L’intégration économique méditerranéenne est-elle un échec ?
C’est à cette question qu’à tenté de répondre la Coface dans une analyse publiée le 10 avril, qui met en évidence que si le commerce intra-régional méditerranéen est en perte de vitesse, les pays de la rive sud (Maroc, Tunisie) montent en gamme à travers des exportations automobiles et TIC.
La volonté de coopération commerciale dans le pourtour méditerranéen s’est accrue depuis les années 1990, souligne la Coface dans une analyse publiée le 10 avril, avec la multiplication des accords de part et d’autre de la Méditerranée, à travers le « Processus de Barcelone », les accords d’Agadir et l’Union pour la Méditerranée. Ces initiatives, à travers la baisse des barrières tarifaires, avaient pour objectif d’augmenter les échanges au sein de la région. Vingt ans après le début du processus régional de libéralisation commerciale, ce but a-t-il été atteint ?
Perte de vitesse du commerce intra-régional
Si le volume des exportations au sein de la région a augmenté d’environ 250 milliards de dollars à plus de 500 milliards entre 2001 et 2016, leur poids relatif dans le total des ventes à l’étranger des économies de la sous-région, passant de 31 % à un peu plus de 29 %. Les économies méditerranéennes sont donc moins bien intégrées entre elles que ce qu’il y a 15 ans. Le processus est donc « plutôt un échec » pour Sofia Tozy, économiste Europe du Sud et Afrique du Nord à la Coface.
Selon elle, « les printemps arabes n’ont pas favorisé le développement des échanges commerciaux », en fragilisant les économies de la rive sud de la méditerranée. La Tunisie et l’Égypte connaissent de graves déséquilibres macroéconomiques, même si « la situation s’améliore pour cette dernière depuis la libéralisation de la livre ». En conséquence, le taux d’ouverture de ces pays a diminué, passant de 71 % à 30 % du PIB. L’impact sur le commerce a été d’autant plus fort que ces économies figuraient parmi les mieux intégrées à la région.
Ce résultat en demi-teinte s’explique également par les effets négatifs liés à la multiplication des accords commerciaux préférentiels. Ces textes différents complexifient les démarches pour les exportateurs, qui sont soumis à des conditions différentes d’un texte à l’autre (normes, accords). Parallèlement, le volume de mesures protectionnistes – qu’il s’agisse de barrières tarifaires ou de mesures non-tarifaires (réglementations, normes) – a augmenté, au sud et surtout au nord de la méditerranée, avec 190 nouvelles protections mises en place par l’UE entre 2012 et 2018.
Montée en gamme des économies
En dépit de ce recul, l’étude réalisée par Coface montre que de nouvelles spécialisations sectorielles sont apparues, permettant à certaines économies du sud et de l’est de la méditerranée de monter en gamme, notamment grâce à « des politiques d’intégration dans les chaînes de valeurs mondiales ».
Alors que le Maroc n’exportait virtuellement pas de véhicules en 2000-2007, les exportations automobiles marocaines atteignait 4 % du total des ventes de véhicules intra-régionales en 2012-2016. Vers l’Égypte, elles sont passées de 1,5 % du total des exportations vers ce pays en 2000 à 79 % en 2016, et de 0,9 % du total des exportations marocaines vers la France en 2000 à 12,9 % en 2016.
De même, pour la Tunisie, les exportations liées aux technologies de l’information et de la communication (TIC) (câblages, etc) sont passées de 15 % du total des exportations tunisiennes en 2000-2007 à 28 % en 2012-2017, et de 21,3 % à 41,5 % dans les exportations à destination de la France.
Certains secteurs ont revanche connu un recul. Le plus touché a été celui du textile, avec une chute de 16 % dans le total des exportations des pays du sud de la Méditerranée à 12 % environ. « La Tunisie est le pays qui a observé le recul le plus significatif de ses exportations textiles (24 points de pourcentage entre les deux périodes), notamment en direction de la France », note l’étude.
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