L’œil de Glez : George Weah à l’Élysée, jubilé de foot ou rencontre de chefs d’État ?

La liste des convives du déjeuner offert mercredi 21 février par Emmanuel Macron en l’honneur de George Weah ressemblait à une combinaison 4-3-3 pour match de gala. Le président français n’a-t-il appréhendé son homologue que par l’anecdote sportive ?

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Publié le 23 février 2018 Lecture : 3 minutes.

George Weah à Paris, le 22 février 2018 © Vincent Fournier pour Jeune Afrique
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George Weah : les cent jours à la tête du Liberia

Il y a cent jours, George Weah prenait les rênes de l’État, faisant naître un immense espoir. Mais comment être à la hauteur d’une telle attente ? Entre annonces symboliques et tâtonnements, récit des premiers pas du footballeur devenu président.

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Un écrivain, un comédien ou même un footballeur peut donc être élu à la magistrature suprême de son pays. Mais comment ne pas être ramené constamment au statut qui vous a rendu célèbre ? En accédant à la présidence de la République tchèque, le dramaturge Václav Havel n’avait pas réussi à faire oublier une œuvre qui le valorisait intellectuellement. Assis dans le fauteuil de la Maison-Blanche, Ronald Reagan, lui, n’eût au contraire guère de peine à faire oublier les mauvais westerns dans lesquels il avait interprété un rôle, tant sa carrière cinématographique n’était pas mémorable.

Le sport, facteur de développement

Quant à George Weah, si son passé glorieux de sportif fut un atout dans sa conquête politique, ne serait-ce qu’en termes de notoriété, il souhaite certainement qu’on ne le réduise pas continuellement à son ballon d’or. Les capacités intellectuelles et la solidarité avec les démunis ne sont pas des qualités qu’on associe spontanément aux footballeurs…

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Le nouveau président du Liberia n’y a pas pourtant pas coupé, à l’occasion de son premier déplacement présidentiel hors d’Afrique. Sous les ors de la République française –dont il détient la nationalité–, c’est avec des spécialistes du ballon rond qu’il a partagé le menu du palais de l’Elysée : le président de la Fédération française de football (FFF) Noël Le Graët, celui de la Fédération internationale de Football Association (FIFA) Gianni Infantino, les joueurs Didier Drogba et Kylian Mbappé.

L’ancienne star libérienne du ballon rond ne veut sans doute pas être réduite à la performance de ses mollets

En prenant rendez-vous avec Emmanuel Macron, George Weah a-t-il d’abord fait vibrer la fibre supportrice du fan déclaré de l’Olympique de Marseille ? Le président du Liberia n’a pourtant joué que 20 matchs sous le maillot de l’OM, contre 55 pour Drogba. Est-ce dans la colonne « déjeuner avec les stars » (déjà alimentée par Rihanna) que le président français notera, dans ses mémoires, son déjeuner du 21 février 2018 ?

Après tout, le sport, comme facteur de développement, est un véritable enjeu politique, en parfaite cohérence avec la conférence-débat à laquelle participait l’invité libérien, la veille, au Conservatoire national des arts et métiers, autour de l’éducation et de la formation.

Alors, quoi de mieux qu’une brochette d’attaquants pour attaquer le défi de l’émancipation par le foot ? Qui plus est des attaquants de trois générations sportives différentes : 51 ans, 39 ans et 19 ans. Qui plus est des attaquants liés personnellement au continent noir.

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Le seul Ballon d’or africain de l’histoire a grandi dans un bidonville de Monrovia ; l’ex-capitaine des Éléphants de Côte d’Ivoire a connu la jeunesse de la classe moyenne de Yopougon, à Abidjan ; né à Paris, le métis vedette du PSG a eu écho des origines camerounaises de son père lui-même footballeur de niveau régional.

Entre la poire et le fromage élyséens, il a donc été question de financement de projets sportifs en Afrique – une plateforme dotée d’un budget initial de 15 millions d’euros – et de cette économie du sport qui, par son inexistence sur le continent, encourage le fantasme souvent déçu de l’expatriation à rythme forcé, notamment parmi cette jeunesse majoritaire au Liberia.

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Élu à la tête d’un pays très pauvre ravagé successivement par des guerres civiles, une épidémie du virus Ebola, la chute des prix des matières premières et la corruption endémique, l’ancienne star libérienne du ballon rond ne veut sans doute pas être réduite à la performance de ses mollets.

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