L’Alliance solaire internationale : quelles promesses pour les pays africains ?
Le président français Emmanuel Macron et le Premier ministre indien Narendra Modi ont coprésidé dimanche, en Inde, le premier sommet de l’Alliance solaire internationale (ASI). Objectif : promouvoir l’énergie solaire dans les pays en développement. Un défi de taille pour l’Afrique, dont une dizaine de chefs d’États avaient fait le déplacement.
« Si nous sommes là, c’est parce que nous croyons à la leçon du Mahatma Gandhi selon laquelle une once de pratique vaut mieux que des tonnes de discours ». C’est sur ces mots que le président français Emmanuel Macron a ouvert le sommet fondateur de l’Alliance solaire internationale dimanche 11 mars à New Delhi, aux côtés du Premier ministre indien Narendra Modi.
Étaient présents des dirigeants venus d’Asie, d’Océanie et également onze chefs d’États africains, parmi lesquels : Paul Kagame (Rwanda), Ali Bongo Ondimba (Gabon), Faure Gnassingbé (Togo), Mahamadou Issoufou (Niger), Ibrahim Boubacar Keïta (Mali) ou encore Roch Marc Christian Kaboré (Burkina Faso).
• L’Alliance solaire, c’est quoi ?
Nouvelle organisation internationale, l’idée d’une « alliance solaire » est née en 2015 lors de la COP21 à Paris, en France. Sa mission : accélérer le développement de l’énergie solaire dans les 121 pays se situant entre les tropiques du Cancer et du Capricorne. Un défi de taille pour la zone africaine.
Dans cette zone se trouvent les pays les plus ensoleillés au monde, mais, paradoxalement, 20 à 50% de la population n’y a pas accès à l’électricité. En Afrique subsaharienne, la Banque mondiale estimait même qu’en 2014, seule 37,4% de la population avait accès à l’électricité.
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L’Alliance solaire s’est donc fixée pour objectif précis de mobiliser 1 000 milliards de dollars pour développer 1 térawatt (TW) d’énergie solaire d’ici à 2030.
Une somme colossale que les États ne pourront pas mobiliser seuls. « Un partenariat public-privé est nécessaire », a expliqué Paul Kagame, président du Rwanda et actuellement à la tête de l’Union africaine. Et de poursuivre : « L’Alliance solaire internationale propose les outils pour atténuer les risques de défauts de paiement et envoie un signal important aux marchés : l’énergie solaire est un business viable ».
L’idée est donc d’identifier et de regrouper les projets pour faciliter leur financement. Par ailleurs, un mécanisme commun de garantie devrait être développé d’ici à la fin de cette année, a rappelé le président français Emmanuel Macron.
• Quels sont les pays africains membres ?
28 pays africains sont adhérents de l’Alliance solaire et 18 d’entre eux ont déjà ratifié le traité fondateur de l’organisation (voir la liste complète en fin d’article).
« Plus de la moitié des pays qui ont signé et ratifié le traité de l’Alliance solaire sont Africains », a justement souligné Paul Kagame à la tribune, où les chefs d’États présents ont défilé un à un.
• Que faut-il attendre de l’Alliance solaire ?
Lors de cette grand-messe, chaque dirigeant présent a rappelé, dans son style bien à lui, les enjeux du solaire dans son pays.
Les terroristes n’aiment pas la lumière », a lancé Ibrahim Boubacar Keïta
« C’est en éclairant les villages que nous créerons des emplois pour les jeunes qui n’ont qu’une issue, l’immigration », a ainsi estimé Mahamadou Issoufou, le président du Niger. « Les terroristes n’aiment pas la lumière », a de son côté lancé le président malien Ibrahim Boubacar Keïta.
Plus concrètement, le Gabon, par exemple, espère que dès la fin de l’année cette alliance aura permis, entre autres, d’engager un projet de centrale photovoltaïque de 20 mégawatts (MW). « Techniquement, nous sommes entièrement prêts mais il nous manque les fonds car il faut compter environ 1 milliard de francs CFA par MW », déclare à Jeune Afrique Patrick Eyogo Edzang, ministre de l’Énergie gabonais.
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Autre réalisation qui pourrait voir le jour d’ici fin 2018 : une plateforme digitale de mise en relation pour favoriser la réalisation de plus petits projets. Elle permettrait de connecter les villes et les villages ayant des besoins en matière de solaire avec les opérateurs industriels mais aussi des potentiels garants et financeurs.
En Afrique, il faudrait multiplier par dix la vitesse de construction de ces centrales solaires
« Le potentiel de l’énergie solaire représente quasiment 20 fois la consommation mondiale d’énergie mais le développement de la production d’énergie solaire n’est pas assez rapide, il faudrait multiplier par quatre la vitesse de construction de ces centrales solaires partout dans le monde et en Afrique, il faudrait la multiplier par dix », estime Isabelle Kocher, directrice générale du groupe Engie, à l’origine de cette initiative.
Une version pilote de la plateforme développée par Engie sera lancée d’ici la fin de l’année dans une zone géographique qui reste à déterminer.
Une organisation séduisante sur le papier mais dans laquelle certains voient plutôt une logique stratégique qui ne dit pas son nom face à la Chine, leader mondial du solaire.
« L’Alliance pour le solaire risque d’être un de ces nouveaux « machins » dont parlait le général de Gaulle à propos de ces centaines d’organisations internationales créées pour un oui ou pour un non et qu’on n’ose jamais fermer une fois qu’elles existent tout simplement par l’inertie des bureaucrates qui en vivent », juge ainsi Jean-Joseph Boillot, chercheur associé au Centre d’études prospectives et d’informations internationales (CEPII) à Paris. Et de poursuivre : « Le solaire est devenu une réalité économique tout à fait viable et elle n’a pas besoin, à mon sens, d’une énième organisation internationale ».
Si elle veut faire mentir ces analyses, l’Alliance solaire doit désormais faire ses preuves sur le terrain.
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