Côte d’Ivoire : Fraternité Matin dans la tourmente

Le directeur général adjoint du quotidien d’État ivoirien Fraternité Matin a été limogé ce jeudi, alors que depuis plusieurs mois le journal le plus lu du pays traverse une crise économique et sociale.

Une vendeuse de journaux à Abidjan, en novembre 2015. © Schalk van Zuydam/AP/SIPA

Une vendeuse de journaux à Abidjan, en novembre 2015. © Schalk van Zuydam/AP/SIPA

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Publié le 16 mars 2018 Lecture : 2 minutes.

Après plusieurs mois de crise, la sentence est tombée ce jeudi 15 mars en fin de journée : Lamine Saganogo, le directeur général adjoint de Fraternité Matin, a été limogé au terme d’un conseil d’administration extraordinaire. L’homme, qui s’occupait notamment de la gestion administrative du quotidien d’État, a été tenu responsable de ses difficultés financières.

Un départ qui va « apaiser les esprits », affirme Venance Konan

« Nous avions constaté plusieurs dysfonctionnements. Par exemple, un groupe électrogène avait été acheté 110 millions de francs CFA, alors qu’on peut en trouver pour deux fois moins cher. Le papier n’était plus acheté deux fois par an à Paris, mais toutes les trois semaines au Ghana, ce qui a fait exploser les prix. C’est absurde, surtout quand on a du mal à payer les salaires », explique Venance Konan, le directeur général du titre joint par Jeune Afrique, qui estime que le départ de son adjoint va « apaiser les esprits. » Il faut dire que les deux hommes étaient à couteaux tirés ; il est même de notoriété publique qu’ils ne se parlaient quasiment plus.

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Venance Konan, lui, reste en poste et assure qu’il « n’est pas question de démissionner ». C’est pourtant bien les têtes des deux dirigeants du journal qui étaient demandées par les principaux syndicats de journalistes, qui dénoncent leur « mauvaise gestion. »

Plan de restructuration

« FratMat », comme il est surnommé, traverse une profonde crise depuis plusieurs mois et l’annonce par le gouvernement, propriétaire du titre, d’un vaste plan de restructuration en échange de l’absorption d’une dette de 9 milliards de francs CFA. Cela fait en effet plus de dix ans que le titre accumule les difficultés financières. Ainsi, fin novembre dernier, l’exécutif ivoirien a accepté d’effacer une dette à hauteur de 5,5 milliards de francs CFA et d’apporter 3,6 milliards de francs CFA en échange de réformes.

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« Le problème c’est qu’aujourd’hui, personne ne nous a présenté ce plan de restructuration, il est temps que le gouvernement le mette sur la table. On ne sait ni ce qu’il contient, ni qui sera chargé de le mettre en œuvre », s’inquiète Guillaume Gbato, le secrétaire général du Syndicat national des professionnels de la presse de Côte d’Ivoire (SYNAPPCI). Un plan de départ important est notamment redouté.

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De médias d’État, à des médias de service public

Pour les syndicats, le malaise est plus profond. Alors que la presse quotidienne est quasi exclusivement une presse d’opinion très marquée idéologiquement, c’est la nature de Fraternité Matin – mais aussi de la Radio télévision ivoirienne (RTI) et de l’Agence ivoirienne de presse (AIP), tous détenus par le gouvernement – qui doit changer, défendent plusieurs organisations.

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« Il faut qu’on réfléchisse à une autre gouvernance, et que ces médias d’État deviennent enfin des médias de service public », estime Guillaume Gbato. Fraternité Matin est le plus vendu des 29 quotidiens disponibles en Côte d’Ivoire.

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