Comment Mohamed Ben Salmane gouverne : les révélations d’un twittos saoudien

« Mujtahidd », un twittos saoudien anonyme, révèle les dessous de l’exercice du pouvoir et de la prise de décision par le prince héritier saoudien Mohamed Ben Salmane (MBS).

Le prince Salman d’Arabie saoudite en juin 2017. © AP/SIPA

Le prince Salman d’Arabie saoudite en juin 2017. © AP/SIPA

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Publié le 4 mai 2018 Lecture : 3 minutes.

Qui se cache derrière le pseudonyme « Mujtahidd » (littéralement « Le travailleur ») ? Lancé en 2011, ce compte Twitter anonyme suivi par plus de 2 millions de twittos est devenu l’une des sources d’information majeure sur les intrigues de palais en Arabie saoudite. Mujtahid fournit rarement des documents à l’appui de ses affirmations et dit obtenir ses informations essentiellement de manière orale et anonyme, notamment par l’intermédiaire de princes. Et force est de constater qu’il est rarement démenti par les faits, au point que certains le soupçonnent d’appartenir lui-même à la famille royale.

Bien informé

Parmi ses faits d’armes, l’annonce de la promotion en juin 2017 de Mohammed Ben Salman au détriment de Mohammed Ben Nayef, l’ancien ministre de l’Intérieur, alors prince héritier ; le limogeage de Miteb Ben Abdallah, à la tête de la Garde nationale jusqu’à son arrestation en novembre ou encore, avant même l’avènement officiel de MBS, l’inflexion de la politique saoudienne vis-à-vis d’Israël, sous l’influence de Mohammed Ben Zayed, l’émir d’Abou Dhabi, très écouté par le prince héritier.

« La principale raison de son rappel à Riyad est de le garder captif avec les princes et les hommes d'affaires détenus, et de le forcer à rapatrier ses avoirs à l'étranger (ndlr, Hariri est à moitié saoudien) et qui ne sont pas liés au Liban. » « La déclaration qu'il a lue a été écrite pour lui. (Hariri) n'était convaincu ni de son contenu, ni du fait d'annoncer sa démission depuis Riyad. Comment est-il possible pour un leader politique d'annoncer sa démission depuis un pays étranger ? » © Capture d’écran Twitter.

« La principale raison de son rappel à Riyad est de le garder captif avec les princes et les hommes d'affaires détenus, et de le forcer à rapatrier ses avoirs à l'étranger (ndlr, Hariri est à moitié saoudien) et qui ne sont pas liés au Liban. » « La déclaration qu'il a lue a été écrite pour lui. (Hariri) n'était convaincu ni de son contenu, ni du fait d'annoncer sa démission depuis Riyad. Comment est-il possible pour un leader politique d'annoncer sa démission depuis un pays étranger ? » © Capture d’écran Twitter.

Fini la traditionnelle et sacro-sainte solidarité affichée entre Saoud, on ne lave plus son linge sale en famille

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Ce dernier a inauguré en novembre dernier une nouvelle approche de l’exercice du pouvoir, avec l’arrestation et la garde à vue au Ritz de Riyad de plusieurs membres de la famille royale pour des affaires de corruption. Fini la traditionnelle et sacro-sainte solidarité affichée entre Saoud, on ne lave plus son linge sale en famille. De collégial, l’exercice du pouvoir saoudien est devenu plus personnel. Au-delà de la spectaculaire et inédite opération du Ritz, la purge touche tous les corps de l’Etat, le secteur économique et les médias. Partout, MBS place ses fidèles.

>>> A LIRE – Révolutions de palais en Arabie saoudite

Nouvelles pratiques

Dans une nouvelle série de tweets, Mujtahidd révèle des détails sur ces nouvelles pratiques en cours à la tête de l’exécutif saoudien, notamment pour les attributions de postes importants.

L’exigence d’une loyauté absolue aux Saoud aurait été réduite à la fidélité au seul MBS

Mujtahid rappelle d’abord que le pouvoir précédent ne contrôlait pas moins l’attribution des postes dans le Royaume, des ministres aux officiers en passant par les directeurs de chaîne et les rédacteurs en chef des principaux médias du pays. Les Saoud disposent d’un droit de regard absolu sur ces nominations.

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La différence entre MBS et les pouvoirs précédents réside surtout, d’après Mujtahidd, dans les critères qui président à ces choix. L’exigence d’une loyauté absolue aux Saoud – et pas seulement à l’un de leurs membres – aurait par exemple été réduite à la fidélité au seul MBS, si possible au détriment des clans rivaux au sein de la famille royale.

Les critères qui mesuraient les qualités objectives des candidats seraient tout simplement oubliées : plus de Comités d’experts, ni d’examen du fichier de renseignement des candidats, comme cela se faisait sous le règne d’Abdallah.

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À en croire Mujtahidd, surjouer l’enthousiasme pour les projets pharaoniques du Roi (Vision 2030) ou être recommandé par un des proches du prince héritier, serait bien plus efficace que la compétence et le souci de l’intérêt général. S’il a un doute sur le candidat, le prince ne s’en ouvre qu’auprès de son petit cercle de fidèles, Saoud al-Qahtani, Turki al-Sheikh et Badr al-Asakir.

Les noms soufflés par l’émir d’Abou Dhabi Mohammed Ben Zayed seraient, eux, acceptés sans examen par le prince héritier, prétend Mujtahid, qui termine son thread en moquant des décisions « d’adolescent (…) qui ne se soucie pas des conséquences quand il nomme, rejette et change un fonctionnaire plusieurs fois en quelques jours ».

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