Bagdad d’hier et d’aujourd’hui
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Avenue Saadoun, à Bagdad, devant une épicerie où les « gens bien » de la capitale viennent s’approvisionner, les passagers d’une luxueuse Buick diplomatique attendent que le chauffeur ait terminé les achats. Un garçon de 12 ou 14 ans, chétif, s’approche : « N’avez-vous pas besoin d’un domestique ? Je fais tout et bien, sauf la cuisine. Je ne vous demanderai rien. De quoi manger, c’est tout… du pain frais, des olives ou des dattes. Je vous promets, Madame, que vous serez en tout point satisfaite. La lessive, la vaisselle, le marché, le repassage, les enfants, le parquet, le jardin, je sais faire tout
cela… » Madame et monsieur, mademoiselle et les enfants paraissent touchés, mais ils ne peuvent rien. À Bagdad, l’une des villes les plus chères du monde, on peut manquer de tout sauf de domestiques.
Une heure plus tard, j’écoute un colonel parler au téléphone avec le capitaine qui dirige une prison de la banlieue de Bagdad : « Ma voisine s’inquiète de son mari qui a quitté son foyer le 18 novembre 1963. Cet homme serait-il parmi les détenus ? Serait-il mort ? Elle attend depuis deux jours à la porte de mon bureau. Veuillez me renseigner »
Une heure plus tard, la voisine est rassurée : « Votre mari est bien mort, mais on ne saurait vous indiquer le lieu où il a été enterré… »
C’est cela l’Irak de 1963 : beaucoup de malheurs, de déceptions et, toujours, une misère immense.
« Pensez-vous que le nouveau régime du général Aref ait de réelles chances de se maintenir au pouvoir ? » ai-je demandé à de nombreux Irakiens rencontrés au hasard. L’impression qui prévaut aujourd’hui est qu’après tout ce qui vient de se passer, rien
n’empêchera plus l’officier frondeur de tenter son propre coup d’État
C’est la nausée, dominée par ce sens terrible de la fatalité que l’on retrouve partout, à travers toutes les attitudes de la vie quotidienne.
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