L’inquisiteur du Calcio

Publié le 31 juillet 2006 Lecture : 2 minutes.

A 46 ans, Stefano Palazzi, le procureur de la Fédération italienne de football, n’est pas un tendre. Celui que ses proches surnomment « il Palazzo di cemento armato » (« l’immeuble de béton armé ») n’y est pas allé de main morte dans ses réquisitions à l’encontre des quatre clubs (Juventus de Turin, AC Milan, Fiorentina et Lazio de Rome) et des vingt-six personnes traduites devant la Commission d’appel fédérale dans l’affaire des matchs truqués. « Intraitable, impitoyable, inhumain » : le procureur sportif a fait l’unanimité contre lui dans la presse italienne, mais n’a pas cédé. Personnage central de ce que Sepp Blatter, le président de la Fifa, a qualifié de « plus grand scandale de tous les temps », Stefano Palazzi n’en demeure pas moins un homme énigmatique et même « fantomatique » (dixit Francesco Cossiga, ancien président de la République italienne). Il n’a d’ailleurs fait aucun commentaire et est resté plusieurs jours « barricadé » dans sa villa napolitaine après avoir remis son rapport d’enquête.
Palazzi se moque de la vindicte populaire. Lorsqu’il assiste en famille, le 12 juin 2005, à la rencontre entre Venise et Genoa au stade San Paolo, à Naples, il n’est pas un tifoso comme les autres. Deux mois plus tard, se fondant sur des écoutes téléphoniques effectuées dans un grand hôtel de Gênes, il demandera et obtiendra de la Commission d’appel fédérale la rétrogradation en 3e division du Genoa, à la suite d’une affaire de corruption concernant deux matchs de l’équipe, dont celui auquel il assistait. Depuis, ce supporteur peu ordinaire n’est pas le bienvenu dans les enceintes sportives italiennes.
Entré à 26 ans, en 1986, dans la magistrature en tant que substitut du procureur, Palazzi débute sa carrière sur les chapeaux de roues en s’attaquant à la Camorra, la mafia napolitaine. Le procès est retentissant. Puis il sort major de l’examen d’entrée à la magistrature militaire et devient, en 1996, juge d’appel. Un parcours sans faute qui lui vaudra d’être choisi par les autorités sportives italiennes comme juge de la fédération du Calcio. L’homme est connu pour n’avoir perdu aucun procès depuis 2001, et ses réquisitions sévères sont toujours suivies par la justice. Après avoir été largement suivi par le tribunal sportif de Rome le 15 juillet, Palazzi a finalement été déjugé lors de l’appel du 24 juillet. Il demandait la relégation en série C (3e division italienne) de la Juventus de Turin ; celle-ci ne redescendra finalement qu’en série B (2e division), avec un handicap initial de 17 points et la perte de ses deux derniers titres de champion d’Italie. Mais surtout, l’AC Milan, la Lazio de Rome et la Fiorentina (Florence) ne seront pas relégués, comme l’avait demandé Palazzi, en série B. À titre pas tout à fait anecdotique, l’Inter de Milan – seul grand club à ne pas avoir mouillé dans le trucage de matchs – est sacré champion, suite à la condamnation de la Juve et de l’AC Milan. Paradoxalement, ce jugement honteusement clément – dénoncé par l’ensemble de la presse italienne – n’est pas si mauvais pour Palazzi sur le plan médiatique. Le procureur pourrait enfin gagner la sympathie du grand public, en passant du rôle de cruel briseur d’idoles à celui de victime d’un arrangement entre puissants.

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