit au revoir à ses collègues. Pour justifier son départ, Sulzberger a invoqué le caractère arbitraire de certaines de ses décisions ainsi que les déficiences de son management. D’autres, qui déplorent son autoritarisme, estiment qu’elle aurait eu le tort de demander à Janine Gibson, du Guardian, de développer l’offre digitale du quotidien sans en informer Baquet, alors numéro deux de la rédaction (1 200 salariés, au total). D’autres encore estiment qu’elle n’aurait pas apprécié d’être moins bien payée que Bill Keller, son prédécesseur… Quoi qu’il en soit, elle n’a manifestement rien perdu de son sens de l’humour. Quelques jours après son licenciement, sa fille postait sur Twitter une photo d’elle avec des gants de boxe, prête à malmener un punching-ball !

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Pas sûr que l’on connaisse un jour le fin mot de l’histoire, qui survient à un moment critique dans l’histoire du Times. Une semaine avant le renvoi d’Abramson, un rapport rédigé par le fils d’Arthur Sulzberger avait dressé un bilan alarmant de la transformation digitale du quotidien. Au bord du dépôt de bilan entre 2006 et 2010, celui-ci a pourtant brillamment redressé la barre sous la houlette d’Abramson. Au premier trimestre de cette année, ses revenus ont augmenté de 2,6 % par rapport au premier trimestre de 2013. Avec une qualité inchangée, puisque le Times a glané pas moins de huit prix Pulitzer depuis 2011.

Baquet n’a jamais achevé ses études, mais a obtenu le prix Pulitzer

Reste qu’il serait dommage que la brusquerie de l’éviction d’Abramson éclipse ce petit événement que constitue la nomination d’un Africain-Américain à la tête de la rédaction du prestigieux quotidien. dans une famille modeste de la Nouvelle Orléans (ses parents étaient restaurateurs), Baquet est un autodidacte qui n’a jamais achevé ses études supérieures, ce qui ne l’a pas empêché, en 1988, d’obtenir le prix Pulitzer pour un reportage sur la corruption au sein de la municipalité de Chicago. En 2006, il a été renvoyé du Los Angeles Times pour avoir refusé de réduire les effectifs de la rédaction. Après sa nomination, il s’est engagé à pratiquer un journalisme "ambitieux" censé lui procurer un "plaisir total et absolu". Bonne chance.

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