Tariq Ramadan : portrait en trompe-l’œil (de Glez)
Le mythe Tariq Ramadan continue de s’effriter. L’intellectuel propre sur lui n’était peut-être pas assez homologué sur le plan universitaire…
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 8 mars 2018 Lecture : 2 minutes.
Est-il utile de tirer sur une ambulance ? Alors que l’intégrité morale de Tariq Ramadan est déjà sujette à caution –l’islamologue est mis en examen pour « viol » et « viol sur personne vulnérable » et trois plaintes ont été déposées contre lui –, c’est sa légitimité universitaire qui est aujourd’hui la cible d’attaques en règles de « l’establishment ». Faut-il voir dans cette nouvelle vague médiatique la sempiternelle technique qui consiste à accuser d’une seconde rage un chien déjà stigmatisé, d’autant que celui-ci, en détention provisoire, peut difficilement se défendre sur les plateaux télévisés qu’il affectionnait tant ?
Quinze ans de présence médiatique
Comment le prédicateur égypto-suisse aurait-il pu squatter des plateaux télévisés occidentaux alléchés par ses titres universitaires, si ces diplômes étaient, au moins à l’époque de ses débuts, aussi douteux que ceux d’une ex-première dame zimbawéenne ? Les médias, que certains disaient victimes d’un « double discours » de l’islamologue, auraient-ils été abusés par des parchemins en trompe-l’œil ? C’est ce qu’a tenté d’éclaircir l’hebdomadaire français Le Point.
Il y a 15 ans déjà, sur des plateaux de télévision, des journalistes présentaient Tariq Ramadan comme « enseignant l’islam à Genève et la philosophie à Fribourg ». Or, la matière qu’il enseignait à Genève était le français, et, à croire l’enquête du Point, il donnait ses cours au collège de Saussure.
Un établissement dans lequel il provoquait d’ailleurs des grincements de dents chez ses collègues enseignants en biologie, histoire, philosophie ou gymnastique : dans des écrits de 1994, il considérait que l’enseignement d ces matières n’était pas systématiquement « en accord avec les principes de l’islam ».
Il signait tout de même ses tribunes d’un ‘professeur de philosophie et d’islamologie à l’université de Fribourg’
L’approximation du statut académique de ce « bon client télévisuel » n’est pas un détail. Tariq Ramadan le savait : il devait sa visibilité à l’apparence feutrée de son look occidental et de son discours calibré, tout autant qu’à cette carte de visite qui constitue le sésame pour accéder aux émissions télévisuelles ou aux lieux de débats et autres conférences sur des sujets « sensibles » qui font florès.
Conscient de la limite de son intervention professorale à Genève, il signait tout de même ses tribunes d’un « professeur de philosophie et d’islamologie à l’université de Fribourg ». Là aussi, le trompe-l’œil est patent.
Cours bénévole
Car sur demande du député fribourgeois Xavier Ganioz, le 26 février dernier, le rectorat de Fribourg a dévoilé que Tariq Ramadan se contentait de proposer bénévolement à l’université un exposé sur l’islam, une heure par semaine, jusqu’en 2004. Dégageant toute responsabilité quant à la construction médiatique du CV incriminé, l’université infirme alors qu’il était l’un de ses professeurs. Pas même un assistant.
Quant à la thèse de doctorat de Tariq Ramadan, consacrée à son grand-père Hassan al-Banna, fondateur des Frères musulmans égyptiens, elle aurait été refusée par l’ancien doyen de la Faculté de lettres de Genève, Charles Genequand. Reste maintenant à savoir sous quel statut exact Ramadan intervenait à l’université d’Oxford sur le thème des « études islamiques contemporaines ».
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