Avocats, ouvrons nos frontières !
Michel Kizito Brizoua-Bi est associé chez Bilé-Aka, Brizoua-Bi à Abidjan.
L’intérêt inédit que suscite le continent dans le monde s’étend aujourd’hui au secteur du droit. Et les cabinets d’avocats internationaux sont déjà actifs dans nos pays. Ils peuvent mobiliser des dizaines d’avocats et possèdent une grande variété d’expertises pour gérer des projets complexes, ce qui séduit nos gouvernements et nos entreprises. Nos structures ne soutiennent pas la comparaison : la plupart ne comptent pas plus de dix professionnels dans leurs rangs.
Jusqu’alors, ces géants du droit se sont appuyés sur des cabinets locaux réputés. Mais l’étape suivante, actuellement en marche, est leur implantation directe. Après Johannesburg et Casablanca, l’Afrique francophone est leur prochaine cible. Est-ce une menace ou une opportunité pour nous ?
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À l’heure où le continent nourrit des ambitions d’émergence, abordons ce sujet sans corporatisme frileux ni protectionnisme aveugle. Singapour est passé d’un régime d’interdiction totale des cabinets d’avocats internationaux à une autorisation contrôlée. Le Brésil demeure réticent à accueillir ces firmes sur son sol, mais en Inde, le ministère de la Justice étudie les conditions d’une ouverture graduelle.
Le raisonnement de ces puissances du Sud est simple : il faut rassurer financiers et investisseurs, qui recherchent dans chaque pays où ils opèrent des conseillers de niveau international pour les accompagner. L’Afrique francophone, qui ne fait plus exception à cette exigence, ne peut pas répondre partout à ce niveau d’expertise. Et le transfert de ce savoir-faire ne saurait s’envisager sans l’ouverture des frontières de nos barreaux, mais dans le respect de nos règles !
Il faut réformer la profession d’avocat pour en faire un instrument d’attractivité. Le libre établissement des cabinets d’avocats de l’UEMOA (Union économique et monétaire ouest-africaine) dans tous les pays de la zone à partir de 2015 est une avancée importante. Pourquoi ne pas instaurer également des mécanismes de financement pour les jeunes avocats qui s’installent, appliquer une fiscalité incitative ou garantir l’implication systématique des cabinets locaux dans les projets financés via des ressources publiques ? Les meilleures mesures de patriotisme économique ne pourront durablement protéger nos modestes parts de marché actuelles.
Les cabinets nationaux doivent repenser leur modèle économique, élargir le périmètre de leurs services et renforcer les capacités de leur capital humain pour affronter l’arrivée des multinationales du droit. À ce prix naîtront des cabinets panafricains incontournables qui, avec des systèmes judiciaires modernisés et plus indépendants, permettront l’édification de vraies places de droit dans notre espace francophone.
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