L’œil de Glez : premier tour de la présidentielle égyptienne et énième tour de vis sur la presse

En Égypte, les trois jours de vote du premier tour de l’élection présidentielle ont débuté le 26 mars. Un scrutin pénible à couvrir pour la presse. La correspondante du Times vient d’être expulsée.

L’œil de Glez © Glez / J.A.

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Publié le 27 mars 2018 Lecture : 2 minutes.

La quasi-certitude du maréchal Abdel Fattah al-Sissi de se succéder à lui-même ne semble pas détendre son gouvernement. Une fois de plus, la liberté de la presse en fait les frais. Samedi dernier, à 48 heures de l’ouverture des bureaux de vote pour le premier tour de la présidentielle égyptienne, le journal britannique The Times annonçait l’expulsion de sa correspondante en Égypte. C’est après une arrestation, il y a trois semaines, et une détention que le quotidien affirme que, « sans charges » et « sans explication », Bel Trew a été « conduite à l’aéroport par la police et obligée de prendre un vol pour Londres ». Son interpellation jugée énigmatique faisait suite à la diffusion d’une interview, réalisée par la journaliste, du parent d’un homme décédé sur un bateau de migrants.

L’employeur de la journaliste expulsée déplore la suspension de sa couverture journalistique en Égypte, mais aussi une « tentative d’intimidation ». Bel Trew, qui vivait depuis sept ans en Égypte, affirme que son matériel a été confisqué, qu’elle figure sur une « liste de personnes indésirables » et qu’elle a fait l’objet d’une menace de « procès militaire », procédure habituellement réservée aux hommes en tenue ou aux suspects de terrorisme. Déjà remontées, ces derniers temps, contre les pouvoirs jugés aussi autoritaires que démocratiques, les autorités britanniques ont instruit leur ministre des Affaires étrangères, Boris Johnson, pour qu’il s’entretienne avec son homologue égyptien Sameh Choukri sur cette expulsion.

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Un « environnement oppressant créé par le président Sissi contre la presse »

Quant au Times, il a agrémenté son indignation publique de la dénonciation d’un « environnement oppressant créé par le président Sissi contre la presse ». Si la Constitution égyptienne de 2014 garantit la liberté de pensée, d’opinion, de la presse, de la création artistique et littéraire, il est clair que le président-candidat – largement bénéficiaire d’une bienveillance médiatique à son arrivée – est devenu encore plus chatouilleux que ses prédécesseurs.

En amont, le pouvoir égyptien organiserait des sessions de formation journalistique qui frisent le conditionnement idéologique

De nombreux observateurs indépendants dénoncent une tentative de contrôle arbitraire de toutes les formes d’expression publique, et même un musellement progressif des médias. En amont, le pouvoir organiserait la désinformation par l’achat de groupes de presse, mais aussi par des sessions de formation journalistique qui frisent le conditionnement idéologique, notamment sur les questions sensibles de la sécurité nationale, des disparitions forcées ou de la torture.

En aval, il ramène au goût du jour les bonnes vieilles méthodes de la censure a priori et de la répression a posteriori, notamment depuis la création de la « Cour suprême pour l’administration des médias » dont la présidence est désignée par Sissi lui-même. Lorsque ces deux ressorts sont mis à l’index, notamment de l’étranger, il ne reste qu’à dénoncer une conspiration contre les fondements de l’État. Complot ourdi – cela va sans dire – de l’extérieur du pays.

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