Jour de vote au Burundi : un référendum pour renforcer le pouvoir de Pierre Nkurunziza

Près de 5 millions d’électeurs sont appelés à se prononcer sur le projet d’amendement de la Constitution qui pourrait permettre à Pierre Nkurunziza de se maintenir à la tête du Burundi jusqu’en 2034.

Le président burundais, dans un bureau de vote de la province de Ngozi, lors du référendum constitutionnel, le 17 mai 2018. © DR / Présidence Burundi

Le président burundais, dans un bureau de vote de la province de Ngozi, lors du référendum constitutionnel, le 17 mai 2018. © DR / Présidence Burundi

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Publié le 17 mai 2018 Lecture : 3 minutes.

Jour-J au Burundi. Après deux semaines d’une campagne tendue, entachée de plusieurs épisodes de violence, les électeurs burundais ont commencé, dès 6 heures du matin, à affluer vers les quelques 11 000 bureaux de vote éparpillés dans le pays. Pour l’opposition, qui a appelé au boycott, ce référendum aura surtout pour effet d’enterrer l’accord d’Arusha, signé en 2000 et qui avait ouvert la voie à la fin de la guerre civile débutée en 1993.

4,8 millions de votants doivent se prononcer en faveur du « ego » ou « oya » (« oui » et « non » en kirundi) lors de ce référendum sur le projet de modification de la Constitution de 2005.

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Le président Pierre Nkurunziza s’est présenté tôt jeudi matin à l’école primaire de Ngozi II, dans la province du même nom située dans le nord du pays, d’où il est originaire. « C’est un grand jour tant attendu par la majorité de Burundais. Nous remercions tous les Burundais qui se sont levés très tôt pour aller accomplir ce geste patriotique », a déclaré le président burundais, cité par la plateforme SOS Médias Burundi.

« Nous sommes très confiants que le choix du peuple et la proclamation de la commission en charge des élections seront respectés d’autant plus que tout se passe dans la transparence depuis la campagne jusqu’à ce jour », a-t-il ajouté, selon ce collectif de journalistes constitué en 2015 après une vague de fermetures de médias burundais afin de « poursuivre sa mission d’information, pour que le monde sache ».

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Climat d’intimidation

La Cnared, plateforme d’opposition en exil, a appelé à boycotter le vote. « S’il y avait des élections libres et crédibles aujourd’hui au Burundi, Pierre Nkurunziza perdrait. Et il le sait. Même si le « non » devait gagner dans les urnes, il a une commission électorale à sa botte qui proclamerait l’inverse. On sait que les résultats sont déjà fixés par Pierre Nkurunziza », justifiait Pancrace Cimpaye, porte-parole du Cnared, dans un entretien accordé à Jeune Afrique début mai.

Celui qui osera s’opposer au projet de révision de la Constitution en subira les conséquences

Willy Nyamitwe, le très influent conseiller en communication du président Nkurunziza, a vanté pour sa part sur Twitter ce qu’il décrit comme un « engouement » sans précédent pour ce référendum.

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Celui qui osera s’opposer au projet de révision de la Constitution en subira les conséquences

Sauf surprise, le « oui » devrait l’emporter à l’issue de ce référendum largement critiqué par l’opposition et la communauté internationale. Dès le mois de décembre, lors de l’annonce du référendum, le ton était donné. « Celui qui osera s’opposer au projet de révision de la Constitution en subira les conséquences », avait alors expliqué Pierre Nkurunziza. Depuis, l’Union européenne et les États-Unis ont dénoncé le « climat d’intimidation » et de « répression » dans lequel s’est déroulé la campagne.

Plusieurs personnes accusées de faire campagne pour le « non » ont été arrêtées et seul la coalition d’indépendant Amizero y’Abarundi (« L’Espoir des Burundais »), menée par Agathon Rwasa a été autorisée à faire campagne parmi l’opposition.

Les radios BBC et Voice of America ayant été suspendues à 10 jours du vote, l’opposition est restée inaudible sur place, malgré quelques meetings ayant enregistré une forte affluence, tandis que les partisans du « ego » (« oui » en kirundi) ont sillonné le pays.

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Huis clos

Aucune mission d’observateurs internationaux n’a sollicité d’accréditation pour ce vote qui se déroulera donc huis clos. « On a vite compris qu’il n’y avait pas la volonté de la part des autorités burundaises d’accueillir des observateurs pour ce référendum », explique à Jeune Afrique un diplomate européen.

La communauté internationale s’est montrée très critique vis-à-vis de ce référendum. Michel Kafando, envoyée spécial de l’ONU auprès de la médiation sur la crise burundaise, a estimé que « tout avait été fait pour aboutir à une forme de consensus sur le projet ». « Nous avons échoué à faire temporiser le pouvoir burundais », a-t-il néanmoins ajouté.

« Cette campagne aura été largement inéquitable et utilisée comme un outil de répression supplémentaire, alimentant les crimes graves auxquels se livre le pouvoir depuis trois ans », estime la FIDH dans son dernier rapport.

Si le « oui » l’emporte, Pierre Nkurunziza pourra, à partir de 2020, briguer deux septennat et ainsi se maintenir au pouvoir jusqu’en 2034. Le CNDD-FDD, parti au pouvoir aura également une mainmise plus importante sur les institutions, notamment à l’Assemblée  où il est majoritaire. Selon la nouvelle constitution, la règle des deux-tiers sera remplacée par la majorité absolu pour le vote des lois.

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