Assourdissante révélation

Publié le 1 décembre 2003 Lecture : 2 minutes.

La presse française ne parle plus que de cela : le président Jacques Chirac, qui a fêté ses 71 ans le 29 novembre, porte-t-il un appareil auditif ? C’est L’Express qui, le premier, a lancé le débat. Dans son édition du 6 novembre, l’hebdomadaire indique, de source ministérielle, que l’oreille gauche du chef de l’État est discrètement appareillée. Les autres journaux ne tardent pas à lui emboîter le pas.
Si cette probable presbyacousie fait tant de bruit, c’est surtout parce qu’elle pose, une fois de plus, le problème de la communication autour de la santé présidentielle. Roselyne Bachelot, la ministre de l’Écologie, a d’ailleurs fait les frais de ce secret de polichinelle. Interrogée sur RTL le 19 novembre, la ministre en tailleur rose vend la mèche. À la question de savoir si le président porte des oreillettes, elle répond benoîtement : « Il me semble que oui. » Elle est aussitôt réprimandée par Chirac et par Matignon pour « son bavardage excessif ».
Or, à présent que l’impair est commis, impossible pour l’Élysée de garder plus longtemps le silence. Quelques heures après l’assourdissante révélation de Roselyne Bachelot, Jean-François Copé, le porte-parole du gouvernement, dément formellement : « Il n’en porte évidemment pas », lance-t-il sur un ton presque méprisant tandis que l’entreprise d’appareils auditifs Entendre profitait de l’aubaine pour lancer une campagne de publicité visant à dédramatiser le phénomène de surdité en mettant justement en scène le président… LÉlysée n’a pas apprécié.
En France, le premier magistrat se doit d’afficher une santé éclatante. Surtout quand il s’appelle Jacques Chirac et qu’il s’est bâti l’image d’un homme dynamique. Remarquez, il n’a toujours pas de cheveux blancs, est constamment hâlé et ne porte que très rarement des lunettes. Ce jeune septuagénaire n’a pas non plus envie de revivre le calvaire de son prédécesseur, François Mitterrand, qui a longtemps dissimulé son état de santé, tout comme Georges Pompidou avant lui. Dès son accession au pouvoir, en 1995, il a donc supprimé la publication régulière du bulletin de santé. Seuls les « sages » du Conseil constitutionnel en sont avisés et peuvent prononcer l’empêchement du chef de l’État. Mais, à force de ne pas communiquer – même s’il s’agit là d’une stratégie tout à fait chiraquienne qui se contente souvent des deux rendez-vous médiatiques annuels du 14 juillet et du 31 décembre -, l’Élysée a réussi à faire d’un petit ennui d’ordre privé une affaire d’État.

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