Nigeria : le président Buhari traite les jeunes Nigérians de paresseux

Dans un discours, le président nigérian Muhammadu Buhari a reproché aux jeunes de son pays de ne vouloir « rien faire » et de profiter de l’argent du pétrole. Une déclaration qui a provoqué un tollé dans le pays.

Muhammadu Buhari, en mai 2015. © Sunday Alamba/AP/SIPA

Muhammadu Buhari, en mai 2015. © Sunday Alamba/AP/SIPA

Publié le 19 avril 2018 Lecture : 3 minutes.

« Beaucoup parmi les jeunes Nigérians ne sont pas allés à l’école et prétendent (…) que le Nigeria étant un pays producteur de pétrole, ils peuvent s’asseoir et ne rien faire et avoir droit à un logement, des soins de santé et une éducation gratuits », a déclaré le chef de l’État et candidat à la présidentielle de 2019, mercredi lors d’un forum d’affaires du Commonwealth à Londres.

Ses propos ont déclenché la colère des Nigérians sur les réseaux sociaux, dans un pays frappé par la pauvreté et l’absence de services publics de base, comme la fourniture d’eau courante et d’électricité, bien qu’il soit la première économie d’Afrique de l’Ouest.  Même si la croissance a connu une légère reprise l’an dernier, mais le PIB hors pétrole reste marginal, notamment en raison du manque criant d’infrastructures dans le pays.

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Jeudi matin, le hashtag #LazyNigerianYouths (« jeunes Nigérians paresseux ») était repris en boucle sur Twitter, les internautes énumérant les efforts et sacrifices consentis par la jeunesse au moment où le Nigeria traverse une période difficile sur le plan économique.

« Je dors mois de quatre heures par nuit juste pour payer mes factures et mes impôts et le gouvernement me traite quand même de paresseux », écrit ainsi Princeton, un twittos nigérian.

https://twitter.com/CLASSICNAIJA247/status/987212922182135808

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« Ça c’est la vraie définition de la paresse », rétorque en écho « God Is Able », sur fond de photos montrant des politiciens endormis.

L’opposition s’indigne

L’ancien vice-président nigérian Atiku Abubakar, 71 ans, candidat à la présidentielle du principal parti d’opposition, le PDP (Peoples Democratic Party), a lui aussi critiqué le chef de l’État. « Je ne parlerai jamais de la jeunesse du Nigeria comme de gens qui s’assoient et ne font rien », a-t-il déclaré sur Facebook, soulignant que la jeunesse est « l’épine dorsale » du pays. Le président Buhari a fait « de l’humour avec notre fierté nationale », a estimé un autre prétendant à la présidence, Adamu Garba.

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Pour le quotidien The Daily Post, l’ancien général de 75 ans « attaque » la jeunesse. En dépit du tollé qu’elles ont provoqué, les déclarations du président Buhari ne risquent guère cependant de jouer un rôle important dans l’élection présidentielle prévue l’année prochaine, estime l’analyste politique Saheed Animashaun.

« Premièrement, une énorme partie des jeunes qui vont voter ne seront pas au courant de ce commentaire », relève-t-il. « Deuxièmement, quand viendra le moment de l’élection l’année prochaine, ils auront oublié » cette affaire.

Polémiques passées

Le président Buhari a déjà suscité à plusieurs reprises des tollés dans le passé, avec des déclarations impromptues lors de voyages à l’étranger. Ainsi, en 2016, il avait déclaré au journal britannique Daily Telegraph qu’il était difficile d’« accepter » les Nigérians à l’étranger à cause de leur réputation en matière de criminalité, en particulier de trafic de drogue et de traite d’êtres humains.

Plus tard la même année, au cours d’un déplacement en Allemagne, après que sa femme Aisha eut laissé entendre qu’elle ne le soutiendrait pas pour briguer un deuxième mandat, Buhari avait déclaré : « Sa place est dans ma cuisine ». La chancelière Angela Merkel l’avait foudroyé du regard.

Le taux combiné de chômage et de sous-emploi des jeunes au Nigeria a oscillé autour de 50% fin 2017, après que le pays eut traversé la pire récession économique depuis 25 ans.

Le Nigeria, qui compte déjà plus de 180 millions d’habitants, devrait dépasser les États-Unis pour devenir le troisième pays le plus peuplé du monde avec plus de 300 millions d’habitants d’ici à 2050, selon l’ONU.

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