RDC – Football : crispations entre les Léopards et le ministère des Sports
La fin du mois de mars a été très agitée au sein des Léopards. Avant le match amical en Tanzanie (0-2, le 27 mars), plusieurs joueurs ont quitté le stage, pour protester contre la mauvaise organisation du déplacement à Dar es-Salam.
La crise est bien là. On avait perdu l’habitude d’entendre les joueurs congolais se plaindre d’une organisation aléatoire, de conditions d’hébergement contestables ou de primes non versées. Le sélectionneur Florent Ibenge, et avant lui Claude Le Roy, avaient insisté auprès des autorités chargées de financer les rendez-vous internationaux des Léopards – c’est-à-dire l’État – pour que ces problèmes récurrents soient réglés. Cela semblait être le cas… jusqu’au 25 mars.
Ce jour-là, alors que la sélection nationale était à quarante-huit-heures d’affronter son homologue tanzanienne, quatre joueurs, et non des moindres, ont quitté le stage : Gaël Kakuta (Amiens, France), Arthur Masuaku (West Ham, Angleterre), Paul-José Mpoku (Standard Liège, Belgique) et Jordan Ikoko (Guingamp, France).
Ces derniers avaient exprimé tout haut ce que l’ensemble de la délégation – joueurs et staff technique – pensait tout bas. Au centre de toutes les crispations : les conditions de voyages entre Kinshasa et Dar es-Salam.
Un vol jugé trop long
Neeskens Kebano, un des cadres de la sélection, qui avait finalement tenu à affronter les Taïfa Stars, comprend le ras-le-bol de ses quatre coéquipiers. « On a voyagé dans de très mauvaises conditions. Quatre heures de vol pour aller à Addis Abeba, où nous avons fait escale pendant trois heures, et de nouveau quatre heures pour rejoindre la Tanzanie. Dix heures en tout, pour un match amical, c’est beaucoup trop ! Il aurait été préférable de prendre un vol direct. C’est déplorable », peste le milieu de terrain de Fulham (Angleterre).
L’ancien joueur du PSG s’étonne de cette situation, alors que les conditions de vie de la sélection s’étaient largement améliorées depuis plusieurs années. « C’est un gros pas en arrière ! Les choses étaient relativement bien organisées, et au niveau des résultats, cela suivait. La RDC s’est qualifiée pour les CAN 2015 et 2017, elle a failli aller à la Coupe du monde. On nous a promis que les choses allaient s’améliorer. On verra bien… », temporise Kebano, qui n’a pas annoncé vouloir se mettre en retrait de la sélection.
Au contraire de l’attaquant Firmin Mubele (Toulouse FC, France), qui n’a pas hésité à le faire à son retour en France. « Nous n’avons pas envie de revivre cela. Le coach, Florent Ibenge, était lui aussi très déçu, mais que pouvait-il faire ? », s’interroge le joueur.
Le ministre des Sports ciblé par la FECOFA
Après le départ de quatre joueurs, Papy Niango Iziamay, le ministre des Sports, a été désigné par la Fédération congolaise de football comme le responsable de cette crise. « Tous les ratés du présent stage lui sont imputés. En grande partie, il refusait de signer les ordres de mission des Léopards seniors [pour les matches en Tanzanie et au Nigeria le 28 mai, des U20 en Tanzanie le 31 mars et U 17 pour un tournoi au Cameroun, ndlr]. Il n’a pas accepté la décision du staff technique pour affréter un avion de Congo Airways, évoquant des raisons de trésorerie publique », explique un membre du service communication de la FECOFA.
Le ministère des Sports a jugé le budget trop élevé – 820 000 € selon nos sources – prenant en compte les frais de voyage des sélections et les primes des Léopards. Iziamay a fait savoir que la RDC avait d’autres priorités que le football.
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« La fédération a donc dû se débrouiller pour financer les déplacements de mars des A, des U 20 et des U 17. Les Léopards n’ont d’ailleurs pas touché leur prime. Les joueurs et le staff des A se demandent pourquoi, alors que depuis des années, on faisait en sorte de mettre en place des conditions professionnelles pour également attirer en sélection congolaise des joueurs nés en Europe. En RDC, des gens se demandent s’il n’y a pas des raisons politiques à l’attitude du ministre », intervient Domo Landu, secrétaire général de l’Union des Footballeurs Congolais (UFC), lequel rédige actuellement un rapport qu’il adressera prochainement à la Fédération internationale des associations de footballeurs professionnels (FIFPRO).
Selon une source proche d’un joueur, rien n’indique que « Kakuta, Masuaku, Mpoku, Ikoko ou Mubele accepteront d’aller affronter le Nigeria, le 28 mai prochain. Et on peut aussi supposer que d’autres joueurs décideront de ne pas y aller. Même le sélectionneur a affiché en Tanzanie des signes de lassitude… »
Florent Ibenge, qui sera en fin de contrat en juin prochain, devrait poursuivre sa mission, comme il l’avait annoncé en décembre. Mais il est régulièrement confronté à des retards dans le paiement de ses salaires.
Une réunion au palais présidentiel
La RDC, qui tentera de se qualifier pour la CAN 2019, ne prépare pas la suite des éliminatoires prévue le 7 septembre au Liberia – le Congo et le Zimbabwe sont les autres membres du Groupe G -, dans les meilleures conditions, même si le succès obtenue face au voisin de Brazzaville (3-1, le 10 juin 2017) la place dans une situation confortable.
« Le match amical au Nigeria, une équipe qualifiée pour la Coupe du monde, ce sera important, bien au-delà du résultat. Si de nouveaux problèmes surviennent, ce ne sera pas bon et des joueurs pourraient s’interroger sur la suite de leur carrière internationale. J’espère que cela va s’arranger », reprend Domo Landu.
Le 2 avril, une réunion a été organisée discrètement au palais présidentiel par Luzolo Bambi, conseiller spécial de Joseph Kabila notamment en charge de la bonne gouvernance. Constant Omari, le président de la FECOFA et Barthélémy Okito, le secrétaire général aux Sports, et dont les relations avec Ibenge sont notoirement exécrables. Pour l’instant, rien n’a filtré de cette entrevue…
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