Notre ami Jacques Chirac

Souvent difficiles, parfois conflictuels, les rapports entre Paris et les trois capitales nord-africaines ont connu une spectaculaire amélioration depuis 2002. La visite du président français à Tunis, les 3 et 4 décembre, en fournit une nouvelle illustrat

Publié le 1 décembre 2003 Lecture : 15 minutes.

Jacques Chirac sera à Tunis du 3 au 6 décembre. D’abord en visite d’État, ensuite pour participer au premier sommet des chefs d’État et de gouvernement des pays de la Méditerranée occidentale (le sommet « 5 + 5 »). Ce déplacement viendra clore une année placée sous le signe du réchauffement des relations avec le Maghreb. Souvent difficiles, parfois conflictuels, les rapports franco-maghrébins ont connu ces derniers temps une spectaculaire amélioration. Depuis sa réélection, le président français s’est transformé en apôtre du dialogue entre les cultures, un dialogue qu’il a d’abord expérimenté avec le Maghreb. Pari gagnant : les images de son triomphe dans les rues d’Alger et d’Oran, début mars, resteront longtemps dans les mémoires. Son voyage au Maroc a été bonifié par l’annonce par le roi Mohammed VI de la prochaine réforme de la Moudawana, un pas décisif vers l’émancipation de la femme marocaine. Et la Tunisie lui réservera certainement un très bel accueil. Bref, après des années de crispation et de rendez-vous manqués, « tout baigne » entre Paris et les trois capitales maghrébines.
La France n’est pas de retour, car en réalité elle n’a jamais déserté le Maghreb. Même si le manque de chaleur dans les relations bilatérales a pu un temps le laisser croire. Les Français, qui ont d’énormes intérêts dans les trois pays (voir tableaux), conservent des positions économiques solides, malgré l’apparition des nouveaux concurrents que sont l’Espagne et, dans le cas de la Tunisie, l’Italie. Les tentatives américaines de pénétration, qui se sont traduites par une quasi-éviction des compagnies françaises du secteur pétrolier algérien, ont été suivies avec beaucoup d’attention, mais sans émotion à Paris. Car, pour l’instant, elles se sont heurtées à leur irréalisme. Le Maghreb n’intéresse les Américains qu’à partir du moment où il est unifié et forme un ensemble cohérent. Et toute la politique de Washington, depuis le lancement de l’initiative Eizenstadt, dans la deuxième moitié des années 1990, a précisément consisté à essayer de rallier les trois États à cette idée de grand marché. En vain. Au contraire, la France de Chirac a pris son parti du morcellement et de la division. Elle n’essaie plus de promouvoir une approche globale, comme avait pu le faire en son temps François Mitterrand, en poussant à la constitution de l’UMA, la désormais fantomatique Union du Maghreb arabe. Sa politique maghrébine consiste en une superposition de politiques bilatérales très poussées.
Longtemps caractérisée par une certaine ambivalence, avec, d’un côté, le soutien aux régimes en place, au nom des impératifs de stabilité, et, de l’autre, des critiques à peine voilées, au nom de la défense des droits de l’homme, la politique française vis-à-vis de chacun des pays du Maghreb est devenue plus cohérente depuis le 11 septembre 2001. La fin de la cohabitation, qui a rendu sa liberté d’action au chef de l’État, a permis à Jacques Chirac de recoller les morceaux avec Tunis et Alger, où l’on goûtait modérément le côté « donneurs de leçons » des socialistes. Au contraire de Lionel Jospin, le président français cultive depuis longtemps et sans complexe ses amitiés arabes. Les dirigeants du Maghreb voient en lui un partenaire sûr et un allié attentionné. Les opinions publiques apprécient ses postures gaulliennes. Bref, il a réussi un quasi sans-faute diplomatique. Résultat : la France est aujourd’hui l’amie de tout le monde. Elle entretient d’aussi bons rapports avec l’Algérie qu’avec le Maroc, ce qui est une première. Et les relations franco-maghrébines, même si elles restent marquées par des différences assez profondes d’un pays à l’autre, ont accompli d’énormes progrès en l’espace d’une année. Tour d’horizon, pays par pays.

