France-Centrafrique : le Quai d’Orsay fait le ménage à Bangui
Après la convocation par le ministère français des Affaires étrangères de Christian Bader, l’ambassadeur de France en Centrafrique, son premier conseiller Eric Bosc, ainsi que le consul Anton Bialecki, viennent d’être rappelés et seront de retour à Paris cette semaine.
Ainsi que le révélait Jeune Afrique dans son édition n°2983 du 11 au 17 mars, Christian Bader, l’ambassadeur de France en Centrafrique, en poste depuis août 2016, a été convoqué par le Quai d’Orsay. Des soupçons de harcèlement envers des employés – français et centrafricains – de sa représentation pèsent sur lui. Le ministère français des Affaires étrangères a fait un signalement au parquet de Paris le 19 juin 2017. Un juge d’instruction a été nommé et une commission rogatoire, émise. L’enquête est entre les mains de la police judiciaire de Paris, qui recueille des témoignages depuis plusieurs mois.
Fin de mission anticipée
Par ailleurs, ses relations avec le président Faustin-Archange Touadéra s’étaient dégradées, son franc-parler ayant déplu aux autorités locales. « Bader parle sans filtre, ce qui est peu commun pour un diplomate », confirme-t-on à Malabo, où il a occupé les mêmes fonctions de 2015 à 2016. Selon d’autres sources, il aurait ouvertement accusé certains membres du gouvernement centrafricain de corruption.
Après la convocation de Christian Bader, c’est au tour d’Éric Bosc, le premier conseiller de l’ambassade, et d’Anton Bialecki, le consul, de faire cette fois l’objet d’un retour en « vol bleu » (une fin de mission anticipée, en langage diplomatique). Le premier devait rentrer à Paris le 10 avril, le second le 13. Motif : une politique de délivrance de visas que le ministère français des Affaires étrangères qualifie de laxiste.
Problèmes de visas
Cette affaire serait liée à celle qui, en 2015-2016, avait valu à Charles Malinas, l’ambassadeur de l’époque, et à Romain Vuillaume, son premier conseiller, de faire l’objet d’une procédure disciplinaire. Selon un document interne au Quai d’Orsay, l’inspection générale des Affaires étrangères avait constaté des « dysfonctionnements graves au sein du poste de Bangui », ainsi que la « délivrance de visas en situation de conflit d’intérêts ».
Cette inspection avait été dépêchée dans la capitale centrafricaine du 28 octobre au 1er novembre 2016, à la suite d’un signalement de Christian Bader, qui venait de prendre ses fonctions. Fin 2017, Malinas a été mis à la retraite d’office. Vuillaume, pour sa part, est aujourd’hui l’adjoint du porte-parole chargé de l’Afrique et de l’Océan indien, de la coopération de sécurité et de défense au Quai.
Depuis 2012, pas moins de trois ambassadeurs se sont succédé à Bangui
Des défaillances au sein des services de délivrance de visas ont déjà été déplorées. Dès 2007, un rapport d’information remis par Adrien Gouteyron, alors sénateur, établissait dans certains pays « une fraude et une corruption généralisée », une situation appréhendée selon lui « avec trop de naïveté et de légèreté ».
Il rappelait par ailleurs qu’à l’époque «30% à 80% des actes vérifiés [étaient] frauduleux dans des pays tels que le Sénégal, la Côte d’Ivoire, les deux Congos, le Togo, Madagascar ou les Comores ». Selon nos informations, c’est ce même constat qui a poussé l’ambassade de France en Algérie à licencier, début 2017, douze employés locaux.
Depuis 2012, pas moins de trois ambassadeurs se sont succédé à Bangui : Serge Mucetti (2012-2013), critiqué pour sa gestion du coup d’État contre François Bozizé, Charles Malinas (2013-2016) et Christian Bader.
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