France : Cambadélis en tenue de combat pour redonner vie au PS
Nommé premier secrétaire après le désastre des municipales – puis celui des Européennes, Jean-Christophe Cambadélis ne sous-estime pas l’extrême difficulté de sa tâche : redonner vie au Parti socialiste.
Pour Jean-Christophe Cambadélis, l’heure a sonné. Nommé le 15 avril, au lendemain d’un désastre électoral (quelque 160 villes de plus de 10 000 habitants perdues lors des élections municipales), le nouveau patron du Parti socialiste français (PS), qui n’a pas été élu par les militants mais adoubé par François Hollande pour un bail de dix-huit mois, n’a plus de temps à perdre. Avant même les résultats désastreux des élections européennes du 25 mai, "Camba" savait que sa mission ne serait pas simple. Comme le disait de manière abrupte un membre du bureau politique : "Soit le PS fait sa révolution, soit il disparaît."
Certes, le parti cumule encore tous les pouvoirs : présidence de la République, gouvernement, Assemblée nationale, Sénat, Régions… Mais c’est un grand corps malade, miné par les querelles de chapelles, les batailles d’ego et, plus grave, une totale absence de vision. "Nous sommes devenus un mouvement anhistorique", commente Pouria Amirshahi. Membre du bureau politique, le député de la 9e circonscription des Français de l’étranger (qui englobe Afrique du Nord et Afrique de l’Ouest) est l’un des animateurs de l’aile gauche du parti. "De la même manière que les communistes ont tué la révolution, explique-t-il, les sociaux-démocrates ont tué la réforme. Par renoncement, par faiblesse."
Est-il capable de donner un nouveau souffle ?
Cambadélis ne dit pas autre chose lorsqu’il affirme que le PS "n’a pas pris la mesure de notre époque", qu’il "fonctionne toujours sur de vieux logiciels" et que sa sémantique "est devenue effroyablement technocratique". Mais est-il pour autant capable de lui donner un nouveau souffle ? Si l’on admet que rien ne vaut un bon vieux trotskiste pour remettre de l’ordre dans un parti et "faire redescendre la gauche dans le peuple", alors oui, peut-être. De son passage à l’Organisation communiste internationaliste (OCI) dans les années 1970, il lui reste un pseudo – Kostas, en référence à ses origines grecques -, le goût du combat et du mot qui fait mouche, mais aussi un sens aigu de la stratégie. Aussi redoutable aboyeur que fin tacticien (on l’appelle "l’homme des cambanaisons"), ce banlieusard de 62 ans a la réputation d’être le plus politique des socialistes de sa génération. Tout l’inverse de celui auquel il succède : le transparent Harlem Désir, que Hollande lui avait préféré en 2012.
Ses détracteurs ont beau jeu de rappeler qu’en matière d’idéologie bien malin qui parviendrait à situer Cambadélis. Il est issu d’une génération pour laquelle, dit-il, "le but était tout". Lui-même n’est-il pas obnubilé par la prise du pouvoir au PS depuis quelque dix-sept ans ? Après avoir rejoint le parti, en 1986 – ce qui lui valut de passer pour un "traître" aux yeux de ses "amis" trotskistes – et fait de l’antifascisme son premier combat, il accompagna tour à tour le très orthodoxe Lionel Jospin et le très libéral Dominique Strauss-Kahn, jusqu’à sa chute, en 2011. "Avec un tel parcours, on se demande bien quelle direction il va donner au parti", persifle un élu local. Cambadélis l’a dit : il veut organiser des "états généraux des socialistes", renouer le lien avec les écologistes et les communistes et redonner la parole aux militants. Quant à savoir quel socialisme il prône, c’est une autre histoire.
Accointances africaines
Du continent africain, Jean-Christophe Cambadélis s’est longtemps désintéressé. Jusqu’à ce jour de 2008 où il a pris en charge les relations internationales au sein du Parti socialiste. Depuis, il a largement rempli son carnet d’adresses. Ami de Laurent Gbagbo, il l’a soutenu lors de la campagne présidentielle de 2011 en se rendant à Abidjan ("en son nom propre", avait précisé le PS), avant de s’en démarquer après le premier tour. Il est aujourd’hui proche du Sénégalais Ousmane Tanor Dieng, qui a longtemps oeuvré au sein de l’Internationale socialiste, et du Tunisien Moustapha Ben Jaafar.
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