Alain Mabanckou

Originaire du Congo-Brazzaville, Alain Mabanckou est l’auteur de six recueils de poésie et de quatre romans. Le dernier, Verre cassé (éd. du Seuil), est encensé par la critique (voir J.A.I. n° 2312). Cet écrivain exigeant et qui ne cesse de se renouveler

Publié le 1 août 2005 Lecture : 2 minutes.

Jeune Afrique/l’intelligent : Votre dernier roman, Verre cassé, est inscrit sur les listes de présélection pour trois prix littéraires français, le Renaudot, le Fémina et le Goncourt. Est-ce, pour vous, la reconnaissance de la qualité de votre travail ?
Alain Mabanckou : Bien sûr, un écrivain est toujours honoré d’être sur les sélections de prix prestigieux. Je pense aussi que cela fait partie du « jeu » de la littérature. Mais je me dis qu’il va falloir que je redouble de vigilance et de sérieux dans mon travail, que je prenne le temps d’écrire avec calme et attention.
J.A.I. : Cela signifie-t-il que vous allez désormais écrire en vue de décrocher un prix littéraire ?
A.M. : Non. Mais j’écrirai en sachant que je ne suis plus regardé de la même manière. Je dois garder la tête froide et les pieds sur terre, et conserver la rigueur qui m’est naturelle dans la recherche des formes, de la thématique, du style. Si je suis récompensé, j’en serai très heureux, mais si ce n’est pas le cas, je ne me sentirai pas diminué pour autant.
J.A.I. : On parle de forme… Vous vous êtes livré à un exercice de style un peu particulier dans Verre cassé puisque le texte ne contient aucun point. Cela fait-il partie d’un plan de recherche plus vaste dans votre travail littéraire ?
A.M. : C’est un exercice de style, mais également un univers que je suis en train d’explorer. On ne raconte pas toujours une histoire juste pour le plaisir de dire comment des destins se croisent ou se séparent. J’ai constaté que le style est trop souvent négligé dans la littérature africaine contemporaine. Je vais donc poursuivre ma quête de forme, quitte à être en décalage avec ce que j’ai écrit jusqu’à présent.
J.A.I. : Quand pourra-t-on lire la nouvelle « étape » de cette recherche ?
A.M. : Je suis en train d’écrire un nouveau roman que j’espère avoir terminé d’ici deux ans et demi. Il s’inscrit, bien sûr, dans cette quête d’une forme narrative pour raconter l’histoire de personnages, dont certains me ressemblent mais qui ont peut-être davantage d’enthousiasme. Il se rapprochera de Verre cassé tout en étant différent.
J.A.I. : Deux ans et demi, mais c’est énorme !
A.M. : Oui (rires)… Il faut toujours donner au lecteur un large délai. Si le livre arrive avant, il sera d’autant plus ravi. Quand on travaille aussi bien la forme que le fond, il faut du temps, celui de la réflexion, des hésitations, du chamboulement, du recommencement. Je suis de ceux qui pensent que ce n’est pas parce qu’un texte est achevé qu’il est bon. Il faut le retravailler, se remettre en question, douter de soi pour produire quelque chose d’acceptable.

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