Maroc
Une tendresse particulière
Quel est le point commun entre Hubert Védrine, Dominique de Villepin, Dominique Strauss-Kahn et Élisabeth Guigou Quel est le point commun entre Hubert Védrine, Dominique de Villepin, Dominique Strauss-Kahn et Élisabeth Guigou ? Ils sont tous nés au Maroc et ont tous conservé pour la terre qui les a vus naître une tendresse particulière. Le hasard ? Peut-être. Mais il fait bien les choses. Car il existe entre la classe dirigeante française et le royaume chérifien des affinités qui doivent moins à la raison qu’aux sentiments. Et qui expliquent très largement le traitement privilégié dont a toujours bénéficié le pays de la part des autorités françaises. Les idées du maréchal Lyautey, le premier résident général de France au Maroc, l’organisateur d’un « protectorat respectueux des traditions et de la monarchie », ont eu un impact considérable auprès des élites militaires et politiques françaises. Elles n’ont pas peu contribué au développement du tropisme promarocain en France. Les conditions finalement assez pacifiques dans lesquelles Edgar Faure et le futur Mohammed V ont négocié, en 1955, l’accession du royaume à l’indépendance ont renforcé encore cette inclination naturelle. Les Français ont voulu retenir de leur aventure marocaine l’idée qu’ici au moins leur action avait été comprise et appréciée. Ils ont aussi su gré au sultan d’avoir tu ses rancoeurs à l’égard de la puissance occupante pendant la Seconde Guerre mondiale et d’avoir décliné les offres allemandes ou américaines pour choisir la France libre. Mohammed V est d’ailleurs l’unique chef d’État étranger à avoir été élevé par Charles de Gaulle à la dignité de compagnon de la Libération.
Une fois leur pays indépendant, les souverains alaouites ont porté une attention extrême au maintien de bonnes relations avec la France. Hassan II s’est presque toujours efforcé de rester le plus proche possible des milieux dirigeants hexagonaux, de garder des contacts informels à un bon niveau et de conserver des liens étroits et cordiaux avec ses amis français, même quand il pouvait être brouillé avec de Gaulle ou Mitterrand. Ses demeures, par exemple le château de Betz, dans les environs de Paris, et bien sûr le célèbre palace de la Mamounia, à Marrakech, ont vu défiler le gratin de l’intelligentsia française. « Hassan II était d’autant plus attentionné avec ses hôtes français qu’il considérait les États-Unis, avant la France, comme l’interlocuteur privilégié du Maroc, se souvient le journaliste Paul-Marie de La Gorce. Il a pris un soin extrême à ne surtout pas froisser les Français, et à ne surtout pas suggérer que la France a pu, à un moment ou un autre, passer au second plan. »
Cette stratégie a été extraordinairement payante. Politiquement, quand le président Giscard d’Estaing a décidé, en 1975, de soutenir les revendications marocaines sur le Sahara, quitte à se fâcher avec Alger. Économiquement aussi, puisque la France n’a jamais lésiné sur l’aide, satisfaite que soient préservés le statut de sa langue et son rôle dans la formation des élites marocaines. La vingtaine d’établissements de la mission française scolarisent près de 20 000 élèves au Maroc, et personne, sauf peut-être les religieux du Parti de la justice et du développement (PJD), le parti islamiste officiel, n’y trouve à redire. À aucun moment les liens privilégiés unissant la France au royaume n’ont été remis en question.
La relation franco-marocaine, un temps compliquée par le grand déballage médiatique autour du livre de Gilles Perrault Notre Ami le roi, a retrouvé son cours chaleureux à la fin du règne de Hassan II. Érigé en modèle de transition démocratique après l’alternance de 1997, le Maroc joue maintenant sur du velours et jouit d’une image excessivement positive. Ses dirigeants sont reçus avec tous les honneurs. En 1996, Hassan II a été le premier chef d’État arabe à s’exprimer à la tribune de l’Assemblée nationale. Et, quelques jours à peine avant sa mort, il a pu assister au défilé des soldats de sa garde sur les Champs-Élysées, pendant les fêtes du 14 Juillet 1999.
