Qui veut suivre Alucam dans sa nouvelle stratégie ?
Le spécialiste camerounais de l’aluminium souhaite se développer dans les produits à forte valeur ajoutée… contrairement à Rio Tinto Alcan, qui se retire du capital. L’État a deux mois pour trouver un repreneur.
Le 8 octobre, l’annonce par Rio Tinto Alcan de son retrait du capital de la Compagnie camerounaise de l’aluminium (Alucam), qu’il détenait à parts égales (46,67 %) avec l’État, a fait l’effet d’un coup de tonnerre.
« Lors du conseil d’administration de l’année dernière, quand Rio Tinto avait exposé les raisons pour lesquelles il se désengageait de certaines alumineries dans le monde, il avait pourtant soutenu qu’Alucam n’en faisait pas partie », se souvient une source proche du dossier, surprise par ce revirement. Au moment où nous mettions sous presse, le conseil d’administration d’Alucam, présidé par Pierre Chenard (également vice-président de Rio Tinto Alcan), préparait une réunion pour acter le retrait du groupe minier anglo-australien.
Approches stratégiques
Si le communiqué officiel est resté très vague sur les raisons de cette décision, c’est au niveau de l’approche stratégique des deux partenaires qu’il faut chercher les principales explications.
Le gouvernement camerounais entend faire de l’aluminium l’une des pierres angulaires de l’industrialisation du pays.
Le gouvernement camerounais entend faire de l’aluminium l’une des pierres angulaires de l’industrialisation du pays, notamment grâce aux filiales Socatral (produits laminés) et Alubassa (articles de ménage et de construction). D’ailleurs, reconnaît-on chez Rio Tinto, « l’avenir d’Alucam repose sur un nouveau modèle d’affaires orienté vers la fabrication locale de produits à plus forte valeur ajoutée plutôt que sur l’exportation de métal primaire ».
Cette pérennité des activités d’Alucam (dont les dernières données financières ne sont pas connues), de même que la diversification de sa production, repose sur d’importants investissements en capitaux au cours des prochaines années.
Divergences
Or cette nouvelle vision ne s’inscrit plus dans les objectifs d’affaires de Rio Tinto Alcan, qui souhaite se concentrer sur la production de métal primaire et s’est progressivement retiré du secteur de la transformation. Par ailleurs, Rio Tinto, qui s’est engagé dans une rationalisation de sa branche aluminium depuis deux ans, a déjà cédé un certain nombre d’unités, pour la plupart issues du rachat d’Alcan, en 2007.
Désormais, Yaoundé dispose de deux mois pour trouver un repreneur. « La due diligence [audit préalable] va rapidement s’effectuer et l’on y verra plus clair vers la fin du mois de novembre », tente de rassurer un cadre du ministère de l’Industrie, des Mines et du Développement technologique.
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Nouveaux acteurs
Des acteurs de moindre envergure que Rio Tinto se sont déjà signalés, et la piste chinoise semble pour le moment privilégiée. En attendant, d’après le compromis trouvé par les deux parties, le géant minier devra céder ses parts au gouvernement pour une valeur nominale. Il reviendra ensuite aux autorités camerounaises de les revendre au futur repreneur.
Tout en reconnaissant qu’Alucam « demeure une société solvable avec un plan d’affaires qui assurera sa pérennité financière pour les années à venir », le groupe anglo-australien préfère dorénavant conserver un statut de partenaire, notamment en matière de maintenance et de commercialisation.
« Les contrats de coopération technique présentement en place seront transformés [dès le 1er janvier ] en accords d’assistance qui prévoiront que Rio Tinto Alcan sera partie intégrante des opérations d’Alucam », ajoute-t-on au sein du groupe minier. Mieux, Rio Tinto maintient sa présence au Cameroun à travers deux projets. Il est partenaire financier du premier, baptisé Nachtigal (1,4 milliard d’euros), qui consiste en la construction par Électricité de France d’un barrage de 330 MW dans le cadre de l’extension de la capacité d’Alucam (de 100 000 à 300 000 tonnes par an).
Le second, nommé Greenfield, comprend une aluminerie d’une capacité annuelle de 1 million de tonnes, un terminal minéralier à Kribi et la construction du barrage de Song Mbengué (930 MW), le tout pour 4 milliards d’euros.
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