Nelson Mandela : un documentaire à Cannes rend justice à ses co-accusés

Du procès de Rivonia qui s’est soldé par l’emprisonnement de Nelson Mandela, l’histoire retient la plaidoirie anti-apartheid de celui qui deviendra trente ans plus tard président d’Afrique du Sud. Un documentaire présenté lundi à Cannes donne la parole aux autres accusés encore en vie de ce moment d’histoire.

Nelson Mandela, en 2007. © Theana Calitz/AP/SIPA

Nelson Mandela, en 2007. © Theana Calitz/AP/SIPA

Publié le 13 mai 2018 Lecture : 3 minutes.

L’un d’entre eux, Andrew Mlangeni, 92 ans, sera sur la Croisette pour une montée des marches à la portée symbolique, alors que Nelson Mandela (mort en 2013) aurait eu 100 ans cette année.

Projeté en séance spéciale, « The State against Mandela and the others » des Français Gilles Porte (« Quand la mer monte ») et Nicolas Champeaux réunit interviews exclusives, archives sonores et… images d’animation. Une nécessité pour pallier à l’absence d’images de ce procès organisé à Pretoria entre octobre 1963 et juin 1964 et éviter une reconstitution pure et simple.

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« Demander à des acteurs de rejouer le procès c’était inconcevable. Utiliser des archives tout au long aurait été ennuyeux », explique à l’AFP Nicolas Champeaux au sujet de cette utlisation de l’animation.

Un procès aux allures de tribune politique

Pour reconstituer les images du procès, le duo a fait appel au dessinateur franco-hollandais Oerd et à une équipe d’animateurs. Avec un noir et blanc minimaliste pour faire ressentir les effets de manche, la tension du procès.

Le procès de Rivonia a envoyé Mandela en prison pendant 27 ans, mais il est aussi celui où il a prononcé une plaidoirie en forme de profession de foi restée célèbre. Mandela a su faire de ce moment une tribune politique, attirant les regards sur la lutte contre le régime ségrégationniste de l’Apartheid, au-delà des frontières.

L’idée du film est née quand Nicolas Champeaux, ancien journaliste en Afrique du Sud pour RFI, fit découvrir l’existence des 256 heures d’enregistrements sonores du procès au réalisateur Gilles Porte.

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Conscient du potentiel de ces archives, ils partent en Afrique du Sud interroger les survivants du procès (accusés et avocats), ainsi que leurs proches. Parmi eux, Winnie Mandela, l’ex-femme du leader anti-apartheid, décédée début avril à l’âge de 81 ans, qui donne ici une de ses dernières interviews.

Un énorme travail de numérisation

Parmi les co-accusés de Rivonia interrogés, figurent Ahmed Kathrada, fils d’immigrés indiens, récemment décédé, Andrew Mlangeni (noir Sud-Africain) et Denis Goldberg (blanc).

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Tous trois furent arrêtés en 1963 avec Nelson Mandela, Walter Sisulu et une partie de l’état-major de l’ANC dans leur QG clandestin de Johannesburg. Au terme du procès, ils furent condamnés à la perpétuité et pour plusieurs d’entre eux, envoyés sur l’île-bagne de Robben Island, au large du Cap.

Pour ce film, les militants anti-apartheid reviennent sur leurs luttes et leur état d’esprit, réécoutant les archives sonores du procès.

Ces précieux enregistrements, inscrits au registre « mémoire du monde » de l’Unesco, ont été restaurés et numérisés grâce au travail de l’Institut national de l’audiovisuel (Ina), en France, chargé notamment d’archiver les productions audiovisuelles.

Ils étaient trop détériorés pour être utilisés et existaient sous un format d’enregistrement audio particulier, « Dictabelts », vieux supports d’enregistrement de forme cylindrique en vinyle souple.

« Raconter aux générations futures »

Suite à un accord entre la France et l’Afrique du Sud signé en 2013, l’ensemble des 591 Dictabelts du procès ont été numérisés, puis progressivement remis à Pretoria entre 2014 et 2016.

Désormais, « nous pourrons raconter aux générations présentes et futures toute l’histoire de cette période si difficile de notre histoire, la mettre en sons, en mots et en silences, dans toute sa gloire, son horreur et, finalement, son triomphe », déclarait le ministre sud-africain de la Culture en 2016.

Aujourd’hui, l’Ina forme des professionnels sud-africains pour prendre en charge la sauvegarde numérique d’autres archives sonores liées à l’histoire de leur pays.

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