Avec l’intronisation de Mohammed VI, les rapports franco-marocains ont pris une tournure encore plus intime. Jacques Chirac, qui ne cache pas sa fascination pour le Maroc, a pris sous son aile le jeune roi. Entre le président français et le souverain alaouite, les rapports débordent d’ailleurs largement le seul cadre du politique : Jacques et Bernadette Chirac font pratiquement partie de la famille. Ils ont été les seuls étrangers à faire la connaissance de Lalla Salma, la future épouse du roi, avant l’annonce des préparatifs du mariage. Un geste qui en dit long sur le degré de confiance entre Paris et Rabat.

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Algérie
« Séparés par une histoire
commune »…
Entre l’Algérie et la France, rien n’a jamais été simple. Et rien ne pourra jamais l’être, car les deux pays sont « Entre l’Algérie et la France, rien n’a jamais été simple. Et rien ne pourra jamais l’être, car les deux pays sont « séparés par une histoire commune ». La formule, tirée d’un éditorial du Monde consacré à la première visite d’État d’un président français en Algérie, résume parfaitement l’ambiguïté des rapports franco-algériens. Marquées par le poids de l’Histoire, les relations de la France avec son ancienne colonie ont connu plus de bas que de hauts. Du côté algérien, où plus des trois quarts de la population est née après l’indépendance, on semble avoir tourné la page de la guerre de libération. En revanche, on a plus de mal à admettre les malentendus qui ont émaillé les années 1990.
Décembre 1991 : l’armée algérienne décide d’interrompre le processus électoral pour empêcher le FIS (Front islamique du salut) de s’emparer du pouvoir. Stupeur à Paris, et réprobation immédiate. « Le risque islamiste préoccupait beaucoup, se souvient l’amiral Jacques Lanxade, à l’époque chef d’état-major des armées et proche de François Mitterrand. Mais la diplomatie française était presque dogmatique, les coups d’État étaient considérés comme critiquables en première analyse. Et on a peut-être cru qu’il pouvait exister une autre voie que celle choisie par les militaires. » Avec Alger, c’est la fracture. En France, le pessimisme domine. Le sentiment se répand, dans la classe politique et dans la presse, que l’État algérien ne résistera pas à l’assaut islamiste, que la population est massivement favorable aux barbus, et que l’armée éclatera si elle ne bascule pas dans le camp du FIS.
On sait ce qu’il est advenu… La France, rapidement, est prise pour cible par les terroristes du GIA. À travers ses ressortissants installés en Algérie, mais aussi par le détournement d’un Airbus d’Air France, en décembre 1994, et par des attentats en plein coeur de Paris, pendant l’été 1995. Pourtant, dans la presse, mais aussi dans les cercles dirigeants français, c’est l’armée algérienne qui est critiquée et se retrouve sur le banc des accusés. La fracture avec l’Algérie atteint des proportions inquiétantes. Il faudra attendre le 11 septembre 2001 pour que les derniers doutes cultivés en France sur le bien-fondé de l’approche sécuritaire du problème islamiste soient définitivement balayés.
Quand Jacques Chirac arrive aux affaires, en 1995, il veut mettre un terme à la brouille entre les deux pays. Il a fréquenté (un peu) le général de Gaulle et (beaucoup) Georges Pompidou. Il a aussi servi en Algérie, pendant la guerre. Par filiation, par instinct et par réflexion, il est convaincu de la nécessité de bonnes relations entre la France et son ancienne colonie. La présence de Liamine Zéroual, son homologue algérien, au sommet du cinquantenaire de l’ONU, à New York, en septembre 1995, est un prétexte tout trouvé pour une rencontre. Mais Chirac est mal conseillé. Pour « éviter d’interférer avec la campagne présidentielle algérienne », et pour ne pas donner l’impression de cautionner le régime, il fait expliquer par avance que « la France sera attentive à la régularité des scrutins présidentiel et législatif de novembre ». On grimace à Alger. Et quand Chirac explique qu’il ne veut pas se laisser photographier avec Zéroual, c’est le clash, et la rencontre est annulée. Le président français comprend qu’il a été induit en erreur quand il constate que les élections se passent bien et que la participation est massive, y compris dans les consulats algériens de France.
