L’œil de Glez : le Sahara progresse dans un désert médiatique
Une étude sur le long terme dévoile la réalité de l’expansion du principal désert africain. Les causes sont aussi connues que les solutions. Mais les lanceurs d’alerte prêchent dans… le désert.
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 4 avril 2018 Lecture : 2 minutes.
Pauvre Sahel. Déjà empêtrée dans son casse-tête politico-terroriste, la région cède inlassablement du territoire au Sahara qui la jouxte. Car le désert qui avance n’est pas qu’une image de chanteur tiers-mondiste. Ce sont les scientifiques de l’université du Maryland qui viennent de confirmer l’expansion d’un Sahara déjà presque aussi vaste que les États-Unis.
L’étude financée par la National Science Foundation et publiée dans la revue The Journal of Climate indique que la taille du désert chaud le plus grand du monde aurait augmenté d’environ 10 % en moins d’un siècle, entre 1920 et 2013. En été, cette zone fluctuante aurait même progressé de près de 16 %. L’équipe de Sumant Nigam, professeure de sciences atmosphériques et océaniques et principale auteure de l’étude, s’est appuyée sur d’indiscutables statistiques pluviométriques, la règle étant de considérer comme désertiques les régions qui reçoivent moins de 25 centimètres de pluie par an.
Trois questions viennent spontanément à l’esprit
Première question : la progression du désert est-elle spécifique à l’Afrique ? « Probablement non », répondent les scientifiques. Même si cette étude inédite ne concerne que la partie nord du continent noir, il y a fort à parier que les autres déserts du monde, notamment subtropicaux, présentent des caractéristiques tout à fait parallèles.
Si les initiatives peu onéreuses suscitent applaudissements et récompenses dans les capitales occidentales, elles reçoivent bien peu d’aides financières internationales…
Deuxième question corollaire : cette tendance est-elle liée au fameux réchauffement climatique ? Selon les chercheurs, environ deux tiers de l’expansion totale du Sahara seraient dus à des cycles climatiques naturels, tels que l’oscillation atlantique multidécennale, une variation de la température de surface de la mer qui s’étend sur plusieurs décennies. Le troisième tiers serait bien le résultat des changements climatiques induits de la pollution générée par l’homme.
Troisième question : le phénomène est-il réversible, ou tout de moins susceptible d’être tempéré ? Du Mali au bassin du Tchad, la contraction de la zone sahélienne perturbe les écosystèmes fragiles des zones de prairie et le bien-être de sociétés humaines déjà malmenées.
Si des réalisations comme le reverdissement du Sahel à la daba, par des pratiques de bocage ou de zaï forestier sont vantées, elles semblent relever d’un travail de fourmi, au regard de la progression démographique d’une population largement dépendante de l’agriculture, de l’augmentation des gaz à effet de serre et de la réduction des terres arables dotées de précipitations suffisantes.
Or, si les initiatives peu onéreuses suscitent applaudissements et récompenses dans les capitales occidentales, elles reçoivent bien peu d’aides financières internationales…
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