Partenariat stratégique

Publié le 1 juin 2004 Lecture : 3 minutes.

Le Brésil de Lula veut conquérir de nouveaux marchés tout en façonnant un « front des pays du Sud ». Dernière illustration de cette stratégie volontariste : la visite du chef de l’État brésilien en Chine du 22 au 27 mai. Accompagné d’une imposante délégation de ministres et de trois cents hommes d’affaires, Luiz Inácio « Lula » da Silva a célébré en grande pompe le trentième anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques entre les deux pays. Il a présenté son voyage comme « le plus important de son mandat ». Et il a posé, avec son homologue Hu Jintao, les bases d’un ambitieux partenariat stratégique.

La Chine est aujourd’hui le troisième client du Brésil : elle lui achète pour environ 4,5 milliards de dollars de marchandises, dont d’énormes quantités de soja. Le Brésil a réalisé avec elle un excédent commercial de 2,4 milliards de dollars, en hausse de 246 % en 2003. D’après le ministre brésilien du Commerce, les échanges bilatéraux pourraient décupler au cours des prochaines années. Les Sud-Américains, qui ont fait signer des grands contrats au profit de leur avionneur Embraer, veulent prendre une part plus active au développement de l’économie chinoise. Ils souhaitent vendre leur technologie d’alcool combustible automobile (produit à partir de la canne à sucre), pour équiper les bus de Pékin et permettre de réduire le niveau de pollution de la capitale avant les jeux Olympiques de 2008. Ils vont aussi engager des coopérations dans des secteurs à forte valeur ajoutée technologique : la santé (les médicaments), l’informatique et les logiciels, et l’espace. Depuis 1999, deux satellites ont déjà été mis en orbite. Deux autres devraient suivre.
Les investissements entre les deux pays devraient connaître une augmentation significative. Dans le sens Brésil-Chine, car le marché de l’empire du Milieu est très porteur, et parce que la main-d’oeuvre y est trois fois moins chère et le prix des matières premières inférieur de 20 % à 30 %. Mais plus encore dans le sens Chine-Brésil. Pékin dispose des deuxièmes réserves de devises du monde après le Japon, avec 440 milliards de dollars. Les Chinois pourraient investir 5 milliards de dollars, ce qui doperait l’activité et aiderait à concrétiser les promesses sociales du président Lula, comme la réduction de la pauvreté. Les secteurs des télécommunications, des transports, des mines et de la sidérurgie intéressent tout particulièrement les Chinois.

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La visite de Lula comporte également un volet politique. Le président brésilien veut renforcer la stature diplomatique de son pays et en faire un des champions du Sud. Depuis son accession au pouvoir, il a visité près d’une trentaine de pays, dont l’Inde, l’Égypte, la Syrie, les Émirats, l’Afrique du Sud, la Namibie, et toutes les nations lusophones d’Afrique. Et il lorgne un siège de membre permanent au Conseil de sécurité des Nations unies. La Chine, puissance plus qu’émergente, se cherche, elle, des alliés et partenaires. Le régime communiste a beaucoup apprécié le soutien que lui a apporté Brasilia à l’ONU en votant une motion empêchant l’ouverture de discussions sur les violations des droits de l’homme en Chine. En association avec l’Inde, les deux pays ont pu tester l’utilité de leur alliance pendant le sommet de Cancún, en septembre 2003. Ils avaient réussi à faire échouer les travaux de la conférence ministérielle de mondiale du commerce (OMC), après le refus des pays riches d’amender leur régime de subventions agricoles.

Le rapprochement Brésil-Chine qui s’esquisse aura des répercussions positives en Afrique, notamment dans la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac) et en Angola, régions où les entreprises chinoises et brésiliennes sont de plus en plus présentes. Elles investissent déjà dans le bois, les mines, et bien sûr le pétrole. CVRD (Companhia Vale do Rio Doce), principal producteur et exportateur mondial de minerai de fer, et Chalco (Aluminum Corporation of China Limited), premier producteur chinois de bauxite, d’alumine et d’aluminium, ont signé une entente et envisagent de mener des investissements en commun. CVRD vient de décrocher deux permis de recherche dans le sud-est du Gabon, pour évaluer le potentiel de gisements de manganèse. Enfin, les compagnies Petrobras (Brésil) et Sinopec (Chine) devraient s’entendre pour exploiter, produire et raffiner du pétrole africain.

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