Avril 1999 : Abdelaziz Bouteflika est élu à la présidence, mais, la veille du scrutin, ses six concurrents se sont désistés. Dans un communiqué, le Quai d’Orsay porte un jugement assez acide sur les conditions de son élection. Quand l’ambassadeur de France à Alger le découvre, il est atterré : la France est en train de gâcher toutes les chances de relations convenables avec Bouteflika. Il prend le premier avion vers Paris pour convaincre les autorités de corriger le tir. Message reçu à l’Élysée, où Chirac va multiplier les discrètes ouvertures en direction du nouvel élu. C’est la décrispation, d’autant que Bouteflika, lui aussi, veut normaliser au plus vite les rapports avec la France, qui reste toujours le premier partenaire économique de son pays. L’Algérien, rompant avec tous les usages, décide de s’exprimer en français, sans fausse pudeur. Il trouve les mots justes pour parler de l’Histoire et des sujets sensibles comme les communautés pied-noir et israélite. Sa visite en France en juin 2000 marque le début du rapprochement. En octobre 2002, il s’invite à Beyrouth pour le sommet de la Francophonie.
Cette fois, c’est sûr, le processus de réconciliation est bel et bien sur les rails. Entre-temps, les Français ont évolué, finissant par abandonner leurs préventions à l’égard de l’Algérie. Ils ont rouvert consulats et centres culturels, les hommes d’affaires de l’Hexagone ont retrouvé le chemin d’Alger, où Air France vient de rouvrir son escale. Jacques Chirac saisit l’occasion des inondations de Bab el-Oued pour rendre visite aux sinistrés. Il y est acclamé, et son geste fait date. Mais le point d’orgue de la réconciliation est atteint du 2 au 4 mars 2003, pendant la visite d’État du président français à Alger et à Oran : c’est un triomphe.
Chirac et Bouteflika ne sont peut-être pas les meilleurs amis du monde et leur rapprochement tient plus du mariage de raison que du mariage d’amour. Mais ils ont besoin l’un de l’autre. Chirac est convaincu que l’Algérie est un pays clé sans lequel rien n’est possible au Maghreb. La relation dont il nourrit le dessein doit aussi avoir valeur d’exemple pour le monde : la France rejette complètement la notion américaine de choc des civilisations et l’idée d’un divorce Orient-Occident. Et y a-t-il meilleur terrain que l’Algérie pour passer de la parole aux actes ?
L’enjeu de ce rapprochement est également vital à plus d’un titre pour le président Bouteflika. Le soutien réitéré de la France aux thèses marocaines sur le Sahara ne lui pose pas de problèmes. L’Algérie a intégré cette donnée depuis longtemps. « Il peut se permettre d’être conciliant, observe l’historien Benjamin Stora, car, pour l’instant, c’est le plan Baker, proche des vues algériennes, qui a le vent en poupe. » Et Bouteflika ne veut pas risquer de casser la dynamique franco-algérienne. La normalisation sert à la restauration de l’image de l’Algérie à l’étranger. Elle est riche de promesses sur le plan économique, que ce soit en aides directes ou via Bruxelles. Last but not least, cette réconciliation historique sera portée à son crédit dans le duel incertain qui l’opposera à son ancien Premier ministre Ali Benflis à la présidentielle de 2004…

Tunisie
Fini les malentendus ?
Comme le Maroc, la Tunisie, modèle de décolonisation réussie, a longtemps bénéficié des faveurs de la France. Le pari bourguibien de la modernité, qui s’est traduit par la libération de la femme, le contrôle des naissances, la généralisation de l’enseignement, et, à partir de 1972, le choix de l’économie de marché, a attiré énormément de sympathies françaises. Le « Comme le Maroc, la Tunisie, modèle de décolonisation réussie, a longtemps bénéficié des faveurs de la France. Le pari bourguibien de la modernité, qui s’est traduit par la libération de la femme, le contrôle des naissances, la généralisation de l’enseignement, et, à partir de 1972, le choix de l’économie de marché, a attiré énormément de sympathies françaises. Le « miracle économique » à l’oeuvre depuis le changement intervenu à la tête de l’État avec le remplacement, au matin du 7 novembre 1987, d’un Habib Bourguiba vieillissant par son Premier ministre Zine el-Abidine Ben Ali, a suscité une admiration non feinte dans les milieux d’affaires français. Enfin, la beauté des plages, la richesse du patrimoine archéologique, la douceur de vivre et la qualité de l’accueil ont fait du pays du jasmin l’une des destinations favorites des vacanciers de l’Hexagone (un million de visiteurs par an), qui reviennent généralement enchantés de leur séjour. Pourtant, la Tunisie et la France sortent d’une période de crise larvée.
