Maroc : le directeur d’Akhbar al-Youm en garde à vue pour « agressions sexuelles »
Taoufik Bouachrine comparaîtra à nouveau ce lundi devant le Parquet de Casablanca. Il a été interpellé et placé en garde à vue dans le cadre d’une enquête suite à des plaintes pour « agressions sexuelles ».
Interpellé vendredi dernier pour répondre à « des plaintes pour agression sexuelles », le directeur de publication du quotidien arabophone, Akhbar Al Yaoum Al Maghribia, s’est vu prolongé sa garde à vue de 24 heures, selon un communiqué du procureur général du roi près la Cour d’appel de Casablanca. Il comparaîtra à nouveau devant le Parquet, ce lundi 26 février, en fin de matinée, pour répondre à ces plaintes dont les auteurs sont également en cours d’audition.
« Rien à voir avec le journalisme »
Cette arrestation « n’a rien à voir avec le journalisme », a fait savoir le parquet, ajoutant qu’aucune autre personne, à part Bouachrine, n’a été arrêtée dans cette affaire. La directrice du portail féminin affilié au journal, Btissam Machkour, a bien été interpellé samedi, mais elle a pu quitter les locaux de la police judiciaire le jour même.
De même pour quatre autres employées, dont deux journalistes, – toutes des femmes- qui ont été entendues puis libérées. Maria Moukrim, la directrice de publication du site d’information, Febrayer.com,- dont Taoufik Bouachrine était actionnaire avant de céder ses parts – a annoncé sur son site qu’elle avait aussi été entendue.
Contacté par Jeune Afrique, l’avocat de Taoufik Bouachrine, Abdessamad Idrissi – qui est également membre du secrétariat général du Parti justice et développement (PJD) -, a assuré que son client, qui a vu dimanche soir, « se porte bien ». l’avocat se dit cependant incapable, pour le moment, de « donner plus de détails compte tenu du secret de l’instruction ».
« Les détails de l’affaire seront rendus publics après la comparution de mon client, ce lundi « , a-t-il affirmé. Outre Abdessamad Idrissi, trois autres avocats assurent la défense du journaliste, dont l’ancien bâtonnier de Rabat, Mohammed Ziane.
Réputé proche du PJD
Réputé proche des islamistes au pouvoir, et en particulier de leur ancien chef Abdelilah Benkirane, Taoufik Bouachrine, 49 ans, a été arrêté le 23 février par une vingtaine de policiers en civil qui ont débarqué dans son journal, situé sur l’avenue des Forces armées royales (FAR) à Casablanca.
Ils ont fouillé son bureau et confisqué les clés de la rédaction avant de les restituer le lendemain, avaient rapporté plusieurs journalistes de cette rédaction sur Al Yaoum24.com, un site d’information qui dépend du groupe médiatique de Bouachrine.
Ils ont estimé que cette interpellation ne méritait pas une telle descente musclée et que leur directeur aurait pu répondre à un avis de convocation dans des conditions normales.
En signe de soutien à son chef, le journal Akhbar Al Yaoum Al Maghribia paraîtra ce lundi avec un édito blanc.
Avec un tirage de 28 345 et une diffusion de 15 661 selon les chiffres 2016 de l’OJD Maroc, le journal Akhbar Al Yaoum Al Maghribia fait partie des publications arabophones les plus lues au Maroc en raison notamment de son ton critique à l’égard du pouvoir.
Récurrence des poursuites
Son directeur avait déjà eu maille à partir avec la justice. En 2009, il avait publié une caricature qui a été jugée offensante envers le prince Moulay Ismail, cousin du roi, et le drapeau national. Il avait alors fait l’objet de deux procès distincts : l’un, intenté par le ministère de l’Intérieur, à l’issue duquel il a écopé de 4 ans de prison avec sursis ; et l’autre, intenté par le prince lui-même, qui lui a demandé des dommages et intérêts de 3 millions de dirhams (2,6 millions d’euros) avant de renoncer à l’exécution du jugement qui a été rendu en sa faveur.
Suite à ce procès qui a marqué la scène médiatique marocaine, le journal de Taoufik Bouachrine, Akhbar Al Yaoum, a été fermé sur décision judiciaire. Pour pourvoir le ressusciter, ce dernier a été obligé d’en changer le nom, pour le baptiser « Akhbar Al Yaoum Al Maghribia« .
À la mi-février, Bouachrine a écopé d’une autre sanction : il a été condamné à verser 450 000 dirhams (40 000 euros) à deux ministres pour « diffamation ». Une condamnation qui faisait suite à des articles publiés en 2015, dans lesquels il avait accusé le ministre de l’Agriculture, Aziz Akhannouch, et son collègue aux Finances, Mohammed Boussaid, d’avoir écarté Abdelilah Benkirane, alors chef du gouvernement, de la gestion du Fonds de développement rural, un fonds public doté de 7 milliards de dirhams (environ 650 millions d’euros).
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