La junte entre deux feux
L’étau se resserre autour du général Ould Abdelaziz, le chef des putschistes qui, le 6 août, ont renversé le président Sidi Ould Cheikh Abdallahi. Sans le nommer, la France et les États-Unis ont menacé, le 28 août, de prendre des « sanctions individuelles » contre lui et ses camarades. En clair : d’imposer des restrictions à leurs déplacements et à leurs transactions financières. Deux jours plus tôt, la Mauritanie avait été suspendue de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF). Et, le 22 août, la Banque mondiale avait gelé une aide de 175 millions de dollars – un sixième du budget de la nation -, emboîtant le pas à Paris et Washington, qui, une semaine auparavant, avaient mis leur coopération avec Nouakchott entre parenthèses.
Ces sanctions en série n’ont qu’un but : la libération de Sidi Ould Cheikh Abdallahi, toujours en résidence surveillée au Palais des congrès à l’heure où ces lignes sont écrites, et le rétablissement de l’ordre constitutionnel. Un message que la communauté internationale – Nations unies, Union africaine (UA) et Union européenne (UE) confondues – répète d’une seule voix depuis le 6 août, et que, après un détour par le Quai d’Orsay le 24 août, le Gabonais Jean Ping, président de la Commission de l’UA, a personnellement transmis au général qui s’est installé dans le fauteuil de « Sidi ».
Pas de commentaire
De ses entretiens à Nouakchott, Ping n’a fait aucun compte-rendu public. Après avoir dîné avec Ould Abdelaziz le 26 août, il est arrivé à l’aéroport quelques minutes avant le décollage de son avion et s’est envolé sans faire de déclaration. A-t-il suggéré à son interlocuteur de rétablir dans ses fonctions le président déchu – auquel il a pu rendre visite -, puis de quitter le pouvoir en échange d’une immunité pour lui-même et ses complices ? Ou bien s’est-il borné à lui conseiller de libérer Sidi, de fixer la date de nouvelles élections et de prendre l’engagement de ne pas s’y présenter ?
En ces temps de guerre contre le terrorisme, il n’est pas sûr que la communauté internationale trouve un intérêt au retour au pouvoir d’un homme que les chancelleries occidentales ont tendance à juger trop tendre avec les islamistes.
Le 28 août, une source à Paris – où Ping est repassé avant de rejoindre Addis-Abeba – laissait entendre qu’une libération de Sidi était proche. Un avis qui n’est pas partagé à Nouakchott. « Les militaires n’ont aucun intérêt à abattre cette carte maintenant », estime un haut fonctionnaire. Ce serait en effet capituler devant le Front national pour la défense de la démocratie (FNDD), la coalition de partis loyalistes qui a immédiatement condamné le coup d’État.
La junte s’efforce en effet d’élargir les soutiens dont elle dispose. Malheureusement (pour elle), après avoir laissé entendre qu’ils pourraient participer au gouvernement – dont la composition n’était toujours pas connue au moment où ces lignes sont écrites -, le Rassemblement des forces démocratiques (RFD) et l’Alliance pour la justice et la démocratie (AJD) se sont finalement rétractés. Les raisons de ces défections, qui privent la junte d’une précieuse caution politique, sont identiques : le refus du général Ould Abdelaziz de fixer une date pour des élections et de s’engager à ne pas être candidat. Les putschistes n’ont eu aucun mal à prendre le pouvoir. Ils en auront peut-être davantage à le conserver.
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