Pendant la première moitié des années 1990, les rapports franco-tunisiens ont été largement dominés par la question algérienne. Ben Ali, engagé dans une lutte sans merci contre les islamistes d’Ennahda, a su négocier un soutien inconditionnel de ses partenaires occidentaux. Car il n’était de l’intérêt de personne de voir la Tunisie passer sous la coupe des intégristes et se transformer en base arrière des maquisards algériens de l’AIS et du GIA. Chacun, dans un premier temps du moins, a préféré considérer l’évolution du régime tunisien et sa coloration policière comme des maux nécessaires. C’est une fois la victoire sur les barbus définitivement acquise que les choses ont commencé à changer.
Ce sont les commentaires acides de la presse française sur la situation des droits de l’homme en Tunisie et le déroulement des élections qui ont déclenché les hostilités. Indignés par cette « insupportable manifestation d’arrogance », les responsables tunisiens ont crié à la campagne de dénigrement. Et quand quelques critiques formulées par les médias ont trouvé un écho dans des commentaires pourtant très mesurés du Quai d’Orsay, notamment lors de la grève de la faim du journaliste Taoufik Ben Brik, les rapports diplomatiques se sont brusquement crispés. Pour manifester sa mauvaise humeur, la Tunisie a décidé d’ouvrir le débat sur le statut de la langue française en décrétant l’arabisation des enseignes publicitaires. « Dans cette histoire, l’essentiel n’a jamais été menacé, et la coopération jamais remise en question, estime l’amiral Jacques Lanxade, ancien ambassadeur de France à Tunis. Mais les deux parties sont insidieusement entrées dans un jeu de provocations inutiles. La Tunisie ne ressemble pas aux descriptions très excessives qu’on a pu lire dans les journaux. Les problèmes, qui existent, concernent des cas qui se comptent sur les doigts des deux mains. Mais les autorités de ce pays n’ont pas pris assez en compte les conséquences en termes d’opinion publique internationale de certaines de leurs décisions. Elles se sont entêtées là où elles auraient pu faire preuve de davantage de doigté pour dégonfler des affaires montées en épingle. Et la France, par moments, a surréagi… »
La cohabitation n’a rien arrangé. Car, entre Lionel Jospin, le Premier ministre socialiste, et les autorités tunisiennes, le courant n’est jamais passé. À Tunis, où il n’était pas vraiment en odeur de sainteté, à l’inverse du « grand ami Jacques Chirac », on lui reprochait pêle-mêle sa tiédeur à l’égard des Arabes, ses réticences à venir en visite en Tunisie et, surtout, la complaisance de son parti à l’égard des thèses des opposants de la dissidence démocratique. L’ex-Premier ministre français n’a pas fait beaucoup d’efforts pour gagner la confiance des Tunisiens. Mais les torts sont largement partagés. Car, de l’aveu même d’un ambassadeur tunisien, il existait de solides préjugés à son égard, comme il avait d’ailleurs pu en exister en 1981 à l’égard de François Mitterrand. Au lieu de chercher à les dépasser, la Tunisie a donné le sentiment d’appuyer ostensiblement Chirac et de choisir son camp.
La conjugaison des effets du 11 septembre 2001 et de la réélection de Jacques Chirac en 2002 a effacé d’un coup de baguette magique les contentieux accumulés depuis 1999. La presse française, qui a maintenant d’autres chats à fouetter, en Afghanistan ou en Irak, a calmé ses « attaques ». Les relations bilatérales ont retrouvé toute leur qualité, et sont aujourd’hui qualifiées d’excellentes. À Tunis, Jacques Chirac arrivera en terrain ami. Même si, actualité oblige, il risque de se voir obligé d’aborder des sujets qui fâchent…

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